Paris : Les 10 plus belles fontaines murales de Paris

 

Les Fontaines murales de Paris, aussi belles soient-elles, sont souvent d’anciens points d’eau utilitaires, hérités du réseau de distribution. La Capitale compte environ trois-cents fontaines d’époques et de styles variés qui chacune à leur façon raconte un morceau d’Histoire. Leur vocation originelle, alimenter au quotidien la population, témoigne de l’une des problématiques majeures de la Ville, l’approvisionnement en eau. Au XIIème siècle, les congrégations religieuses reprennent une partie des anciennes canalisations gallo-romaines afin de capter les eaux de sources de Belleville, du Pré-Saint-Gervais et ainsi irriguer leurs terres maraîchères. Au XVIIème siècle, Marie de Médicis ordonne la construction d'un aqueduc afin d'alimenter le palais du Luxembourg et ses jardins sur le modèle de l’aqueduc gallo-romain de Rungis. Sous le règne de Louis XIV, les fontaines d’agrément détachées de toute fonction triviale symbolisent le prestige de la ville, la prospérité. Le progrès technologique permet l’implantation des premières pompes hydrauliques qui puisent directement dans les flots de la Seine. A la veille de la Révolution, les pompes à feu de l’Alma et du Gros Caillou sont installées sur les berges. Ces dispositifs élémentaires mais efficaces, éclairent les soucis de potabilité des eaux du fleuve. Le décret impérial de Saint Cloud en 1806 permet la création d’une vingtaine de fontaines monumentales. Ces nouvelles infrastructures réalisées sur des plans d’architecte et d’ingénieurs de prestige améliorent le réseau. L’alimentation en eau progresse grâce au creusement du canal de l’Ourcq, du canal Saint Martin et du bassin de la Villette. Sous le Second Empire, l’ingénieur Belgrand contribue au développement du réseau de distribution directement dans les immeubles, et en étage. Modernité du nouveau Paris haussmannien. 

Aujourd’hui, patrimoine souvent négligé du fait d’un cruel manque d’entretien, d’un budget réduit à peau de chagrin, les fontaines contribuent au charme de Paris. Près de la moitié des fontaines parisiennes sont à sec. Désormais, la promenade de fontaine en fontaine se teinte d’un peu de nostalgie. Disséminées à travers la ville, les créations témoignent de l’histoire de Paris et de l’histoire de l’art. Et pourtant nombreuses sont menacées. Plaisir de l’eau, sensorialité, les fontaines invitent à la contemplation. La rédaction a sélectionné les 10 plus belles fontaines murales de Paris !





11 rue Saint Honoré - Paris 1
Métro Tuileries ligne 1

La Fontaine de la Croix du Trahoir, oeuvre de Jacques-Germain Soufllot (1713-1780), maître du néoclassique, architecte du Panthéon, marque l’angle des actuelles rues Saint Honoré et de l’Arbre Sec. Inscrit aux titres des Monuments historiques par arrêté du 2 février 1925, l’ensemble monumental est édifié en 1776 sur l’emplacement approximatif d’une ancienne fontaine du XVIème siècle. Charles Claude Flahaut de la Billarderie, comte d’Angiviller (1730-1809) administrateur des arts, et dernier directeur général des Bâtiments du roi conduit le projet. La fontaine de la Croix du Trahoir, hérite son curieux nom de l’édicule originel construit sous François Ier vers 1529. Certaines sources citent une intervention sur le décor des façades du sculpteur Jean Goujon (1510 - vers 1567) mais elle n’est pas avérée. La fontaine de la Croix du Trahoir primitive est rénovée en 1606, sous Henri IV, puis déplacée en 1636. Au XVIIIème siècle, vétuste, elle est rasée pour être reconstruite en 1776 comme le mentionne une plaque commémorative située sur la façade nord.





