Paris : Le Vème arrondissement en 20 étapes patrimoniales - Du Panthéon à la Sorbonne, en passant par le Musée de Cluny et la rue Mouffetard, jusqu'aux Arènes de Lutèce et le Jardin des Plantes



Le Vème arrondissement de Paris, longe la Seine sur la rive gauche, pentagone irrégulier d'une superficie 254 hectares dont les limites ont été déterminées en 1860 lors de l'annexion des communes limitrophes au territoire de Paris. Lors du découpage administratif et de la création de vingt arrondissements, le Vème est divisé en quatre quartiers Saint Victor, Jardin des Plantes, Val de Grâce, Sorbonne. Il est l'héritier directe de la ville gallo-romaine de Lutèce développée au Ier siècle. La cité antique prospère s'organise autour d'un axe routier, le cardo maximus qui correspond à notre actuelle rue Saint Jacques. Amphithéâtre, arènes, thermes sont édifiés. Coeur de l'arrondissement contemporain, la Montagne Sainte Geneviève au pied de laquelle sinue la Bièvre, affluent de la Seine, devient le centre de la vie intellectuelle et religieuse. Depuis cette colline, la sainte patronne de Paris aurait galvanisé les habitants de la ville pour résister en 451 aux Huns d'Attila. Les terribles guerriers ont alors un rendez-vous belliqueux avec les Wisigoths aux environs d'Angoulême. Ils contournent Paris qui est sauvée. 

En 885, les raids normands dévastent toute la rive gauche. La reconstruction tarde. Avant son départ pour la croisade, le roi Philippe Auguste, fait édifier à partir de 1190, une nouvelle enceinte défensive dont le tracé marque profondément l'urbanisation du territoire du Vème arrondissement. Dans le quartier, se concentrent un nombre important d'églises, de prieurés. Les nombreux couvents sur le territoire du Vème arrondissements, ont disparu laissant leur nom aux rues du quartier. Les communautés entretiennent l'activité d'enseignement. Le Quartier latin, appellation par métonymie, quartier des étudiants et de leurs maîtres, qui s'expriment en latin la langue des savants, précise sa vocation intellectuelle dès le XIIème siècle. En 1257, Robert de Sorbon fonde la Sorbonne originelle. La tradition se perpétue. Aux universités viennent s'agglomérer dès le XVIème siècle, maisons d'édition et librairies. L'église Sainte Geneviève inaugurée en 1781, est désacralisée à la Révolution et devient le Panthéon, lieu de mémoire et nécropole des grands hommes. Les bâtiments de l'ancienne abbaye royale de Sainte Geneviève sont transformés en Ecole centrale du Panthéon puis en lycée, rebaptisée lycée Henir IV sous la Restauration (1814-1830). En mai 1968, le Vème arrondissement s'illustre comme le foyer de la contestation étudiante, avec notamment les barricades de la rue Gay-Lussac. Quartier touristique, animé le soir, étudiants et visiteurs du monde entier se retrouve du côté de la rue Mouffetard pour dîner et prendre un verre. La rédaction de Paris la douce vous emmène découvrir le Vème arrondissement en 20 étapes patrimoniales remarquables. 





1/ Rue Mouffetard
Accès rue Thouin, rue Censier et rue Pascal – Paris 5
Métro Censier Daubenton ligne 7 / Place Monge ligne 7

La rue Mouffetard, surnommée affectueusement la Mouffe forme un ensemble pittoresque, ponctué de nombreux lieux de mémoire. Aujourd’hui bordée essentiellement de maisons de bourg préservées, datées du XVIème siècle au XIXème, elle a conservé le charme unique du Vieux Paris, volontiers piétonnier. Ancien tronçon d’une voie romaine, elle se trouvait sur la grande route menant vers l’Italie par Fontainebleau et Lyon. Elle devient dès le XVIIème siècle un important foyer de contestation politique, principale voie du populaire bourg Saint Médard rattaché à Paris en 1724. La rue Mouffetard marque l’histoire de la littérature par la présence d’estaminets fréquentés par les poètes du quartier Latin, tel le célèbre cabaret de la Pomme de Pin, repaire de François Villon et de Rabelais au XVème siècle, ou des poètes de la Pléiade au XVIème siècle. Le Marquis de Sade y avait acquis une garçonnière où il fut arrêté en 1763. Victor Hugo relate les barricades de la rue Mouffetard dans « Les Misérables » (1862).  Plus tendre, plus récent, Pierre Gripari dans les « Contes de la rue Broca » (1967), imagine « La sorcière de la rue Mouffetard », histoire d’une sorcière qui envisage de manger une petite fille à la sauce tomate, recette souveraine pour devenir jolie.




