Paris : Jardin des Tuileries, du jardin florentin de Catherine de Médicis au jardin à la française imaginé par André Le Nôtre, une promenade royale - Ier

 


Le Jardin des Tuileries entre le Louvre et la Concorde, la rue de Rivoli et les berges de Seine, s’inscrivent dans la célèbre perspective des Champs Elysées. Vaste de 25,5 hectares en incluant le jardin du Carrousel, cet espace vert public est classé aux Monuments historiques en 1914. En 1975, il relève de la protection des berges de Seine, site inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO. La création du jardin est intimement associée à celle du palais des Tuileries, initié au XVIème siècle par la reine Catherine de Médicis (1519-1589). Mais André Le Nôtre (1613-1700), créateur des jardins royaux de Versailles, Marly, Saint-Cloud et Saint-Germain, concepteur du jardin à la française, est le grand maître d’ouvrage de cette vaste promenade, prisées des Parisiens et des touristes du monde. Il a imaginé son élégante apparence, son tracé rectiligne à peine modifié par les grands travaux de modernisation menés dans les années 1990.







La présence attestée d’une fabrique de tuiles dès le XIIIème siècle perdure à travers la dénomination « Tuileries ». En 1519, François Ier fait l’acquisition d’un terrain où est établi une vieille maison, en dehors de l’enceinte défensive de Charles V. Il ne mène pas à bien son projet d’établir un palais royal. Le concept est repris en 1564 par Catherine de Médicis. Veuve en 1559, la reine quitte le domaine royal des Tournelles hanté par le souvenir de son époux Henri II. Elle souhaite faire bâtir une nouvelle résidence, le palais des Tuileries, doté d’un jardin florentin avec grotte et mur d’écho. Le premier architecte du roi, Philibert Delorme (vers 1514-1570) débute le chantier. Jean Bullant (1515-1578) prend sa succession en 1572 mais l’entreprise est suspendue en 1572. Selon la légende, l’astrologue Ruggieri aurait prédit à Catherine de Médicis qu’elle pourrait « près de Saint-Germain ». Le palais des Tuileries situé à proximité de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois, la reine choisit de faire construire dans l’urgence une autre demeure, l’hôtel de Soissons, achevé en 1574 à l’emplacement de l’actuelle Bourse de Commerce. De ce domaine, seule la Colonne Médicis nous est parvenue.

En 1578, Henri IV (1553-1610) confie l’achèvement du palais des Tuileries aux architectes du Louvre. Jacques II Androuet du Cerceau dirige de 1606 à 1610 la réalisation de nouvelles galeries reliant les deux palais. A la mort du roi, le palais des Tuileries connaît une longue période d’abandon. Le chantier reprend au XVIIème siècle à l’initiative de Louis XIV (1638-1715). En 1664, le souverain fait appel à André Le Nôtre. Grands axes perpendiculaires, ordonnancement symétrique, parterres de fleurs et de plantes taillés en motifs de broderie, le nouvel espace vert parisien répond à ce prototype particulier. L’intervention met en valeur le palais des Tuileries. André Le Nôtre trace les perspectives et les effets d’optique depuis la façade. 

La résidence royale de Louis-Philippe est incendiée au cours des évènements de la Commune en 1871. Les ruines alignées entre les pavillons de Marsan et de Flore, vestiges intactes intégrés au Louvre, sont rasées en 1882. La perspective s’ouvre alors sur la Cour Carrée. Le jardin a conservé à la façon de fabriques quelques-uns des éléments architecturaux sauvés des flammes, vestiges du Palais des Tuileries. De nos jours, le Jardin des Tuileries relève du domaine national du Louvre. 








Le Jardin des Tuileries revendique depuis le XVIIIème le statut de parc de sculptures, véritable musée en plein air. A partir de 1716, un certain nombre de statues à thématique mythologique, issues des anciens parcs royaux, rejoignent les collections des Tuileries. De nos jours, elles sont réunies côté place de la Concorde, autour du Grand bassin Octogonal. Le long des allées, au cœur des bosquets, le jardin dévoile des œuvres du XVIIème siècle au XXème siècle. Les créations de Coysevox, Carpeaux côtoient celles de Max Ernst, Alberto Giacometti, Maillol. 

L’« Eve » d’Auguste Rodin  dialogue avec « Le bel costumé » de Jean DubuffetLa « Reclining Figure » d’Henry Moore« The Welcoming hands » de Louise Bourgeois, « L’arbre des voyelles » de Giuseppe Penone sont à découvrir au fil de la promenade. Côté jardin du Carrousel des haies de buis taillées forment une sorte de labyrinthe où sont disposées en 1964 dix-huit statues d’Aristide Maillol (1861-1944) à l’initiative d’André Malraux (1901-1976), ministre de la Culture.