Angle rue de Richelieu et rue Molière - Place Mireille - Paris 1
Métro Pyramide lignes 7, 14

La fontaine Molière, située au 37 rue de Richelieu, à deux pas de la Comédie française célèbre le génie de Jean-Baptiste Poquelin, grand dramaturge national plus connu sous le nom de Molière (1622-1673). Inauguré le 10 janvier 1844, le monument n’est toujours pas inscrit aux Monuments historiques malgré l’attachement des Parisiens à cet hommage. En 1838, lorsqu’une ancienne maison est rasée au carrefour des rues de Richelieu et Molière, la création d’une fontaine est envisagée. L’ouvrage inédit remplacerait alors une construction plus ancienne, fontaine du XVIIème siècle, édifiée en 1671, dite de l’Echaudé-Richelieu. Cette dernière a été détruite en 1830 car elle perturbait la circulation croissante aux alentours du Palais Royal. François Joseph Regnier (1807-1885) sociétaire de la Comédie française relance alors l’idée d’un monument hommage à Molière. Jusqu’alors, peu de personnalités civiles sont représentées dans l’espace public, privilège des souverains et des chefs de guerre. Le caractère d’utilité publique de la fontaine donne plus de poids à l’entreprise. Une souscription nationale lancée par l’Académie française, finance le projet. La fontaine est érigée à deux pas de l’ancien domicile du dramaturge, situé 40 rue de Richelieu, lieu où il est décédé le 17 février 1673, vers 22h, au sortir d’une représentation du « Malade imaginaire ». Représentation au cours de laquelle il avait fait un malaise. Contrairement à la légende, le dramaturge n’est pas mort sur scène mais chez lui, des suites d’une « fluxion de poitrine », une pneumonie ou une pleurésie. La fontaine Molière vient de faire l’objet d’une restauration soigneuse. Elle est désormais de nouveau en eau après des années d’abandon.





9 rue Charlemagne - Paris 4
Métro Saint Paul ligne 1

La Fontaine Charlemagne, en absence de dénomination officielle fixe, a pris dans le langage courant le nom de la rue où elle se trouve. Elle est aussi parfois désignée comme la « fontaine à l’enfant portant une coquille ». Edifiée en 1840 dans un style néoclassique monumental, la date gravée en chiffres romains au fronton de l’édicule reste la seule indication concernant sa réalisation. Aucune inscription ni dans la pierre ni dans les archives ne fait part du nom de l’architecte. Sa création a probablement suivi l’arrêté préfectoral d’août 1840, sous la Monarchie de Juillet, suggérant la mise en place de nouvelles fontaines. Cependant, détail intéressant, il semblerait que la figure centrale en fonte, présente au catalogue de la fonderie du Val d’Osne de 1860, serait ultérieure à son cadre d’une vingtaine d’année. La Fontaine Charlemagne, adossée à mur de l’ancien presbytère de l’église Saint-Paul-Saint-Louis, se trouve dans le voisinage direct d’importants vestiges d'une tour de l'ancienne enceinte de Philippe Auguste, dite tour Montgommery, et du lycée Charlemagne. Alimentée à l’origine par les eaux du canal de l’Ourcq, elle ne semble plus remplir sa fonction.





Impasse de la Poissonnerie - Paris 4
Métro Saint Paul ligne 1

La Fontaine de Jarente mais dite aussi de la Poissonnerie ou encore mentionnée comme fontaine de Necker sur un cliché signé Eugène Atget ou bien d’Ormesson est adossée au fond de l’impasse de la Poissonnerie, ancien cul-de-sac médiéval devenu minuscule voie sans issue. Les différents noms de cette insolite invitée empruntent aux rues du quartier créées sur des terrains offerts à la Couronne vers 1773 par une congrégation du Val des Ecoliers fondée en 1201 par quatre Maîtres en Théologie de l'Université de Paris. En 1214, des sergents d’armes de la garde du roi promettent d'édifier une église en hommage à Sainte Catherine d'Alexandrie s'ils remportent la victoire. Les dons de riches croyants et la protection de la famille royale permettent la création d'un nouveau prieuré au coeur du Marais, le prieuré de Saint-Catherine-du-Val-des-Ecoliers. En 1767, le couvent tombe en ruines et le noviciat est transféré dans la maison des Jésuites, dont l'ordre vient d'être supprimé. L'église est démolie et les terrains réaménagés. Louis-François-Alexandre de Sénas d'Orgeval de Jarente (1746-1810), coadjuteur de l'évêché d'Orléans et prieur commendataire du prieuré royal de la Couture-Sainte-Catherine, qui décide de faire don des terrains, participe par cette décision à la profonde rénovation du plan du quartier.





