Hommage à Edith Piaf (1915-1963), la statue de bronze imaginée par la sculptrice Lisbeth Delisle propose une représentation expressive à taille humaine de l'artiste. Ce portrait en pied haut d’1m75, est néanmoins bien plus grand que ne l’était la chanteuse qui mesurait seulement 1m47. Bras levés vers le ciel, corps fluet, douloureux d'émotion et disparaissant dans une robe trapèze, tête renversée en arrière, visage tendu, bouche ouverte, la statue semble chanter à plein poumon, regard perdu dans l’imaginaire de sa complainte. Elle a été officiellement présentée au public le 11 octobre 2003 au cours des cérémonies d’inauguration après réaménagement de la place portant son nom, à l’occasion du quarantième anniversaire de la disparition de l’artiste. Edith Piaf, chanteuse populaire poussée dans la rue a incarné par ses chansons l’aspiration au bonheur d’une humanité souffrante. Le bronze posé au niveau des passants revendique son accessibilité telle l’artiste proche de son public.
Oeuvre d’art public, commande de la Ville de Paris, « l’Hommage à Edith Piaf » a été réalisé à l’occasion du quarantième anniversaire du décès de la chanteuse. Lisbeth Deslile mandaté par la Mairie du XXème arrondissement s’est ingéniée à traduire plastiquement la puissance et l’humanité d’une voix, la proximité d’une artiste et de son auditoire. Le portrait à la fois reconnaissable et métaphorique surprend par l’éloquence du geste et la ferveur du visage qui retranscrivent tout à la fois la force de cette femme et les épreuves qu’elle a traversées. Lisbeth Deslile a soumis trois projets à la Ville, trois esquisses de cire avant que la version sélectionnée ne soit exécutée en plâtre à l’échelle finale. La fonderie Clémenti a pris en charge la réalisation du bronze, installé au centre de la place rénovée qui porte le nom d’Edith Piaf.
Lisbeth Deslile née le 16 avril 1935 à Neuilly-sur-Seine suit une formation à l’école des Beaux-arts de Paris à partir de 1956. Elle y fréquente l’atelier de Marcel Gimond. A partir de 1962, elle suspend son activité de sculptrice pour se consacrer un temps à la décoration. Mais en 1964, elle choisit de reprendre le chemin de la rue Bonaparte. L’école a évolué et les ateliers animés tous les trois mois par un nouvel enseignant. Elle assiste aux cours de Raymond Corbin, André Arbus puis elle vit une véritable révélation avec les interventions d’Ossip Zadkine pour lequel elle sera un temps massière. La rencontre s’avère fondatrice. Le maître, véritable conteur, l’invite à émanciper son imaginaire, à développer ses propres ressources d’invention. Par la suite Lisbeth Deslile intègre la grande leçon de liberté dispensée par Robert Couturier. Elle acquiert en sa compagnie un certain goût pour la figuration à une époque où l’abstraction est reine. Second Prix de Rome en 1965, le prix Bourdelle lui est attribué en 1985, les prix Despiau, Fondation de Coubertin, Paul Louis Weiller. Elle enseigne un temps la sculpture à l’Université Sorbonne-Saint-Charles.
La sculpture figurative de Lisbeth Deslile ne fait jamais l’impasse sur la tentation de l’abstraction. Narration sculptée, récit prolixe, l’artiste révèle l’émotion par l’expressivité vivace des lignes, une tension et un dynamisme. Le mouvement est incarnation de la vie, de ses trépidations mais également de l’instabilité permanente du monde. Tourment de la forme, silhouette tendue vers le ciel, oiseaux sans ailes tentés par le ciel, les contours pourraient être végétaux, minéraux, animaux, humains. Le vocabulaire plastique très personnel de Lisbeth Deslile est au service de la puissance sensible du modelé. L’équilibre des pleins et des creux laisse les espaces se développer entre ombre et lumière.
Lisbeth Deslile procède par modelage et assemblage afin de maîtriser les volumes. Elle travaille les résines, les cires, la terre, le carton. Ces œuvres sont éditées en bronze par modèles uniques ou séries limitées. Son oeuvre se compète d’un abondant corpus de dessins et de collages réalisés dans le cadre du travail préparatoire. La plasticienne s’implique dans un processus de questionnement perpétuel de la pratique. La production de la forme sculptée implique une constante exploration des libertés, des limites et des contraintes de la technique.
Interrogeant la condition humaine, les paradoxes de l’âme entre grandeur et insignifiance, Lisbeth Delisle nourrit un goût de la mise en scène théâtralisée pas exempte d’une forme de vision architecturale de l’œuvre. Elle imprime à ses figures énigmatiques des postures tragi-comiques, gestes grandiloquents ou retenus. Pour l’artiste, l’émotion est une impulsion.
Hommage à Edith Piaf Lisbeth Deslile
Place Edith Piaf - Paris 20
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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