2/ Fontaine du Pot-de-fer
60 rue Mouffetard / 1 rue du Pot-de-Fer
Métro Place Monge ligne 7

La Fontaine du Pot-de-Fer, dite aussi fontaine du faubourg Saint-Marcel ou improprement fontaine Mouffetard, date de 1671. Cet ouvrage monumental est attribué à Michel Noblet (1605-1677), architecte ordinaire du roi, marié à la fille de Michel Villedo, et garde des fontaines de la Ville de 1657 à 1681. En 1624, une première construction à l’angle de la rue Mouffetard et de la rue du Pot-de-Fer remplace un puits médiéval. Ce dernier porte déjà le nom de la voie baptisée en hommage aux chaudrons fumants des cuisines du quartier. Mouffetard est fameux pour ses nombreuses tavernes dès les Moyen-Âge. La fontaine est alors l’un des rares point d’eau du bourg de Saint-Médard puis du quartier Saint-Marceau, annexé à la Ville de Paris en 1730. Alimentée par l’aqueduc Médicis ou aqueduc d’Arcueil ou encore aqueduc des eaux de Rungis, elle devient tout à fait stratégique. En 1671, remise en valeur, elle est habillée d’une nouvelle construction en pierre de taille. Propriété de la Ville de Paris, la fontaine du Pot-de-Fer a été inscrite aux Monuments historique par arrêté du 27 février 1925. Le site est lui-même inscrit le 6 août 1975 pour son caractère historique et pittoresque.




3/ Passage des Postes
Accès 104 rue Mouffetard / 55 rue Lhomond - Paris 5
Métro Censier Daubenton ligne 7

Le Passage des Postes débouche sur la rue Mouffetard à travers un immeuble faubourien du XIXème siècle, trottant sur les pavés depuis la rue Lhomond. Pittoresque, les deux entrées se caractérisent par des plafonds à solives. La venelle hors du temps file entre les bâtiments, bouffée nostalgique d’un Vieux Paris en voie de disparition. Le Passage des Postes est le fruit d’une initiative privée. Au cours de la Seconde Restauration, à la fin du règne de Louis XVIII, quelque mois avant la Révolution de Juillet, le sieur Barral de Montauvrard, apparenté à une vieille famille originaire au XIIIème siècle du Dauphiné, au XIXème siècle proche des notables d’Empire, cousin par alliance des Beauharnais, est propriétaire de terrains dans le quartier du Val de Grâce. Afin de faciliter ses affaires, il obtient par ordonnance royale 21 avril 1830 l’autorisation d’ouvrir un passage entre la rue des Postes, actuelle rue Lhomond, et la rue Mouffetard. Percée à travers le pâté de maison, la voie large de 9,74 mètres, déploie peu de numéros 1, 2, 3, 4, 6, 8.




4/ Librairie Shakespeare and Company
57 rue de la Bûcherie - Paris 5
Tél : +33 1 43 25 40 93
Horaires : Du mardi au samedi de 10h à 20h - Dimanche midi à 19h
Métro Saint Michel ligne 4

