Puissants talismans ancestraux, les Anting Anting révèlent par leur omniprésence un aspect inattendu de la culture des Philippines. Selon la tradition populaire, ces amulettes imprégnées d’un pouvoir mystique surnaturel acquis lors de rituels confèrent à leur propriétaire force et protection. Portée près de la peau, il existe un lien intime entre la médaille et son détenteur qui par le biais de cet art ésotérique s’assure une connexion au divin et la promesse d’invulnérabilité, de guérison, d’amour et de richesse. A l’atelier Martine Aublet, le Musée du Quai Branly Jacques Chirac consacre une exposition originale aux Anting Anting sous forme de cabinet de curiosités. Elle rassemble de nombreux objets, médaillons de laiton, de cuivre, d’os ou de bois, chemises investies de propriétés magiques, papiers consacrés ainsi que des photographies de ceux qui pratiquent cette croyance jusqu’à faire tatouer dans leurs chair les motifs sources de force. Des séquences filmées des différents rituels complètent ce court panorama fascinant.
La coutume des Anting Anting, issue des cultes animistes précoloniaux, a traversé le temps s’imprégnant dans ses représentations de l’iconographie chrétienne. Fusion des croyances et des cultes, les Anting Anting illustrent l’histoire des Philippines en exprimant sous une forme syncrétique les différentes influences qui ont marqué la culture de l’archipel.
L’exposition analyse la transformation de ces objets à travers les époques. Elle propose de décrypter signes et symboles qui mêlent les représentations des esprits animistes aux images chrétiennes de saints variés et aux symboles populaires traditionnels.
Après les cultes anciens supplantés par l’avènement du christianisme, de nos jours, ce sont les figures des grands événements tels que la Révolution Philippine de 1898, les révoltes millénaristes et paysannes qui ont pris la suite des saints catholiques.
Héros national exécuté pour son engagement, José Rizal (1861-1896) écrivain et chirurgien, s’est illustré dans la lutte contre la colonisation espagnole et pour l’émancipation du peuple philippin. Il est devenu l’un des motifs récurrents les plus importants des Anting Anting. Néanmoins, l’emblème le plus ancien l’Infinito Sa Bato est toujours considéré comme le plus puissant.
Aujourd’hui profondément ancrée dans la vie quotidienne, la pratique des Anting Anting perdure et trouve de nouvelles formes d’usages familiers. La fabrication demeure artisanale. L’activation de leur puissance par des incantations donne lieu à des cérémonies très investies. Les Anting Antig rendraient hermétiques aux blessures par balles. Objets de protection, ils sont arborés par les policiers, les soldats, les membres de sectes ou de gangs. Etonnant.
Anting Anting, l'âme secrète des Philippins
Jusqu'au 26 mai 2019
Musée du Quai Branly Jacques Chirac
37 quai Branly - Paris 7
Tél : 01 56 61 70 00
Horaires : lundi, mardi, mercredi et dimanche de 11h à 19h, jeudi, vendredi et samedi de 11h à 21h
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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