Paris : Rue Saint Rustique, plus ancienne rue du village de Montmartre, première voie officialisée piétonne de Paris en 1973 - XVIIIème

 

La rue Saint Rustique, pittoresque venelle, est la plus ancienne voie du village de Montmartre mentionnée dès le XIème siècle et première rue officiellement piétonnisée en 1973. Sa perspective unique sur la basilique du Sacré-Cœur, ses maisons de village, sa discrétion ont inspiré de nombreux artistes, notamment Maurice Utrillo en 1926. Ruelle pavée sans trottoir, traversée par un ruisseau axial caractéristique, elle court sur une longueur 110 mètres, étroite de 2,60 mètres. À son entrée côté rue des Saules, deux établissements historiques Le Consulat et la Bonne Franquette accueillent les visiteurs.







À l'origine, la rue Saint Rustique est un modeste sentier de terre tracé au XIème siècle. Il marque avec la rue des Rosiers, future rue du Chevalier de la Barre, et la rue du Mont-Cenis la limite entre le domaine de l'abbaye de Montmartre, congrégation de bénédictines fondée par le roi Louis VI en 1133-1134, et la seigneurie de Clignancourt. Au XVIème siècle, les premières maisons villageoises voient le jour au Nord du chemin Notre Dame officialisé en 1516, qui s'étoffe pour être mentionné sur le plan du Jouvin de Rochefort en 1672. 

La venelle intègre en 1863 la voierie parisienne à la suite de l'annexion de la commune de Montmartre au territoire de la ville de Paris en 1860. La dénomination actuelle, rue Saint Rustique, par arrêtée du 26 février 1867, s'inspire de la légende montmartroise. Elle rend hommage à saint Rustique, compagnon de martyr de saint Denis et du diacre Éleuthère, décapités sur les pentes du "Mons Martyrum" au IIIème siècle par les Romains. 

Sous le Second Empire, les grands travaux de modernisation de la ville menés par le préfet de la Seine le baron Georges Eugène Haussmann (1809-1891) atteignent les abords de la Butte Montmartre. Un décret du 11 août 1867 envisage d'élargir la rue Saint Rustique jusqu'à 12 mètres et de modifier son tracé.

Plus tard, le projet de percement de l'avenue Junot modifie profondément la physionomie du village de Montmartre. Le chantier débuté en 1893 taille à travers l'ancien maquis et menace une partie de la rue Norvins - dénomination adoptée en 1868 - ancienne rue Traînée, ainsi que la rue Saint Rustique. Les ruelles caractéristiques au coeur du village sont sauvées par l'intervention de la Société d'histoire et d'archéologie du Vieux Montmartre fondée en 1866.







Derrière les murs aveugles, se cachent les jardins des établissements iconiques de la rue Norvins et de la place du Tertre, la Mère Catherine, le Vieux Chalet ainsi que l'entrée des artistes du cabaret Chez Ma Cousine. 

À l'angle de la rue des Saules, le restaurant Le Consulat fait face à une autre institution, La Bonne Franquette. Cette ancienne bâtisse, reconstruite après l'incendie qui ravage le village de Montmartre en 1559, entretient la mémoire de la bohème au XIXème siècle. La guinguette "Les billards en bois", d'après un jeu de palets prisé, est fréquentée par les impressionnistes et les artistes du quartier, Sisley, Pissarro, Toulouse-Lautrec, Renoir, Monet. Van Gogh peint dans son jardin le tableau "La guinguette à Montmartre" (1886). Tour à tour Le Franc Buveur, L'Ange, Le Ranch puis elle devient La Bonne Franquette. Dans les années 1950, Charles Aznavour réside dans un modeste appartement au-dessus de la brasserie. 

Au 12 rue Saint Rustique, la Maison du Sacré-Coeur, institution associative et lieu de vie, accueille des enfants et les adolescents confiés par les services de l'Aide sociale à l'enfance. 

Immortalisée au cinéma, la rue Saint Rustique figure dans "Funny face" ou "Drôle de frimousse" en 1957 - Audrey Hepburn y chante "Bonjour Paris" - ou encore dans "La traversée de Paris" en 1956. 

Rue Saint Rustique
2 rue des Saules / 5 rue du Mont-Cenis - Paris 18
Métro Lamarck-Caulaincourt ligne 12 / Abbesses ligne 12



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 

Bibliographie
Le guide du promeneur 18è - Danielle Chadych et Dominique Leborgne - Éditions Parigramme
Connaissance du Vieux Paris - Jacques Hillairet - Rivages