Shakespeare and Company, librairie anglophone mythique du quartier Latin, entretient la légende du Vieux Paris. Quai de Montebello, en bord de Seine, ce centre de la culture anglo-saxonne niche dans un bâtiment chargé d’histoire, aux fondations héritées d’un ancien monastère du XVIème siècle. Destination de promenade, la librairie indépendante, propice à la flânerie, a longtemps été le point de chute d’une certaine bohème littéraire américaine, en particulier de la Beat Generation. En 1951, George Whitman, petit-fils du poète américain Walt Whitman, reprend une ancienne épicerie au 37 rue de le Bûcherie. Il fonde le Mistral, une librairie anglophone dont l’objectif est de faire connaître, de soutenir les écrivains de langue anglaise de de passage à Paris. A rebours des enseignes de la grande distribution, la librairie Shakespeare and Company affiche un capharnaüm joyeusement anachronique de livres, journaux, magazines, éditions originales, ouvrages d’occasion, œuvres confidentielles et best-sellers, prose, poésie, histoire, sociologie, politique. Une véritable expérience goûtée par habitués et touristes.




5/ Immeuble rose
5 rue Lagrange - Paris 5
Métro Saint Michel ligne 4 / Cluny la Sorbonne ligne 10

L’Immeuble rose du 5 rue Lagrange attire les regards et les curiosités. Cette maison de rapport, façade étroite délicate, quatre étages plus les combles, passerait presque inaperçue tant sa silhouette classique se fond dans le paysage architectural. Néanmoins son rose poudré, couleur de l’enfance, distingue l’édifice par sa belle nuance dans l’air du temps, un pastel lumineux également synonyme d’une modernité assumée. Au cœur du Quartier Latin, l’histoire se croise au coin de la rue attablée dans un café. Face au square René-Viviani où se trouve le plus vieil arbre de Paris, à deux pas de l’église Saint Julien le Pauvre, l’immeuble rose du 5 rue Lagrange n’a pas de récit échevelé à raconter. Cependant, il est cher au cœur de nombreuses personnes qui firent leurs études à Paris à la fin des années 1960. Le rouge - et par extension le rose - signe d’accueil pour les voyageurs au XIXème siècle se développe afin de signaler les pensions de famille. A cette période, l’avancée technologique et les nouvelles connaissances chimiques permettent de produire de façon industrielle les couleurs. Dans les années 1960/1970, l’immeuble du 5 rue Lagrange, alors peint de rouge dans la perpétuation de cette tradition, abrite une pension de jeunes filles tenue par des religieuses marianistes.




6/ Cadran solaire de Salvador Dali
Pignon 27 / 31 rue Saint-Jacques - Paris 5
Métro Cluny la Sorbonne ligne 10

Un cadran solaire signé Salvador Dali aussi discret que son auteur était flamboyant se cache scellé dans un renfoncement de la rue Saint Jacques. Sur le flanc de l’immeuble du numéro 27, au niveau du 31, ce visage féminin en forme de coquille Saint-Jacques modelé dans le béton a été offert en 1966 à la Ville de Paris. L’oeuvre a été créée par Dali en l’honneur d’amis qui tenaient la boutique située juste en dessous. Depuis, le magasin a changé de mains à de nombreuses reprises mais cet instrument de mesure du temps est resté. Souvenir poétique, fugace apparition. Le cadran solaire est inauguré en grandes pompes le 15 novembre 1966 au cours d’une cérémonie excentrique qualifiée par l’artiste de « premier événement du XXIème siècle ». A cette occasion, juché dans la nacelle d’un monte-charge, Dali dévoile lui-même sa création sous les flonflons de la fanfare de l’Ecole des Beaux-Arts. En plein automne parisien, la grisaille est vaincue par un projecteur braqué sur l’oeuvre afin qu’elle puisse indiquer l’heure au moins lors des festivités.




7/ Plus vieil arbre de Paris
Square René-Viviani - Quai de Montebello en face de Notre Dame - Paris 5
Métro Saint Michel ligne 4 / Cluny la Sorbonne ligne 10

Le plus vieil arbre de Paris poursuit sa course à travers les siècles au cœur du quartier Latin, haut lieu touristique. Il dispense son ombrage centenaire au sein du square René-Viviani du nom d’un avocat et homme politique français, député socialiste cofondateur en 1904 du journal l’Humanité avec Jean Jaurès, offre depuis le quai de Montebello une vue imprenable sur Notre-Dame. Au fond du jardin se dresse l’Eglise Saint-Julien-le-Pauvre, parmi l'une des doyennes de Paris. Mais la star incontestée du lieu est cet étrange arbre penché recensé comme le plus vieil arbre connu et identifié de la Capitale. Ce robinier ou faux-acacia a été planté en 1601 par Jean Robin arboriste du roi Henri IV, directeur du Jardin des Apothicaires devenu depuis le Jardin des Plantes. 




