Cinéma : Chronique d’une liaison passagère, de Emmanuel Mouret - Avec Sandrine Kiberlain, Vincent Macaigne


Au cours d’une soirée, Charlotte, mère célibataire, prof de lettres, fait la connaissance de Simon, gynécologue, marié. Ils se revoient dans un bar. Elle l’entraîne chez elle. Il n’a pas l’habitude. Il tente faiblement de se défendre. Séduit, il se laisse emporter dans cette aventure qu’ils se promettent sans passion, sans engagement. L’étonnement de la rencontre, la gêne délicieuse des premiers moments. Ils se retrouvent dans des galeries, des librairies, au Palais de Tokyo. Un ami leur prête sa garçonnière. Et bientôt l’intrusion des sentiments au fil de la complicité naissante. 






Marivaudage contemporain signé Emmanuel Mouret, « Chronique d’une liaison passagère » sonde les désordres amoureux au son de « La javanaise » chantée par Juliette Gréco, écrite par Serge Gainsbourg. Le réalisateur capture l’aventure de la rencontre, les instants où chacun s’ouvre à l’autre pour découvrir un univers inconnu. La relation épisodique originelle, initiée sur l’accord tacite de ne pas s’engager, se fait fugue. Les élans impromptus du cœur déploient leurs mystères. Emmanuel Mouret filme les douze semaines d’un adultère à travers les rencontres successives des deux protagonistes. La narration marquée par les ellipses, décomposée en instantanés hors sol, convoque le temps suspendu de la clandestinité, celui de la bulle amoureuse à l’écart des autres. Le flou du monde en arrière-plan bientôt se mue en vertige du quotidien.   

Cette comédie romantique emprunte à l’expérience rohmérienne dans la finesse et l’abondance des dialogues. L’homme tranquille, un peu ennuyeux et la femme libre, franche, véritable bourrasque d’air frais trouve un équilibre précaire dans une fausse légèreté. Il se pose des questions, précautionneux, elle apprécie l’instant présent, rieuse. Sandrine Kiberlain et Vincent Macaigne forme un couple de comédie délicieux, contraste entre les deux personnages, la cinquantaine rayonnante. La vivacité de l’une, solaire et décomplexée, la maladresse de l’autre un peu en retrait, sa mauvaise conscience d’homme marié. Ils incarnent avec sensibilité l’évidente complicité de cette balade sentimentale. 




Emmanuel Mouret donne à voir le romanesque de cette relation éphémère, l’insouciance arrachée à l’époque, les jeux de l’amour et du hasard. Il filme le badinage, le déni, la profondeur du sentiment, la cruauté aussi, la tristesse finalement.

Chronique d’une liaison passagère, de Emmanuel Mouret
Avec Sandrine Kiberlain, Vincent Macaigne, Georgia Scalliet
Sortie le 14 septembre 2022



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.