A la veille de sa disparition, elle a quarante-quatre ans, Billie Holiday se remémore son parcours chaotique, existence tragique marquée par la rage de vivre et les drames. L'artiste se raconte au fil des souvenirs, l'extrême misère de son enfance, élevée par une mère qui lui a donné naissance à treize ans, la prison à quinze ans pour prostitution, la violence de l'Amérique ségrégationniste, celles des hommes, les premières tournées, la drogue, l'alcool. Dans les coulisses des clubs newyorkais de Harlem, elle rencontre Lester Young le saxophoniste qui la surnomme Lady Day, Louis Armstrong son grand ami, Duke Ellington, Count Basie. Succès sur scène et conditions de vie épouvantables, le destin exceptionnel de la grande dame du blues de l'ombre à la lumière se déploie entre épreuves et résurrections.
Dans un spectacle musical qui alterne tableaux joués et dansés, Naïsiwon El Aniou rend un hommage saisissant à Billie Holiday. Seule en scène, elle trace un tableau sensible qui trouve sa source dans les paroles des chansons et les éléments puisés dans les différents ouvrages biographiques dédiés, notamment Lady Sings the Blues. Incarnant le destin d'une femme à fleur de peau, elle nous offre une évocation intimiste à travers laquelle transparaît le lien passionnel que la comédienne entretient avec la chanteuse.
Tandis que la voix mythique de Lady Day résonne sur scène dans des enregistrements originaux entretenant l'intensité d'une vibration particulière, Naïsiwon El Aniou mêle danse de cabaret, swing et claquettes, danse africaine dans une chorégraphie pour laquelle a puisé son inspiration dans le travail de l'américaine Katherine Dunham.
A travers, l'histoire du jazz et du blues, celle des Etats-Unis en fil rouge s'inscrit dans l'horreur de la ségrégation, des lynchages. "Trop blanche pour les clubs noirs, trop noire pour les orchestres blancs" ainsi que l'évoque Naïsiwon El Aniou, Billie trouve le succès sur scène alors que ses conditions de vie demeurent extrêmement difficiles. Sans jamais perdre sa capacité d'émerveillement, la grande dame du blues conduit des combats poignants, s'engage comme lorsqu'elle écrit le poème Strange Fruits, mis en musique par la suite pour devenir cette chanson que personnellement je ne peux pas écouter sans pleurer.
De prises de risque en actes militants, ce destin de luttes et d'audaces, d'infortunes et de vulnérabilité, trouve dans ce spectacle la qualité d'émotion des rencontres intimes, touchant à l'âme de la musique. Cette évocation puissante d'une vie cabossée vibre, flamboyante et précieuse. Un très beau moment.
Billie Holiday, Sunny Side
Texte et mise en scène Naïsiwon El Aniou
Avec Naïsiwon El Aniou
Du 12 avril 2018 au 05 mai 2018
A 21h30 les jeudis, vendredis et samedis
Essaïon
6 rue Pierre au lard - Paris 4
Tél : 01 42 78 46 42
www.essaion-theatre.com
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Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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