8/ Eglise Saint Julien le Pauvre
Rue Saint Julien le Pauvre / Square Viviani – Paris 5
Métro Saint Michel ligne 4 / Cluny la Sorbonne ligne 10

L’église Saint-Julien-le-Pauvre est considérée comme la plus ancienne église de Paris dont l’histoire n’a pas connu d’interruption. Ses origines avérées remontent au moins au VIème siècle. La présence d’une chapelle est attestée dès 507. Néanmoins, le bâtiment actuel a été édifié entre le milieu du XIIème siècle et le milieu du XIIIème siècle. Saccagé à de nombreuses reprises, laissé par intermittence à l’abandon, l’édifice originel a connu de nombreux effondrements qui l’ont amputé notamment de sa façade première. Celle visible de nos jours date de 1651. Magasin à sel sous la Révolution puis entrepôt de laine loué par l’Hôtel-Dieu, l’église ne doit sa résurrection qu’à la ferveur du père Alexis Kated. A la fin du XIXème siècle, la communauté des chrétiens d’Orient parvient à redonner sa vocation originelle à ce lieu malmené. Dédié au culte grec catholique melchite depuis 1889, les offices y sont célébrés en grec et en arabe. Singulier mélange de style où domine le Gothique de transition, l’architecture illustre une histoire mouvementée. La modestie de l’entrée, son austérité rappelle celle des constructions romanes du Sud de la France. L’église Saint-Julien-le-Pauvre a désormais retrouvé sa plénitude spirituelle.




9/ Plus vieille enseigne de Paris, Saint Julien l'Hospitalier au fronton du Studio Galande
Studio Galande - 42 rue Galande – Paris 5
Métro Saint Michel ligne 4 / Cluny la Sorbonne ligne 10

L’enseigne la plus ancienne de Paris serait un bas-relief, gravé au fronton du 42 rue Galande. Le panneau sculpté représente une scène empruntée à l’histoire de saint Julien l’Hospitalier. A Paris au Moyen-Âge, le nom des rues est rarement signalé in sitù. La faible alphabétisation de la population rend inutiles ces inscriptions, impossibles à lire pour la majorité. Dès 1200, des enseignes gravées apparaissent au-dessus des portes d’entrée afin d’identifier maisons et commerces. Les adresses sont désignées par le symbole représenté dans la pierre. Pour s’orienter les Parisiens évoquent la maison au cygne, celle au lion d’or, indication à laquelle ils ajoutent souvent le nom du propriétaire. Un texte administratif datant de 1380 signale un bas-relief représentant saint Julien l’hospitalier, gravé sur la maison dite de la Heuze, notre actuel 42 rue Galande. Cette mention lui confère le titre de plus vieille enseigne attestée de Paris. Le précieux original a été déposé afin d’être conservé dans les collections du Musée Carnavalet. Au fronton du Studio Galande, cinéma d’art et d’essai célèbre pour diffuser depuis sa sortie en 1975 le film-spectacle « The Rocky Horror Picture Show », le panneau visible actuellement est une réplique moulée sur l’ancienne enseigne. 