Les grilles monumentales de l’accès côté place de la Concorde sont encadrées de deux œuvres, « La Renommée » et de « Mercure » d’après les sculptures originales de Coysevox datant de 1702. A la belle saison une double allée d’orangers en caisse borde l’entrée qui ouvre sur le Grand Bassin Octogonal. Deux rampes disposées en Fer à Cheval permettent d’accéder aux terrasses en surélévation.









La galerie de l’Orangerie, édifiée à partir de 1853 par l’architecte Firmin Bourgeois et finalisée par Louis Visconti, sert à l’origine d’abri hivernal pour les orangers du jardin. L’espace trouve une nouvelle vocation à la fin du XIXème siècle. De 1890 à 1912, s’y tient l’Exposition annuelle des peintres et sculpteurs de chasse et de vénerie. Affectée en 1921 au sous-secrétariat d'État aux Beaux-arts, à l’instar du Jeu de Paume, son pendant nord, l’Orangerie devient lieu d’exposition des artistes vivants. Le peintre Claude Monet choisit l’Orangerie pour ses Nymphéas. Le projet soutenu par Georges Clemenceau permet au peintre de réaliser de grands panneaux peints destinés à cet espace précis, dont la donation à l’Etat est actée en 1922. Les Nymphéas sont inaugurés à l’Orangerie en 1927, six mois après le décès de l’artiste en présence de Clemenceau.  

A l’ouest du Jardin des Tuileries, côté rue de Rivoli, se trouve la Terrasse des Feuillants. Elle court du Jeu de Paume au Pavillon de Marsan. Quatre mûriers aux extrémités ont été plantés aux extrémités en hommage à Henri IV. Le souverain souhaitait encourager la production de soie à Paris, et avait pour cela fait construire la place des Vosges afin que filatures et manufactures  s’y installent. La Terrasse des Tuileries avait été entièrement plantée de mûriers blancs. Le Jeu de Paume édifié en 1861 abrite à l’origine des courts de l’ancêtre du tennis. Dès 1909, la galerie devient lieu d’exposition. De 1947 à 1986 date d’ouverture du Musée d’Orsay, elle accueille les collections impressionnistes nationales. En 1991, ouvre officiellement la Galerie du Jeu de Paume consacrée à l’art contemporain, et plus particulièrement à l’image et la photographie. 








De 1991 à 1996, l’Etat propriétaire du domaine entreprend de vastes travaux. Le Jardin des Tuileries entame sa mue sous la direction des paysagistes Louis Benech, Pascal Crivier, François Roubaud. Ils conservent les perspectives principales imaginées par Le Nôtre. Les deux grands bassins rythment l’allée centrale. Soixante-huit arbres anciens, marronniers et platanes, sont préservés, mille-trois-cents replantés dont huit-cent dans la partie boisée. Seize bosquets de marronniers en quinconce ponctuent désormais le Grand Couvert.

Les pelouses du Grand Carré, vaste de 7000m2, sont redessinées. Les parterres à la française font place à des rectangles de gazon ponctués de fleurs hautes et d’œuvres de sculpteurs du XXème siècle, Germaine Richier, Alberto Giacometti, Paul Belmondo. Les jardiniers renouvellent les 70 000 plants au printemps et à l’automne. Deux petits bassins ronds scandent les espaces entre les terrasses côté Louvre, exèdres datant de 1799 mis en eau. L’arrosage des parterres, 125 000 plantes, alimenté par le Canal de l’Ourcq, est informatisé. Aux deux restaurant historiques, s’ajoutent deux buvettes installées à l’occasion des travaux en 1993. Elles remplacent les kiosques japonisant du XIXème siècle.









Afin de créer la Terrasse des Tuileries, l’ancienne avenue Paul Doumer et les parterres situés devant l’arc de Triomphe du Carrousel sont surélevés. Création sur dalle, quatre tertres suspendus au-dessus des galeries souterraines, le Jardin du Carrousel est inauguré en 1996 à l’emplacement exact de la cour de l’ancien palais des Tuileries.

Accès : Place de la Concorde / Rue de Rivoli / Voie Georges Pompidou / Quai des Tuileries
Métro : Station Concorde lignes 1, 8, 12 / Station Tuileries ligne 1 / Station Palais Royal Musée du Louvre lignes 1, 7



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.

Bibliographie 
Le guide du patrimoine Paris - sous la direction de Jean-Marie Pérouse de Montclos - Editions Hachette
Le guide du promeneur 1è arrondissement - Philippe Godoÿ - Editions Parigramme