Ailleurs : Cathédrale Saint Pierre de Genève, témoin des grandes évolutions spirituelles et politiques de la Suisse

 


La cathédrale Saint Pierre de Genève, temple protestant depuis 1535 et l'avènement de la Réforme, est dédiée à saint Pierre, dont elle devait abriter les reliques confiées par le pape Symmaque (vers 440-498) au VIème siècle. Le site a été durant près de mille ans, un lieu de culte catholique romain. Reconstruite dans un style roman gothique entre le XIIème et le XVème siècles, en remplacement d'un ensemble épiscopal développé entre le IIIème et le Vème siècles, elle a subi de nombreuses modifications au fil des siècles, des reconstructions et des affectations. Devenue cathédrale protestante en 1535, elle perd à cette occasion la plupart de ses décors peints et ornements polychromes. Un portail néoclassique remplace la façade gothique originelle menacée d'effondrement au XVIIIème siècle.

La cathédrale Saint Pierre comporte le plus grand ensemble de chapiteaux romans et gothiques, environ trois-cents. Elle dispose de vitraux remarquables du XIXème siècle, copies exactes des vitraux de la Renaissance conservés au Musée d'art et d'histoire de Genève. Outre la chaise de Calvin, les stalles polychromes, trois orgues parmi lesquels le Grand Orgue Metzter à traction pneumatique conçu en 1907, il s'y trouve le mausolée du duc de Rohan, chef de file des Huguenots sous Henri IV. La remarquable chapelle des Macchabées, construite sur le flanc Sud au début du XVème siècle, a retrouvé ses décors polychromes au XIXème siècle. Du haut de la tour accessible par un escalier de cent-cinquante-sept marches, les visiteurs peuvent découvrir un panorama exceptionnel sur toute la ville. Le site archéologique fouillé depuis les années 1970 témoigne de la riche histoire urbanistique de Genève. La cathédrale Saint Pierre est inscrite sur la liste d'honneur du patrimoine européen en juillet 2009.








Au début du IIIème siècle, Genève est choisie comme siège épiscopal. Entre 350 et 375, la première cathédrale Nord est édifiée suivie d'une seconde cathédrale Sud à partir de 390.  Elles sont comprises dans un ensemble comprenant outre les églises, un baptistère, des bâtiments de l'administration épiscopale et des habitations. Le groupe cathédrale originel est placé sous l'autorité de l'évêque. 

Du IXème au Xème siècle, l'expansion progressive de l'ensemble opère une symbiose des bâtiments, notamment des cathédrales Nord et Sud. L'an mille est marqué par la construction d'une troisième cathédrale au-dessus des baptistères. En 1032, Genève passe sous contrôle du Saint Empire romain germanique. Au cours du XIème siècle, la création d'une crypte derrière le chevet qui permet la formation d'un second choeur indépendant. Le nouveau choeur édifié au tournant du XIIème siècle unifie l'ensemble. 

En 1160, le premier prince-évêque de Genève, Arducius de Faucigny (1135-1185) initie la construction de l'actuelle cathédrale Saint Pierre. Le choeur est livré à la fin du XIIème, début du XIIIème siècle. En 1232, les travaux suspendus à la suite d'un différend entre l'évêque Aymon de Grandson et un dignitaire ecclésiastique, l'édifice se trouve en péril. L'archevêque de Vienne intervient en 1234 pour relancer le chantier et établir la Confrérie de l'oeuvre de Saint Pierre. La cathédrale est achevée au milieu du XIIIème siècle, hormis les voûtes de la nef et les tours, finalisées à la fin du siècle. 








La cathédrale Saint Pierre de Genève, coeur de la vie spirituelle et politique, se trouve au centre des conflits seigneuriaux locaux. Elle devient une citadelle entre 1289 et 1300. Le culte suspendu un temps, l'édifice est endommagé par des tirs de catapultes lancés depuis le Bourg-de-Four puis des incendies successifs au cours du XIVème siècle. La chapelle des Macchabées, édifiée dans un style gothique flamboyant, voit le jour à l'initiative du cardinal de Brogny entre 1405-1406. L'année suivante, la cloche La Clémence prend place dans le clocher. Un incident sismique détruit en partie l'ouvrage en 1441. Les dommages importants nécessitent une reconstruction de nombreux éléments, le choeur et la croisée du transept en 1444, puis en 1446 le vaisseau central. 

En 1535, les partisans de la Réforme protestante prennent le pouvoir à Genève. La cathédrale Saint Pierre jusqu'à présent dévolue au culte catholique romain devient temple protestant. S'ouvre une nouvelle ère d'austérité. Les intérieurs sont dépouillés de leurs ornements. Décors peints polychromes du Moyen-Âge, scènes historiées sont badigeonnés, le mobilier, les autels, les ustensiles liturgiques en grande partie détruits. Vitraux et stalles échappent à cette purge pour des raisons budgétaires. En août 1585, la messe catholique romaine est interdite à Genève. 








Au milieu du XVIIIème siècle, la partie occidentale de l'église menaçant de s'écrouler, l'architecte romain Benedetto Alfieri (1699-1767) intervient. De 1751 à 1756, il remplace la façade gothique par l'actuelle de style néo-classique. À la fin du XVIIIème siècle, les troubles liés aux révolutions de Genève impactent la vocation du bâtiment. Le culte est suspendu jusqu'en 1798. La cathédrale devient un temps comme dépôt de munitions. En 1794, elle accueille un tribunal révolutionnaire.

Au XIXème siècle, des fouilles archéologiques et diverses campagnes de restauration font évoluer la cathédrale Saint Pierre. La tour Nord est reconstruite en 1895 et la flèche créée à cette occasion. En 1907, la cathédrale Saint Pierre devient officiellement la propriété de l'Église nationale protestante de Genève, titre de propriété toujours contesté par certains catholiques. Une restauration d'envergure débute en 1973 suivie en 1976 de fouilles archéologiques systématiques, qui s'attachent à l'étude de la chapelle des Macchabées, de la cathédrale elle-même et des alentours appartenant à l'ancien ensemble épiscopal.

Cathédrale Saint Pierre de Genève
Cour de Saint-Pierre - 1204 Genève - Suisse
Horaires : Lundi au vendredi de 9h30 à 18h30 - Samedi de 9h30 à 17h - Dimanche de 12h à 18h30



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.