10/ Rue du Chat qui Pêche 
Accès 9 quai Saint Michel / 12 rue de la Huchette – Paris 5
Métro Saint Michel ligne 4

La rue du Chat qui Pêche, venelle pavée fendue par un ruisseau axial, sinue entre deux immeubles, réminiscence du Vieux Paris d’avant Haussmann. A deux pas de la place Saint Michel et de la cathédrale Notre Dame, l’étroit passage a été percé en 1540. A cette époque, les maisons qui bordent la Seine ont littéralement les pieds dans l’eau et la rive est accessible par quelques volées d’escaliers. Chemin de traverse entre la rue de la Huchette et ce qui deviendra le quai Saint Michel, la courte voie facilite l’accès aux berges des habitants du quartier venus puiser les eaux du fleuve. Désormais boyau fort malodorant, la rue du Chat pêche semble servir de lieu d’aisance à un public peu ragoûté, peu ragoûtant. Il lui reste le charme de ce nom cocasse tout à fait délicieux et propre à inspirer les légendes. Sa singulière conformation qui attire encore les touristes en mal de pittoresque en fait l’une des rues les plus étroites de Paris. Officiellement 1,80 mètres au plus large du passage et 1,57 mètres au plus étroit. Néanmoins la rue du Prévôt - 1,80 mètres - dans le Marais, la rue Berton - 1,50 mètres - à Passy et la sente des Merisiers - 0,87 mètres - Porte de Vincennes, lui disputent âprement le titre.




11/ Musée de Cluny - musée national du Moyen-Âge
28 rue du Sommerard - Paris 5
Tél : 01 53 73 78 00
Horaires : Du mardi au dimanche de 9h30 à 18h15 - Fermé le lundi
musee-moyenage.fr
Métro Cluny la Sorbonne ligne 10

Le Musée de Cluny - Musée national du Moyen-Âge a rouvert ses portes le 12 mai dernier à la suite d’un vaste cycle de restaurations en trois étapes, initié en 2011. Cette mue, la plus importante depuis la création de l’institution en 1843, a été réalisée pour un budget de vingt-six millions d’euros dont six autofinancés. La succession de grands travaux a permis d’ajouter un espace d’accueil de 650m2 donnant sur la rue Du Sommerard. L’écrin réinventé des collections médiévales publiques s’inscrit désormais dans une muséographie contemporaine aux décors inédits. L’institution présente de manière pérenne mille six cents œuvres issues des fonds du musée. L’épure de la monstration, la refonte des espaces d’exposition dans une optique de décloisonnement et de recontextualisation des artefacts, valorisent les collections de l’Antiquité jusqu’aux prémices de la Renaissance. Par l’attention particulière portée aux cartels, le Musée de Cluny éclaire les différentes facettes des périodes associées au Moyen-Âge, près de mille cinq cents ans d’histoire, et les rend accessible aux nouvelles générations tout en déconstruisant l’idée d’une époque marquée par l’obscurantisme. 




12/ Statue de Montaigne 
56 rue des Ecoles - Paris 5
Métro Cluny la Sorbonne ligne 10

La statue de Montaigne, rue des Ecoles à l’avant du square Paul Painlevé, juste en face de la Sorbonne, fait l’objet d’un curieux rituel magique de la part des étudiants en quête de chance. Afin de se porter chance avant les partiels et autres examens, la tradition requiert de caresser le pied droit du philosophe en proclamant « Salut Montaigne ! ». La savate de bronze lustrée par les mains anxieuses en quête de chance témoigne de l’engouement pour cette amusante superstition. Cette oeuvre signée Paul Landowski (1875-1961), d’un académisme esthétique sans grand intérêt a été offerte à la Ville de Paris par le Dr Armaigaud proche de Louis Barthoud (1862-1934), journaliste, politique, et alors président de la Société des amis de Montaigne. Monument hommage au grand homme, le plâtre originel prend place devant l’université en 1933 à l’occasion des 400 ans de l’anniversaire de la naissance de Montaigne. La statue finale en marbre est inaugurée en 1934. La ferveur portée à la sculpture n’a pourtant pas toujours été aussi clémente. Le Quartier Latin haut lieu de la contestation estudiantine semble s’être acharné sur la malheureuse statue. Dès son inauguration, l’original en marbre est régulièrement vandalisé, un peu à l’instar du baron Dupuytren dans la cour de l’Hôtel Dieu que les internes en médecine grimaient chaque année avec fantaisie depuis 1984 avant la plainte des héritiers de l’artiste. Mais les étudiants de la Sorbonne moins potaches, font subir à Montaigne des outrages plus définitifs qui nécessitent que la tête soit refaite par l’artiste à la fin des années 1950. A force de destructions volontaires, l’entretien du marbre devient impossible à financer et en 1989 la municipalité préfère le remplacer par une fonte en bronze plus résistante.