60 rue Mouffetard / 1 rue du Pot-de-Fer- Paris 5
Métro Place Monge ligne 5

La Fontaine du Pot-de-Fer, dite aussi fontaine du faubourg Saint-Marcel ou improprement fontaine Mouffetard, date de 1671. Cet ouvrage monumental est attribué à Michel Noblet (1605-1677), architecte ordinaire du roi, marié à la fille de Michel Villedo, et garde des fontaines de la Ville de 1657 à 1681. Il crache, parfois, un mince filet d’eau par un tuyau rustique. Son élégant dessin a longtemps et faussement fait penser à une oeuvre de Louis Le Vau. En 1624, une première construction à l’angle de la rue Mouffetard et de la rue du Pot-de-Fer remplace un puits médiéval. Ce dernier porte déjà le nom de la voie baptisée en hommage aux chaudrons fumants des cuisines du quartier. Mouffetard est fameux pour ses nombreuses tavernes dès les Moyen-Âge. La fontaine est alors l’un des rares point d’eau du bourg de Saint-Médard puis du quartier Saint-Marceau, annexé à la Ville de Paris en 1730. Alimentée par l’aqueduc Médicis ou aqueduc d’Arcueil ou encore aqueduc des eaux de Rungis, elle devient tout à fait stratégique. En 1671, remise en valeur, elle est habillée d’une nouvelle construction en pierre de taille. Propriété de la Ville de Paris, la fontaine du Pot-de-Fer a été inscrite aux Monuments historique par arrêté du 27 février 1925. Le site est lui-même inscrit le 6 août 1975 pour son caractère historique et pittoresque.





Angle rues Cuvier et Linné - Paris 5
Métro Place Monge ligne 7

La Fontaine Cuvier, monumentale a été érigée entre 1840 et 1846 en hommage à Georges Cuvier (1769-1832), naturaliste, professeur d’anatomie comparée au Muséum d’histoire naturelle, père fondateur de la paléontologie. Et un sale type. Il fait partie des scientifiques qui ont soutenu les théories anatomistes racistes développées à cette époque. Fasciné par le cas de Saartjie Baartman, la Vénus Hottentote, esclave sud-africaine montrée dans des zoos humains à travers toute l’Europe, Cuvier a joué un rôle sordide lors du décès de celle-ci. Autopsie, moulages, prélèvement d’organes, reconstitution de son squelette dans le but de l’exposer, la dépouille de cette malheureuse, devenue pièce des collections du Muséum d’histoire naturelle, ne sera rendue à l’Afrique du Sud afin d’être décemment inhumée qu’en 2002. Ambitieux opportuniste politique, Cuvier a ralenti, du fait de sa mainmise sur le système universitaire, la diffusion en France des théories transformistes qui mèneront à la théorie de l’évolution.





Place Saint Michel - Paris 6
Métro Saint Michel ligne 4

La fontaine Saint Michel, point de ralliement animé du Quartier Latin, entretient le souvenir des manifestations étudiantes de mai 1968 et celui des affrontements pour la Libération de Paris en août 1944. Son style, fruit de l’éclectisme caractéristique du Second Empire, emprunte à la Renaissance italienne. La structure, niche centrale encadrée de quatre colonnes et surmontée d'un fronton, s’inspire de celle de la fontaine Médicis. La réalisation monumentale occupe l’entièreté d’un mur pignon, jonction en angle aigu du boulevard Saint Michel et de la rue Danton. Son format, vingt-six mètres de haut et quinze de large, a été imposé par le désir esthétique de masquer ce pan aveugle. La réalisation de la fontaine décorative intervient, à la suite du bouleversement urbain engendré par les grands travaux du préfet Haussmann. L’aménagement de la nouvelle place Saint Michel est confié à l’architecte Gabriel Davioud (1824-1881), au service des Plans de la Ville de Paris depuis 1843. Concepteur de l’ensemble, il intègre parfaitement la fontaine dans son environnement. Lors de son inauguration officielle, le 15 août 1860, l’esthétique de la fontaine Saint Michel fait l’objet de critiques variées. Des interventions mineures concernant son aspect permettront certains ajustements. Elle est inscrite à l’inventaire des Monuments historiques par arrêté du 16 mars 1926.





