Vincent Munier, photographe animalier, entraîne Sylvain Tesson dans une expédition sur les hauts plateaux du Changtang au Tibet, à la recherche de la panthère des neiges. L’écrivain voyageur embarque aux côtés du chasseur d’images et sa compagne Marie Amiguet documentariste ainsi que leur assistant Léo-Pol Jacquot. Ils cheminent dans une nature sauvage inhospitalière de campements en refuges, jusqu’au sanctuaire difficilement accessible où se trouve l’animal légendaire, que Sylvain Tesson pensait disparu. Par cinq-mille mètres d’altitude, souvent moins 30°c, ils suivent la piste de cette créature farouche, en sursis, dont il ne reste que cinq-mille individus entre la Mongolie et le Tibet. Chèvres bleues, antilopes du Tibet, ânes sauvages, chats de Pallas, yacks, loups solitaires, à force de patience, d’attente à l’affût, ils croisent une faune variée, adaptée à un environnement difficile. Manifestations d’une riche vie animale. Présence qui refuse de se montrer, l’insaisissable panthère se fait attendre. L’expédition nourrit le fol espoir d’apercevoir celle qui demeure invisible.
Epopée de la patience, art de l’affût, éloge de la patience, du silence, « La panthère des neiges » retranscrit en mots la beauté du monde à travers la quête d’un félin allégorique. Sylvain Tesson capture la poésie d’une nature intacte, soumet son impétuosité à la quiétude de l’attente. Celle d’une apparition quasi mystique. L’auteur qui a parcouru la planète relate ses expériences sensibles par le biais de récits nomades ponctués d’aphorismes, volupté des mots, style élégant pas dénué d’humour.
« La panthère des neiges », prix Renaudot 2019, livre suivi d’un ouvrage de photographies de Vincent Munier puis d’un documentaire de Marie Amiguet, sorti en 2021, raconte un périple en Asie, à travers les montages et les plaines du Tibet sur la piste du félin. Au gré des étapes, Sylvain Tesson fait l’apprentissage d’une certaine sérénité, prend goût à l’immobilité. La contemplation sans prédation change sa perception du monde. Attendre que la panthère se manifeste sur son propre territoire, laisse le temps à l’esprit de vagabonder. Conte ancré dans la vérité de la terre, de la faune, de la flore, le récit invite à prendre le temps de la révélation, de l’apparition. Il propose un rapport alternatif au réel.
Sylvain Tesson livre ses réflexions sur l’absurdité de nos vies contemporaines, s’interroge sur l’équilibre à retrouver, revendique un désenchantement certain avec beaucoup d’autodérision. Anti-moderne, il déplore nos modes d’existence, la perte de contact de l’être humain avec la nature, sa splendeur, ses rigueurs, la déconnexion avec une réalité animale essentielle, originelle. L’auteur nourrit des préoccupations écologiques, interroge la fin du monde sauvage, l’extinction de masse et le mouvement de dévastation radicale engendré par le monde des Hommes. Quête spirituelle, ode à la beauté, ouvrage admirable.
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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