13/ Immeuble à tranche fine
Accès 14 rue Thouin – Paris 5
Métro Cardinal Lemoine ligne 10

Tranche fine et profil biseauté, sous un angle particulier, certains immeubles du Quartier Latin, curiosités architecturales, donnent l’illusion d’une perspective sans profondeur. C’est le cas d’une construction située au 14 rue Thouin dans le Vème arrondissement. Son apparence assez banale de face est contrebalancée par un profil à l’effet saisissant lorsque l’on débouche dans la rue depuis celle de l’Estrapade. L’enceinte Philippe Auguste, maintenue de 1190 à 1670, était un rempart défensif de 8 à 10 mètres de haut, déployé sur 5 km de long sur une épaisseur de 3 mètres et ponctué de soixante-dix tours défensives de 6 mètres de diamètre. La muraille rendue obsolète par le développement de l'enceinte Charles V au long du XIVème siècle, certains tronçons préservés ont été littéralement avalés par les nouvelles constructions. La maison située au numéro 14 rue Thouin a été construite en 1688 dans l’angle formé par le tracé de l’enceinte médiévale et celui de la rue. Prenant appui sur le rempart, les contraintes de la parcelle ont donné à cette bâtisse sa forme en sifflet et son étroitesse. Par la suite, la portion de l’enceinte contre laquelle elle prend appui, est démolie laissant un vide devenu cour et une paroi abrupte. L’angle de l’immeuble marque le point d’inflexion sud-est de l’ancienne muraille dont les vestiges sont toujours visibles côté cour.




14/ L’arbre bleu - Pierre Alechinsky
40 rue Descartes - Paris 5
Métro Cardinal Lemoine ligne 10

L’arbre bleu ou L'arbre des rues de Pierre Alechinsky dresse sa longue silhouette céruléenne à l’angle des rues Descartes et Clovis, dans le quartier de la Sorbonne, derrière le Panthéon. Réalisée à l’occasion du projet Murs de l’an 2000, cette fresque célèbre la puissance de l’imaginaire et la sérénité d’une nature de plus en plus rare en ville. Au sommet de la montagne Saint-Geneviève, l’arbre d’un azur saturé trouve sous le pinceau de l’artiste belge une dimension onirique qui enchante le paysage urbain. Comme peint par un calligraphe dans l’élan du mouvement, le motif central principal est complété d’un ensemble de vignettes qui forment cadre et alimentent la narration en la complétant. Des mots gravés se déploient le long de la fresque. L’oeuvre graphique de Pierre Alechinsky dialogue avec un poème de son ami Yves Bonnefoy. Les vers et les images convoquent la force et les fragilités du vivant cerné par la réalité des cités de l’homme, invitent à préserver cette précieuse nature.




15/ Sainte Geneviève
Pont de la Tournelle – Paris 5
Métro Point Marie ligne 7 / Cardinal Lemoine ligne 10

La statue de Sainte Geneviève placée sur la pile Sud du pont de la Tournelle protège la ville de sa silhouette massive. Cet hommage à la sainte patronne de Paris est l'oeuvre de Paul Landowski (1875-1961). Inaugurée en même temps que le nouveau pont en 1928, et malgré les quelques modifications réalisées, la statue mécontente fortement l’artiste. Des années plus tard en 1943, il en parle encore dans des termes peu flatteurs. « Et combien je me désole, quand en me retournant, j’aperçois cet affreux pilier de ma pauvre Sainte Geneviève ! ». Frustration d’un créateur pas entendu et blessure d’amour propre. La mésentente entre le sculpteur, les architectes et les commanditaires a fait couler beaucoup d’encre dans la presse en son temps. Petite histoire cocasse.




