Théâtre : L'Angoisse du roi Salomon, d'après Romain Gary - Avec Bruno Abraham-Kremer - Théâtre du Petit Saint Martin - Dernière le 28 avril



Vingt-cinq ans plus tard, Jean se souvient. En 1978, chauffeur de taxi, cet autodidacte en quête de sens cherche les réponses à ses interrogations existentielles dans le dictionnaire et passe son temps libre dans les bibliothèques. Lors d'une course, il fait la connaissance de Salomon Rubinstein, élégant vieux monsieur de 84 ans qui a fait fortune dans le prêt-à-porter. Le riche octogénaire consacre une partie de sa richesse à l'association SOS Bénévoles qui vient en aide aux personnes âgées isolées et démunies. Salomon prend Jean en amitié et lui propose de solder le crédit sur sa licence de taxi à condition que Jean accepte de rendre de menus services dans le cadre de l'association. L'étrange mécène de l'humanité l'envoie en mission auprès des bénéficiaires dans le besoin. Jean rencontre alors Cora Lamenaire, ancienne chanteuse réaliste d'avant-guerre dont la carrière s'est brusquement arrêtée à la Libération à cause de ses fréquentations allemandes durant l'Occupation. Mais ce qui lie Cora et Salomon est bien plus profond et douloureux que cette charité dispensée. Ils se connaissent depuis longtemps. Se sont aimés. Jean entreprend de réconcilier ces deux solitudes.  





Fine adaptation du roman de Romain Gary signé sous le pseudonyme d'Emile Ajar, cette partition délicieuse retissée pour la scène par Corine Juresco et Bruno Abraham-Kremer est irrésistible de tendresse et d'humour. Les spectateurs assistent chaque soir à la rencontre entre un comédien et les mots de l'écrivain. Tandis que semble revivre le Paris populaire des années 70, l'ironie légère de Gary, teintée de tendresse et de poésie, la gouaille de ses mots et sa malice s'incarne sur le plateau. La scénographie élégante imaginée par Jean Haas et la bande son signée Mehdi Ahoudig soulignent avec énergie une mise en scène précise, pleine de vie et de rythme.

Bruno Abraham-Kremer interprète à lui seul une galerie de personnages attachants, la libraire philosophe, la concierge, l'ami américain, la voyante, Jean le narrateur, titi parisien à la verve fleurie et bien sûr, Monsieur Salomon, qui se sent si seul qu'à 84 ans lit encore les annonces de la rubrique matrimoniale mais ne peut réprimer sa colère contre Dieu et contre les hommes pour leur indifférence à la détresse humaine. Drôle, poignant, son interprétation généreuse nous fait partager son plaisir de conteur, cette joie mélancolique qui teinte le texte.





Histoire d'amour, touchante et douloureuse, histoire d'amitié, de transmission, L'Angoisse du roi Salomon mêle les rires et les larmes pour nous parler de la vieillesse, de la peur de mourir, de la pitié et du pardon qui sauve le monde. Une pièce émouvante, un très beau moment.

L’Angoisse du roi Salomon 
D’après le roman de Romain Gary (Emile Ajar) 
Adaptation et mise en scène Bruno Abraham-Kremer et Corine Juresco
Avec Bruno Abraham-Kremer

Du mardi au vendredi à 20h30, samedi à 16h30 et 20h30
Dernière le samedi 28 avril 2018

Théâtre du Petit Saint-Martin
17 rue René-Boulanger - Paris 10
Tél : 01 42 08 00 32



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.