Paris : 67 rue de Turenne, ancien décor de boucherie, têtes de boeufs et crochets de fonte incongrus - IIIème



Au 67 rue de Turenne, le rez-de-chaussée d’un immeuble néo-classique datant du Premier Empire conserve un étonnant décor qui signale la présence d’une ancienne boucherie. Deux colonnes doriques et deux pilastres encastrés dans le mur ont trouvé naturellement leur place au fronton d’une boutique de prêt-à-porter. Mais plus marquantes encore, trois têtes de bœufs au-dessus d’un porche soutiennent un petit balcon. Demeurent également, vaguement menaçant, des éléments en fonte, anciens crochets de la boucherie auxquels étaient suspendues en devanture des carcasses. Une époque pas trop bégueule sur la barbaque.











La trace d’une activité de boucherie à cette adresse se retrouve dès le Premier Empire avec la mention de la Maison Schuler - signalée néanmoins au 45 de la rue de Turenne, un changement de numérotation probablement ou une coquille - dont la vitrine a été croquée dans Boutiques parisiennes du Premier Empire par Hector Lefuel.

Les témoignages les plus importants au sujet de ce labeur carnassier attestent de la présence d’une certaine Maison Dehors, boucher en gros et en détail au 67 rue de Turenne avant la Première Guerre Mondiale. Cette boucherie est mentionnée dans l’annuaire du commerce Didot-Bottin entre 1900 et 1907 mais disparaît en en 1909. De nombreuses photographies, notamment l’une signée Eugène Atget, témoignent d’une activité commerciale fleurissante. Prise à l’occasion du Concours général agricole de 1908, l'image qui orne une ancienne carte postale porte cette curieuse note, "Napoléon III coucha dans cette maison en 1848", 1848 étant l'année où Louis-Napoléon Bonaparte fut élu président de la République.









Sur les différents clichés, on distingue très nettement les deux pilastres, les deux colonnes doriques entre lesquels se déploient les terribles crochets mais le balcon du premier étage qui court sur toute la façade de l’immeuble est soutenu par six têtes de bœufs.

Vers 1930, la photographie signée Edouard Desprez révèle la disparition de la boucherie, remplacée par un magasin de meubles et une échoppe de jouets, ainsi que du balcon filant qui ne sera donc partiellement rétabli par les propriétaires que lors de rénovations plus récentes.

67 rue de Turenne - Paris 3
Immeuble au décor signalant une ancienne boucherie 



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 


Bibliographie
Le guide du promeneur 3è arrondissement - Isabelle Dérens - Parigramme
Dictionnaire historique des rues de Paris - Jacques Hillairet - Editions de Minuit
Histoire de l'architecture classique en France, Volume 5 - Louis Hautecœur - Editions A. et J. Picard et Cie, 1953
Almanach du commerce des départements de l’Empire français - J. de la Tynna - 1809
Boutiques parisiennes du Premier Empire - Hector Lefuel - Editions Albert Morancé 1925

Sites référents