16/ Musée de la Sculpture en plein air
Jardin Tino Rossi - Port Saint Bernard - Paris 5
Métro Sully Morland ligne 7 / Jussieu lignes 7, 10

Le Musée de la Sculpture en plein air, installé depuis 1980 dans le jardin Tino Rossi mais relativement méconnu, se cache au bord de l’eau derrière les imposants bâtiments de l’université de Jussieu. A ciel ouvert, ce musée de la Ville de Paris sort les œuvres de leur réclusion compassée pour les offrir sans filtre au public. Ici pas de gardien désagréable, ni d’exploration cérémonieuse, les visiteurs sont en contact direct avec les collections. Cette proximité, la possibilité d’approcher au plus près des sculptures, de les toucher, excite naturellement la curiosité intellectuelle. Les enfants s’approprient volontiers les pièces pour y jouer, un lecteur s’adosse à l’une d’elle sans plus de façon, une passante s’accoude sur une autre afin de profiter d’un rayon de soleil. Intégré au quotidien, cet art contemporain pas toujours bien perçu trouve dans cette proposition sensible et sensorielle un formidable moyen de promotion. Avec le musée de la Sculpture en plein air, l’art sort du cadre et envahit la ville. Visite originale hors les murs, cette promenade artistique se révèle à la fois bucolique et urbaine.




17/ Arènes de Lutèce 
Accès 49 rue Monge - rue des Arènes - Paris 5
Horaires : Tous les jours de 9h à 18h durant l'hiver et de 8h à 19h30/20h30 durant l'été
Métro Place Monge ligne 7

Les Arènes de Lutèce, vaste lieu de spectacle en plein air, ouvrage mixte, scène et arènes, ont été pensées dès l’origine pour accueillir à la fois des représentations de théâtre, de danse et des jeux du cirque, chasses, combats de gladiateurs, d’animaux. L’amphithéâtre, édifié entre le Ier et le IIème siècle sur le flanc de la future Montagne Sainte Geneviève, a longtemps été considéré comme définitivement perdu. Dès le IIIème siècle, son souvenir peu à peu s’étiole alors que le site est absorbé par le temps. Néanmoins, la mémoire de cette construction gallo-romaine perdure dans la tradition géographique jusqu’au Moyen-âge où il est fait mention dans un document officiel d’un clos des arènes. Avec le nivellement des sols, l’érosion des structures et les pierres enlevées pour servir à d’autres constructions, notamment l’enceinte Philippe-Auguste, l’idée de l’emplacement se fait de moins en moins précis jusqu’à sombrer tout à fait dans l’oubli. En 1869, à l’occasion des travaux d’aménagement de la rue Monge percée en 1860, la mise à jour de vestiges de la partie nord des Arènes de Lutèce sonne comme une redécouverte inespérée. Cependant, il faudra la ferme intervention de la Commission du Vieux Paris, intervention menée par Victor Hugo et Victor Duruy, pour qu’elles soient classées au titre des monuments historiques par arrêté du 31 mars 1884. Aujourd’hui, elles sont avec les thermes de Cluny, le dernier témoignage émouvant de la période gallo-romaine à Paris.




18/ Fontaine Cuvier
Angle rues Cuvier et Linné - Paris 5
Métro Place Monge ligne 7 / Jussieu lignes 7 et 10

La Fontaine Cuvier, monumentale a été érigée entre 1840 et 1846 en hommage à Georges Cuvier (1769-1832), naturaliste, professeur d’anatomie comparée au Muséum d’histoire naturelle, père fondateur de la paléontologie. Et un sale type. Il fait partie des scientifiques qui ont soutenu les théories anatomistes racistes développées à cette époque. Fasciné par le cas de Saartjie Baartman, la Vénus Hottentote, esclave sud-africaine montrée dans des zoos humains à travers toute l’Europe, Cuvier a joué un rôle sordide lors du décès de celle-ci. Autopsie, moulages, prélèvement d’organes, reconstitution de son squelette dans le but de l’exposer, la dépouille objectivée de cette malheureuse victime, devenue pièce des collections du Muséum d’histoire naturelle, ne sera rendue à l’Afrique du Sud afin d’être décemment inhumée qu’en 2002. Ambitieux opportuniste politique, arriviste, Cuvier a ralenti, du fait de sa mainmise sur le système universitaire, la diffusion en France des théories transformistes qui mèneront à la théorie de l’évolution. 




