Paris : Entrées de métro Guimard, les iconiques bouches de métro Art Nouveau, édicules et entourages signés Hector Guimard

 


Entrées de métro emblématiques, les édicules et entourages Guimard ont acquis au fil du temps le statut d’icônes parisiennes. Les accès aux transports publics de la Ville de Paris sont l’oeuvre de l’architecte Hector Guimard (1867-1942). Structure de fonte, volutes de métal, marquise de verre, panneaux de lave émaillée, leur esthétique Art Nouveau que leur créateur qualifiait plutôt de « style Guimard », a conquis le monde entier grâce à un programme d’échange international, oeuvre d’art contre édicule. Ainsi leur silhouette caractéristique se retrouve-t-elle à Lisbonne, Mexico, Montréal, Moscou, New York, Chicago, Washington… Tandis que le métro parisien s’orne de créations plastiques telles que « La Voix Lactée » de l’artiste canadienne Geneviève Cadieux, « Azulejo géométrique », fresques colorées de l’artiste portugais Manuel Cargaleiro, « Ryaba la poule », vitrail du Russe Ivan Loubennikov... Les entrées de métro Guimard n'ont pourtant pas toujours fait l'unanimité. Leur esthétique a même suscité en son temps de vives controverses. Ces modèles d'accès adoptés en 1900 à l'occasion du lancement de la première ligne de métro seront abandonnés dès 1913 par la Compagnie du chemin de fer métropolitain de Paris, société en charge de l'exploitation.







Symbole de modernité, la première ligne de métro parisienne "Vincennes / Neuilly" est inaugurée en 1900 à l’occasion de l’Exposition Universelle. La CMP, la Compagnie du chemin de fer métropolitain de Paris créée en 1899 par le banquier André Bénard, obtient la concession. A cette entreprise de planifier et financer les aménagements extérieurs des stations. En avril 1899, dans un souci d’harmonie générale, le Conseil municipal de Paris définit la dimension et l’emplacement des accès de métro sur la voie publique. La CMP organise un concours auprès des jeunes architectes en août 1899. Le règlement du concours inclut une clause particulière : la CMP deviendra propriétaire des projets primés sans s’engager à les réaliser. L’idée est de réduire les coûts en confiant l’exécution à Paul Friesé, l’architecte maison, salarié de l’entreprise. Vingt-un dossiers sont déposés. La CMP présente successivement au Conseil de Paris les projets de Paul Friesé, puis de Jean Camille Formigé, architecte officiel très académique, adaptations libres des dossiers lauréats. Le Préfet de la Seine, Justin de Selves rejette les deux propositions fin décembre 1899.

Le 12 janvier 1900, Hector Guimard est finalement engagé par la CMP pour créer les habillages. Ses dessins sont validés le 7 février 1900 par la Commission du métropolitain, les plans approuvés le 16 février 1900 par le Préfet de la Seine. L'architecte imagine deux modèles d’édicule proposés en version fermée ou ouverte sur les côtés. Trois édicules modèle A à fond carré, fermés par des panneaux de lave émaillée, escalier protégé par un auvent, marquise en verre, toiture classique à double pente, sont construits. L’édicule de la station Abbesses est le dernier exemplaire du modèle A déplacé depuis la station Hôtel de Ville en 1972. Des sept édicules modèle B, surnommé la libellule, à fond arrondi fermé par des panneaux de lave émaillée toiture inversée à double pente, il ne demeure que celui de la Porte Dauphine. Elément reconstruit à l’occasion du centenaire du métro en 2000, l’édicule de la place Sainte Opportune station Châtelet s’inspire d’une variante disparue qui se trouvait à la Gare de Lyon. Hector Guimard dessine en plus trois vastes pavillons, désormais disparus, qui reprennent l’esthétique des édicules sous forme de véritables petites gares. Les deux pavillons appartenant à la station Etoile dont un réservé à un usage technique, seront détruits en 1926. Celui situé à Bastille rasé en 1962.








Au printemps 1900, malgré les nombreux détracteurs peu férus d’Art Nouveau, les édicules et les entourages Guimard rejoignent les rues parisiennes. La controverse publique ne parvient pas à faire oublier les avantages des modèles dessinés par Hector Guimard. Standardisés, fabriqués en série à moindre coût, les édicules et les entourages - structure de fonte, soubassement de pierre, toiture en verre selon les modèles - s’adaptent facilement à toutes les configurations d’accès. Le Modern Style passé de mode, la CMP abandonnera dès 1913 les entrées de métro Guimard.

En tout, cent-soixante-sept accès Guimard sont implantés : cents-quatre entourages à fond arrondi ou carré selon la topographie des lieux, ouverts sur un portique, côtés fermés par des balustrades à écussons, quarante-sept entourages à cartouches. Alors que les édicules recouverts d’une marquise protégeant les escaliers des intempéries devaient être le modèle le plus utilisé, les entourages ouverts sont généralisés et les édicules l’exception. 

Dès 1902, un différend financier oppose Hector Guimard et la CMP. L’architecte a engagé des frais pour la réalisation des modèles de fonte. La CMP estime qu’ils sont inclus dans les honoraires. Guimard demande à être remboursé. Un autre désaccord porte la propriété artistique. Le règlement à l’amiable tarde un peu. Une convention signée le 1er mai 1903 prévoit un dédommagement en échange de l’abandon des droits d’auteur.




Mâts Dervaux 1920

Candélabres Dervaux 1920

Candélabre Val d'Osne


Entre 1920 et 1960, la moitié des édicules et des entourages Guimard est démontée. Aujourd’hui, il n’en reste que quatre-vingt-huit présentes à travers la ville. Trois édicules avec marquise aux stations Porte Dauphine, Abbesses, Châtelet, soixante entourages aux candélabres, vingt-cinq entourages à cartouches. Protégés, quatre-vingt-six sont inscrits à l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques. De nombreuses entrées de stations, notamment Franklin-Roosevelt côté avenue Montaigne, ont été réaménagées dans un style Art Déco plus sobre, avec les lampadaires Dervaux conçu en 1920 par Adolphe Dervaux (1871-1945) et les candélabres Val d'Osne. 



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 

Bibliographie 
Le guide du patrimoine Paris - sous la direction de Jean-Marie Pérouse de Montclos - Hachette
Le guide du promeneur 16è arrondissement - Marie-Laure Crosnier Leconte - Parigramme

Sites référents