Paris : Mosaïque Georges Brassens, Station Porte des Lilas, quais de la Ligne 11, une histoire familiale de passion et d'artisanat d'art - XXème


La station Porte des Lilas bien que défraîchie réserve quelques jolies surprises. Son accès principal ouvre toujours sur l’édicule à casquette en béton armé et ciment de Grenoble réalisé par l’architecte Charles Plumet (1861-1928) d’origine qui date de l’inauguration en 1921. Sur la ligne 11, le quai direction Châtelet disposé en ilot est encadré par deux voies, dont l’une sert de voie de garage. Trois fresques en mosaïque aux couleurs un peu passées, au dessin délicieusement suranné, viennent éclairer le marasme d’un ensemble promis à une très prochaine rénovation. Deux d’entre elles représentent des lilas en fleur, l’un rose et l’autre bleu tandis que la troisième rend hommage à Georges Brassens, portrait souriant pipe à la bouche. Elles font référence à la chanson « Les Lilas » du barde moustachu qui figure sur l’album de 1957 « Je me suis fait tout petit ». Dans un cadre de faïence jaune orangé, entourage qui était à l’origine destiné aux espaces publicitaires, le portait du poète en mosaïque de grès émaillé se déploie sur seize mètres carrés. Cet ensemble décoratif a été réalisé à la fin des années 1980 en famille par des artistes mosaïstes de renom, Pepsy et Michel L’Huillier et leur fille Mathilde L’Huillier. 







Créateurs depuis 1967, Pepsy et Michel L’Huillier se sont illustrés comme spécialistes du décor d’architecture, arts du feu, céramique, verre, mosaïque. Histoire de famille, d’artisans d’art indépendants, ils ont transmis à leur fille Mathilde, un univers, un certain vocabulaire plastique. Ensemble, ils ont réalisé l’une des cheminées-tour de la Défense, une fresque de 950m2, la plus grande mosaïque européenne d’après un modèle de l’artiste Guy-Rachel Grataloup. Ils sont également les auteurs d’une prestigieuse fresque historique de 250m2 en grès cérame à Marmande, de la rose des vents du métro de New York et du décor de la station de métro Bellefontaine à Toulouse.

L’atelier familial Céram’Archi fondé en 1984 s’est spécialisé dans les décors d’architecture et plus particulièrement la mosaïque contemporaine en linéaire sans coupe, les cérames, les pâtes de verre et les émaux industriels. Leur réputation dépassant les frontières, le monde entier a fait appel à leurs talents, en France bien sûr mais également au Moyen-Orient, au Maroc, en Espagne, à New York, à Alger, à Munich.  Mathilde L’Huillier a reçu cette passion en héritage. Ses parents céramistes d’art lui ont transmis le goût d’un savoir-faire ancestral, la patience et l’audace, la précision et l’exigence. La mosaïque raconte le rapport à la matière, à la lumière et aux couleurs.  








Née à Mouzens en Dordogne, Mathilde L’Huillier a suivi durant deux années les cours aux Beaux-Arts de Bordeaux avant de se concentrer sur son propre projet. Intéressée par les matières industrielles détournées pour les arts décoratifs, elle a choisi d’explorer les possibilités des grès cérame et grès émaillé ainsi que de la pâte de verre. A partir de 1988, elle trace sa propre voie et réalise des mosaïques destinées à des bâtiments. Pour ce faire, elle embrasse pleinement l’évolution des pratiques et de la technologie. L’infographie sera son outil de base durant près de dix-huit ans. 

Mathilde L’Huillier créée des images au sein d’un bureau d’études. Elle développe les graphies, achète les matériaux, intervient durant la réalisation des fresques pour des correction. Durant cette période, elle acquiert une expérience particulière pour les portraits en grès cérame. Peu à peu de la conception pure, Mathilde L’Huillier glisse vers des modules de formation et prend goût à cet échange. La vocation de la transmission la pousse en 2001 à changer ses activités pour se recentrer sur celles liées à la culture et aux arts, autour de la céramique au sein de l’association Céram’Archi fondée par ses parents. 

Elle y donne des cours ouverts à tous avant de créer l’atelier Mosaïque et Création qui prolonge l’entreprise de Pepsy et Michel L’Huillier. En 2013, elle s’installe à Taller, dans les Landes. Là, tout en développant son activité de professeur, la mosaïste plasticienne compose des fresques, collabore avec des architectes, des décorateurs mais aussi des particuliers passionnés. Sa pratique artistique évolue. Ses tableaux reflètent désormais un métissage des techniques, mêlant céramique, mosaïque et raku.

Mosaïque Georges Brassens
Métro Porte des Lilas ligne 11
 


Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.