42 rue de Sèvres - Paris 7
Métro Vaneau ligne 10

La fontaine dite du Fellah, au 42 rue de Sèvres, est l’un des quinze points d’eau créés à la suite du décret impérial de Saint Cloud en 1806. Inscrits aux Monuments historiques, au titre d’éléments préservés de l’hôpital Laennec, par arrêté du 25 juillet 1977, mur et édicules ont été intégrés en 2012 à un ensemble immobilier édifié sur l’emplacement libéré par la démolition d’anciens bâtiments attenants. Ces extensions du XIXème et du XXème siècle de l’hospice des Incurables, fondé par le cardinal de la Rochefoucauld et Marguerite Rouillé, construit par l’architecte Christophe Gamard de 1653 à 1640, n’avaient guère d’intérêt patrimonial. La fontaine du Fellah répond au style dit retour d’Egypte, en vogue à la suite de la campagne menée entre 1798 et 1801 par celui qui n’était alors que le général Napoléon Bonaparte. Son arche aux piédroits inclinés, haut de 2,8 mètres, évoque l’entrée d’un temple égyptien, au fronton duquel l’aigle éployé rend hommage à l’Empereur. La fontaine du Fellah, bâtie en applique sur les plans de l’ingénieur François-Jean Bralle (1750-1831) également auteur de la fontaine de Mars a pour vocation d’alimenter un quartier qui manque de points d’eau publics.





61 rue du Faubourg Saint Antoine / 1 rue de Charonne - Paris 12
Métro Ledru Rollin ligne 8

La fontaine Trogneux ou de Charonne a été construite en application de lettres patentes datant de 1719. Cette ordonnance royale envisage alors la création d’un ensemble de cinq fontaines à l’est de Paris, réparties à travers tout le Faubourg Saint Antoine alors dépourvu de points d’eau. Dans le quartier des artisans du meuble où ébénistes, menuisiers, ferronniers se sont établis grâce aux franchises obtenues par l’abbaye de Saint Antoine leurs permettant de travailler en dehors des corporations, l’usage est de s’approvisionner auprès des porteurs d’eau. Maître général triennal contrôleur et inspecteur des bâtiments de la Ville de Paris pour Louis XIV et Louis XV, Jean Beausire (1651-1743) est chargé du projet. Entre 1682 et jusqu’à sa mort à l’âge de 92 ans, il mène à bien un vaste programme de réalisation et de gestion des fontaines parisiennes. Erigée entre 1719 et 1724, la fontaine de Charonne est dite fontaine Trogneux, en hommage à l’un des brasseurs du faubourg qui en finança une grande partie. A la suite d’une avarie, elle a été entièrement démontée entre 1806 et 1810, sous le Premier Empire, pour être remontée à l’identique. Alimentée à l’origine par la pompe Notre Dame puis par la pompe à feu de Chaillot, la fontaine Trogneux a été soigneusement restaurée en 1963 puis en 2008, bienfait auquel elle doit d’être encore en fonction et en eau à la belle saison. Elle a été classée au titre des Monuments historiques le 29 septembre 1995.





81 rue Armand Carrel - Paris 19
Métro Jaurès lignes 2, 5, 7bis

Fondé en 1957, le Conservatoire municipal Jacques Ibert, dispense des formations musicales, chorégraphiques et théâtrales. L’école s’installe au 81 rue Armand Carrel en 1987 et prend le nom du compositeur en 1988. Cette étonnante construction est le premier bâtiment réalisé en France par l’architecte Fernand Pouillon (1912-1986) à son retour de quinze années passées en Algérie. Exilé, il ne pouvait plus exercer en France à la suite du scandale de malversation du Comptoir National du Logement. Une façade latérale à pan coupé, à l’angle entre les rues Armand Carrel et Bouret, caractérise la silhouette singulière du Conservatoire. Dans une niche creusée en hémisphère s’élève une imposante fontaine sorte de pastiche néoclassique. L’eau s’écoule depuis le sommet de trois colonnes doriques cannelées enchâssées, de diamètres croissants et ruisselle dans un bassin pour rejaillir par une bouche ornée dans un second bassin et déborde jusque dans un troisième.



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.