Série : Les Soprano, de David Chase - Saisons 1 à 6 disponibles sur OCS



Officiellement représentant syndical d’une entreprise de ramassage des ordures, Tony Soprano, vient tout juste d'être intronisé parrain d’un clan mafieux du New Jersey. Il est confronté à des phénomènes psychosomatiques susceptibles de nuire à son autorité nouvelle. Il multiplie crises, syncopes et attaques de panique autant de symptômes qui suggèrent une dépression aiguë. Dans le plus grand secret, il consulte une psychiatre, le Dr Jennifer Melfi. En thérapie, Tony doit affronter ses démons intérieurs, un modèle paternel trouble, une mère castratrice et manipulatrice, l’angoisse du danger constant pesant sur sa famille du fait de ses activités criminelles. Son quotidien est marqué par les guerres de territoire, le trafic de drogue, prostitution, les meurtres, les complots, les campagnes d’intimidations, le maintien des réseaux d’influence douteux, la distribution des pots de vin mais il est aussi un père de famille. Carmela épouse au foyer modèle, ne supporte plus les innombrables maîtresses de son mari. Ses enfants, Meadow et Anthony Jr, d’insupportables adolescents embrassent tous les problèmes de leur âge. Livia, sa mère qui commence à yoyoter sévère, refuse d’aller en maison de retraite. L’Oncle Junior, aigri par l’ascension de son neveu au sein de l’organisation, manigance dans l’ombre. Sa maîtresse russe voudrait être épousée. Son neveu, Christopher développe des comportements autodestructeurs qui inquiètent sa fiancée Adriana. Ses lieutenants, Silvio, qui gère le Bada Bing, un club de strip-tease, Paulie en charge des jeux, Ralph, Pussy sont sous la surveillance du FBI. Ponctuellement, les agents gouvernementaux tentent de retourner les proches de Tony par le chantage.

Création de David Chase diffusée à partir de 1999 sur la chaîne câblée HBO, « Les Soprano » oeuvre devenue classique annonce l’avènement de l’ère des séries modernes. Durant six saisons, ce récit télévisuel, très ancré dans la réalité du début des années 2000, la pop culture, entraîne le spectateur dans l’épopée à hauteur d’homme d’un parrain de la mafia du New Jersey.

La mise en scène sophistiquée, le remarquable travail d’écriture mené par une équipe d’auteurs brillants parmi lesquels notamment Matthew Weiner futur créateur de Mad Men, confèrent à la série un statut particulier. Entre humour noir et émotion, le ton perpétuellement sur la tangente s’inscrit dans une singularité qui doit beaucoup à la position centrale du méchant, un salaud au coeur du dispositif narratif. Une première à l’époque qui sera suivi par pléthore d’anti-héros bordeline. 

David Chase fait le pari osé de créer un Tony Soprano attachant tout en préservant une forme de lucidité quant à ses activités, sa violence. Raciste, homophobe, queutard impénitent, il aura fallu une véritable performance d’acteur pour incarner ce mafioso dans la tourmente et le rendre sympathique. James Gandolfini parvient à mettre en lumière l’humanité derrière le masque du scélérat avec brio. Par le biais du récit, de l’évolution de ce personnage, il questionne sans cesse la morale et le code d’honneur particulier du crime organisé.




Série de genre, « Les Soprano » ne boude pas son plaisir et sait ponctuer l’intrigue des indispensables fusillades, intrigues policières, règlements de compte. Les spécialistes apprécieront les nombreux clins d’œil aux films de Scorsese et Coppola. Mais la maîtrise du dispositif, la volonté de distiller le doute, d’infuser la paranoïa, pousse à user avec parcimonie des scènes d’action choc. Elles ponctuent le récit, rares mais intenses, comme pour ramener le spectateur à la réalité du milieu mafieux, le rôle de chacun. La narration déroutante d’un quotidien à la paradoxale normalité rendrait presque sympathiques ces criminels par essence détestables. La violence, présence fulgurante et très ponctuelles, joue les piqures de rappel. La dramaturgie de la série s’illustre particulièrement dans les dialogues, véritables tranches de vie. Parfois une redoutable colère affleure derrière les propos les plus anodins.

Portrait saisissant des Etats-Unis de l’ombre à l’aube du XXIème siècle, la série « Les Soprano » tend un miroir aux désenchantés du rêve américain et livre une réflexion profonde sur la société occidentale obnubilée par les apparences et les biens matériels, la difficulté des relations filiales, le déracinement et les névroses de la modernité.

Les Soprano, de David Chase
Série HBO diffusée de 1999 à 2007
Saisons 1 à 6 disponibles sur OCS

Avec : James Gandolfini (Tony Soprano), Edie Falco (Carmela Soprano), Jamie-Lynn DiScala (Meadow Soprano), Robert IIer ( Anthony « A.J. » Soprano Jr), Lorraine Bracco (Dr Jennifer Melfi), Dominic Chianese (Corrado « Junior » Soprano), Nancy Marchand (Livia Soprano), Aida Turturro (Janice Soprano), Michael Imperioli (Christopher Moltisanti), Drea de Matteo (Adriana La Cerva), Tony Sirico (Paulie Gualtieri), Steven van Zandt (Silvio Dante), Steve Schirripa (Bobby « Bacala » Baccalieri), Vincent Pastore (Salvatore « Big Pussy » Bonpensiero), Joe Pantoliano (Ralph Cifaretto), Vincent Curatola (Johnny « Sack » Sacramoni), Frederico Castelluccio (Furio Giunta), David Proval (Richie Aprile), Joseph Badalucco Jr (Jimmy Altieri), John Ventimiglia (Artie Bucco), Katherine Narducci (Charmaine Bucco), Steve Buscemi (Tony Blundetto), Frank Vincent (Phil Leotardo)



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.