L’exposition "Alebrijes et Mexicraneos" célèbre à la Villette jusqu’au mois de mai la culture populaire du Mexique. Une vingtaine d’œuvres est présentée en libre accès au cœur du parc et le long du canal de l’Ourcq. Abondamment décorés, le bestiaire fantastique et les crânes monumentaux éclairent de leurs couleurs chamarrées la grisaille parisienne. Sous des apparences vaguement effrayantes de monstres de carnaval, les créatures dégagent une féérie un peu étrange à nos yeux européens, impression étayée à la tombée de la nuit par leur illumination. Ces figures hybrides et ces crânes humains appartiennent à l’iconographie traditionnelle de la fête d’El Dia de los Muertos, célébrée chaque année le 2 novembre. Terre syncrétique porteuse d’un double héritage aztèque et chrétien, le Mexique a développé un folklore où l’omniprésence de la mort, sa familiarité est source de créativité pour les artisans. "Alebrijes et Mexicraneos" incarnent la richesse et la diversité des cultures populaires mexicaines.
Bleu pétard, rose fluo, orange vitaminé, vert éclatant, motifs fleuris et géométriques, les crânes géants et les statues hautes de sept mètres sont la manifestation monumentale d’une tradition profondément ancrée dans leur pays natal. L’ensemble a été exposé pour la première fois à l’occasion du défilé de la Fête des Morts à Mexico en 2018, sur l’avenue Paseo de la Reforma puis en France lors de la 5ème édition thématique de lille3000, en 2019, dans les rues de la capitale des Flandres.
Les Alebrijes, statues d’animaux peints dans les couleurs vibrantes, ornées de motifs traditionnels, appartiennent à un imaginaire hybride mêlant créatures réelles et bêtes fantastiques. Ces drôles de bestioles ont été inventées en 1936 par un fabricant de pinatas, Pedro Linares Lopez qui les conçoit à l’origine en papier mâché monté sur des tiges métalliques. Manuel Jimenez, un artisan du village de San Antonio Arrazola, emprunte l’idée du bestiaire chimérique mais taille ces animaux dans du copal selon la tradition des figures sculptées dans le bois de la région de Oaxaca. Ce nouvel artisanat se développe pleinement à Arrazola ainsi qu’à San Martin Tilcajete, un village zapotèque historique.
Les crânes peints décorés appartiennent à une forme d’artisanat très répandu au Mexique. Ils décorent les autels dédiés aux défunts que chacun dresse chez soi à l’occasion de la fête d’El Dia de los Muertos. Révélant toute la créativité, la fantaisie et le savoir-faire des artisans mexicains, cette manifestation culturelle procède à la fois des cultes païens pré-hispaniques et des célébrations chrétiennes de la Toussaint. En 2003, l’ensemble des fêtes indigènes dédiées aux morts ont été classées au patrimoine immatériel de l’humanité par l’Unesco.
Dans le prolongement de ces traditions, les Mexicraneos ont été imaginés, il y a quatre ans, par l’entreprise de pompes funèbres Funeraria J. Garcia Lopez fondée en 1979 implantée à Mexico. Cette nouvelle activité participe, selon les fondateurs, au rayonnement de la culture mexicaine. Des crânes préalablement façonnés en différents formats sont confiés à des artistes émergents ou confirmés afin qu’ils les peignent. Mêlant folklore traditionnel et art contemporain, les sculptures monumentales sont destinées à être exposées tandis que les plus petites à la vente. Depuis leur lancement, les Mexicraneos sont devenus des objets de collection au Mexique. Les entrepreneurs ont donc décliné le concept en objets dérivés porte-clés, casquettes, gourdes, t-shirts, mugs, boutons de manchette. Leur projet à court terme est de créer un musée afin de présenter de façon pérenne l’ensemble des grands crânes.
Parmi les œuvres présentées à la Villette, se trouvent "Il court et s’en va en courant" par Izaskun, "Mexicolor" par Lao Gabrielli, "Jaguar Warrior" par Osmani Contreras, "Le jaguar et le bougainvillier" par Apartment 415, "Natura mexicaine" par Ivan Salamanca, "Xantolo" par Silvino Lopeztovar, "Le plus vieux de tous les alebrijes" par Atentamente una Fresa, "Cœur de Xolotl" par Larva Clothing.
Alebrijes & Mexicraneos
Jusqu’en mai 2020
Parc de la Villette
211 avenue Jean Jaurès - Paris 19
Tél : 01 40 03 75 75
Mexicraneos
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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