19/ Jardin des Plantes
Galeries, jardins, zoo
57 rue Cuvier - Paris 5
Tél : 01 40 79 56 01 
Horaires : Ouvert tous les jours - Du 1er au 25 mars 2023 : 8h - 18h30 - Du 26 mars au 30 septembre : 7h30 - 20h - Du 1er au 28 octobre : 8h - 18h30 - Du 29 octobre au 29 février 2024 : 8h - 17h30
Métro Gare d’Austerlitz lignes 5 et 10 / Jussieu ligne 10

De nos jours, le Muséum regroupe une vingtaine de sites dédiés à l’étude scientifique du vivant, parmi lesquels le Jardin des Plantes originel, ou encore le Musée de l’Homme, le Parc Zoologique de Paris, la Grande Galerie de l’Evolution, ou encore l’arboretum Versailles-Chèvreloup… Le Jardin des Plantes est l’une des plus anciennes institutions scientifiques de France. Cet établissement de premier plan attire depuis sa création savants, botanistes, zoologistes, paléontologues du monde entier. La communauté de scientifiques oeuvre au sein d’un laboratoire de recherche unique, et dispense un enseignement réputé au cœur de l’école de botanique, où se croisent étudiants en cursus scientifiques, horticulteurs et même amateurs. Le Muséum national d’histoire naturelle déploie des galeries historiques exceptionnelles, la Grande Galerie de l’Evolution, la galerie de Paléontologie et d’Anatomie comparée, la Galerie de Minéralogie, auxquelles s’ajoutent les espaces de la Ménagerie et le Zoo du Jardin des Plantes, ainsi que les grandes serres, expérience sensorielle et esthétique. Les expositions développées abordent des thématiques aussi bien historiques que scientifiques ancrées dans la réalité contemporaine tel que les enjeux de la biodiversité.




20/ Jardin Alpin du Muséum national d'Histoire naturelle
Accès par le jardin de l’Ecole de botanique
47 rue Cuvier - Paris 5
Ouvert tous les jours, accès gratuit
Visites guidées les 1er et 3ème jeudis de chaque mois
Métro Gare d’Austerlitz lignes 5 et 10 / Jussieu ligne 10

Le Jardin Alpin du Muséum d’histoire naturelle est une délicieuse enclave aussi verdoyante que méconnue dont la situation singulière ajoute à la discrétion. Aménagé dans une cuvette, en contrebas de la Ménagerie et de l’allée Cuvier, il n’est accessible que par un souterrain ouvrant sur le jardin de l’Ecole de botanique. Cette petite vallée à gradins se trouve à trois mètres sous le niveau du Jardin des Plantes. Les collections de plantes sont ainsi protégées du vent et des intempéries, gel ou canicule, tandis qu’est préservée la fraîcheur nécessaire à la flore de montagne d’origines variées, ou l’hydrométrie adéquate pour les végétaux méditerranéens. Le relief accidenté des terrasses artificielles a été pensé afin de présenter des végétaux de zones montagneuses, de basse, moyenne et haute altitude. Les botanistes se sont ingéniés à récréer des environnements, trente-deux rocailles différenciées selon les origines géographiques et les milieux géologiques restitués. Les microclimats naturellement établis selon l’orientation adret (exposition au sud) ou ubac (au nord), permettent d’obtenir dans un espace restreint des amplitudes thermiques importantes auxquelles les scientifiques ont attribué des écosystèmes particuliers. Entre 2000 et 3000 végétaux de variétés différentes s’épanouissent au Jardin Alpin. En se promenant dans ses allées, le flâneur voyage au bout du monde, du massif des Cévennes aux Alpes, du Caucase aux Balkans, de la Corse à l'Atlas, en Asie au Japon ou en Chine, des Pyrénées à l’Himalaya jusqu’en Amérique du Nord.



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.