Journaliste, chroniqueuse spécialiste des questions de sexualité, Maïa Mazaurette signe un essai en deux volets, "Sorti du trou" et "Lever la tête", réflexion sociologique et précis de sexualité alternative. À l'origine de cet essai, un constat : les organes génitaux féminins sont représentés sur les planches anatomiques comme des corps caverneux ouverts en permanence. Ce qui ne correspond pas à la réalité. Et cette distorsion n'est pas anodine. Le sexe des femmes n'est pas un vide à combler. La sexualité au féminin ne relève pas de l'envahissement passif. L'autrice dénonce cette vision idéologique, fruit d'une perception faussée et d'une conception normative des rôles établis qui fait écho avec la place des femmes dans la société. Il est question d'enjeux de pouvoir, de domination masculine, de bousculer les fondements de la société patriarcale. Automissionnée pour "défendre l'intégrité du corps féminin", Maïa Mazaurette aborde ici la question du corps réel et la possible invention d'une sexualité étique, positive, empreinte de fantaisie.
Maïa Mazaurette constate que la révolution sexuelle des années 1960 n'a été qu'une révolution reproductive avec la libéralisation de la contraception, de l'avortement. Aujourd'hui, une nouvelle étape s'annonce dans le cadre des évolutions sociétales, des mouvements tels que Me too. Il s'agit de réinventer les relations de couple, la sexualité en se détachant des stéréotypes.
La civilisation judéo-chrétienne stigmatise la sexualité et en particulier le plaisir féminin. Laisser les femmes dans l'ignorance limite les rapports à la fonction reproductive de la sexualité. Culture de la domination masculine, dimension sociologique, la science, développée par les hommes dans une société patriarcale, relaie les mêmes préjugés. La psychanalyse et les préceptes freudiens d'une sexualité féminine relevant uniquement de la pénétration ont privé les femmes de paroles. Le corps médical nie le ressenti des patientes, l'expérience intime de leur corps, véritable déni des violences infligées.
L'absence d'éducation sexuelle, hormis de rares interventions au lycée, laisse à la pornographie et sa perception délétère de la sexualité un rôle d'initiation, d'apprentissage. La diffusion des stéréotypes proposés par ce genre de matériel entretient les comportements toxiques au quotidien, banalisation du harcèlement, de la violence. L'espace public est devenu le lieu des dangers, là où chacune risque l''agression, les interactions non désirées.
À rebours des mentalités rétrogrades, les nouvelles moeurs du XXIème siècle remettent en question les idées préconçues sur le plaisir féminin et masculin, envisagent la réinvention des rapports de couple, suggère de repenser le genre, de déconstruire la monogamie avec le polyamour, de renouveler les pratiques.
Sortir du trou / Lever la tête - Maïa Mazaurette - Éditions Anne Carrière - Poche Le Livre de Poche
Enregistrer un commentaire