Expo : Diane et Actéon - Gérard Garouste - Musée de la Chasse et de la Nature - Jusqu'au 1er juillet 2018



Ce printemps à Paris, trois expositions Gérard Garouste se déroulent en même temps. La première aux Beaux-Arts se déploie autour des textes de Rabelais et de Dante, la deuxième à la galerie Templon dont je vous parle ici explore avec humour le thème du Talmud et la troisième au musée de la Chasse et de la Nature a pour point d'ancrage le mythe de Diane et Actéon. Peintre, graveur, sculpteur, Gérard Garouste qui fête cette année ses 72 ans, est familier des grands textes de référence aussi bien sacrés que profanes dans lesquels il trouve prétexte à développer ses thèmes de prédilection, à creuser ses obsessions personnelles. Son oeuvre figurative à l'expressivité tourmentée, trouble par sa fougue, séduit par sa précision. Il peut sembler paradoxal de découvrir Gérard Garouste, végétarien et défenseur de la cause animale en invité d'honneur au musée de la Chasse et de la Nature mais l'histoire de cette exposition est celle d'une rencontre entre le mythe gréco-romain et l'artiste. Le mythe de Diane et Actéon, motif cruel et sensuel extrait du récit des Métamorphoses d'Ovide Livre 3, 138-252, inspire les artistes depuis la Renaissance et Garouste y place un plaidoyer contre la maltraitance animale.







En 2017, le musée de la Chasse et de la Nature commande une oeuvre à Gérard Garouste sur le thème de Diane et Actéon, scène mythologique classique dont voici à peu près l'intrigue. Actéon, fils d'Aristée - lui-même fils de Cyrène et d'Apollon -  et élève de Chiron le centaure, est un jeune homme plein de morgue qui prétend parfois être meilleur chasseur que la déesse Diane.

Un jour de battue sur le mont Cithéron, en compagnie de ses camarades et de sa meute, il décide de s'arrêter pour se reposer. S'éloignant à travers les bois, il se sépare de ses amis. Actéon s'approche d'une source où il surprend Diane et ses nymphes en train de se baigner. Fasciné par la scène, plein de désir, il manifeste inopinément sa présence. La déesse courroucée éclabousse l'intrus et le change en cerf. Il est alors dévoré par ses propres chiens. 










Fasciné par cette histoire qu'il réinterprète de façon très personnelle, Gérard Garouste ne se contente pas d'un seul tableau mais réalise une multitude d'œuvres, études, dessins, toiles préliminaires des détails reflétant tous la même sensualité teintée de violence. Corps distendus, figures torturées, les audaces formelles affirment le jeu plastique d'une modernité assumée. L'artiste impose une vision contemporaine du mythe antique tandis que la palette chromatique vibrante l'omniprésence du bleu nuit le rouge profond du sang, le rose tendre des chairs rappelle les enluminures médiévales. La toile finale entre parfaitement en dialogue avec les collections du musée, lieu singulier, véritable cabinet de curiosités qui cultive son étrangeté. 

Le regard trouble, il se fait voyeur alors qu'éclôt le désir dans l'érotisme des courbes et que résonne la promesse d'une capture synonyme de mort. Les silhouettes prennent des accents autobiographiques sous le pinceau de Gérard Garouste. Le visage de la déesse évoque les traits de son épouse Elisabeth tandis qu'Actéon, symbole de l'être humain, de sa cruauté de chasseur est personnifié par l'artiste lui-même. 








Gérard Garouste aime ponctuer ses tableaux d'énigmes à résoudre. La charade néanmoins ne se laisse pas forcément déchiffrer car elle permet à la part d'inconscient de s'exprimer. Actéon devient une créature à deux têtes l'une humaine l'autre animale portant des bois. La colère de Diane trouve une cause différente qui vaudra à Actéon d'être émasculé avant d'être tué. Chez Gérard Garouste, les dieux sont au-delà du Bien et du Mal contrairement aux hommes.

Diane et Actéon - Gérard Garouste
Du 13 mars au 1er juillet 2018

62 rue des Archives - Paris 3
Horaires : du mardi au dimanche de 11h à 18h - Nocturne le mercredi jusqu'à 21h30
Fermé le lundi et les jours fériés, mais ouvert le mardi 8 et le jeudi 10 mai 2018.



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.