Spectacle : Haroun - Théâtre Le République - Jusqu'au 29 janvier 2019



Fasciné par le génie humain pour la déraison, dans son seul-en-scène, Haroun décrypte le monde tel qu’il est. Sourire en coin et verbe haut, ce trentenaire à la dégaine de garçon sage nous confronte à nos propres contradictions avec une fausse nonchalance et une bonne dose d’autodérision. Il épingle les petites lâchetés du quotidien, interroge la crédibilité des discours politiques, dénonce l’hypocrisie et les fausses indignations. Jamais dans le jugement, le message est travaillé, le texte ciselé. Acide et percutant, ce spectacle, à contre-courant de la vague nombriliste du stand-up français, ouvre la voie à une forme d’humour qui pousse à la réflexion. Mordant, sarcastique voire très pince-sans-rire, Haroun est à découvrir au théâtre Le République.





Enfance tranquille à Bures-sur-Yvette, Haroun se passionne pour le breakdance qu’à dix-sept ans il pratique 20 heures par semaine. Lorsqu’il intègre une école de commerce, il laisse de côté la danse mais suit un cours de théâtre et organise des tournois d’improvisation. A cette époque, il se met à l’écriture. Fraîchement diplômé, il se lance dans un tour du monde de neuf mois avant de s’installer à Toulouse où il devient consultant en formation pour la prise de parole en public. En 2015, il se laisse tenter par l’aventure des scènes ouvertes à Paris et fait une brève percée au Jamel Comedy Club suivi d’un passage éclair mouvementé comme chroniqueur chez Ardisson. Dans le cadre d’une émission présentée par Michel Drucker, les chutes de ses sketchs sont coupées au montage. Haroun décide de se débrouiller sans la télévision. Pendant la campagne présidentielle de 2017, il est remarqué en publiant sur Youtube de fausses interviews politiques détournement. 

Un seul en scène au théâtre, un autre, Internet etc accessible en intégralité ici avec participation au chapeau, Haroun est un acharné de boulot. Cadré, millimétré, sur scènes, il joue avec les silences, ponctue ses vannes de petits rires pincés décalés et parfois s’autorise des moments d’improvisation très réussis avec le public. Sa finesse d’analyse, l’acuité du regard qu’il porte sur la société est servi par un sens inné de la distanciation. Références en bandoulière, les Inconnus, les Nuls, Coluche, il revendique un goût particulier pour les anglais Ricky Gervais, Stewart Lee auquel il emprunte cette mise en perspective.




Par le biais de ses propres interrogations, Haroun s’empare avec finesse des sujets les plus sensibles, luttes sociales, terrorisme, religions, conflit israélo-palestinien, immigration, écologie. Il tourne en dérision les extrêmes quels qu’ils soient et n’hésite pas à avancer en terrain miné abordant avec la même décontraction maline, Daesh, les icônes modernes, Kim Kardashian, la montée en puissance des Gafa. A l’ère de tous les égocentrismes, Haroun pointe les ridicules de l’époque, s’amuse de l’absurdité des passions contemporaines, les selfies, les épanchements sur les réseaux sociaux ou les théories du complot. Refusant les étiquettes, il secoue les bonnes consciences, humour au vitriol porteur d’une réflexion plus vaste. Excellent !

Haroun
Jusqu’au 29 janvier 2019

Le République
23 place de la République - Paris 3
Tél : 01 47 70 97 96

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Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.