Quatrième adresse du groupe Ennismore fondé par Sharan Pasricha, The Hoxton Paris célèbre un art de vivre cosmopolite. Bien plus qu’un hôtel, il se veut lieu de vie, de passage, de partage. La compagnie britannique éprise de lieux marqués par une forte identité architecturale, a trouvé dans un ancien hôtel particulier du XVIIIème siècle classé aux Monuments historiques, l’écrin parfait pour sa résidence parisienne. Inaugurée après les deux établissements londoniens de Shoreditch et Holborn et celui d’Amsterdam, juste avant ceux de Williamsburg et Portland, celle-ci a su depuis un peu un plus d’un an assurer son statut hautement désirable. Furieusement instagrammable. The Hoxton Paris, hôtel-bar-restaurant, affiche, dans un décor monumental ultra-léché, une coolitude décomplexée, à laquelle vient s’ajouter opportunément le sens du service à l’anglo-saxonne. Traduction, on a beau être à Paris dans un temple de la tendance, le personnel ne tire pas la tronche ni ne rechigne à bosser. Un déjeuner en ville, une invitation Billecart-Salmon, m’a permis de découvrir cette mécanique de haute précision ainsi que la brasserie Rivié qui fait les belles heures des branchés de toute obédience.
Chaîne haut de gamme, les hôtels Hoxton trouvent dans l’identité même des villes où ils s’installent la matière de leur singularité. L’établissement parisien, à deux pas des grands boulevards, s’est installé dans un ancien hôtel particulier du XVIIIème siècle dit de Rivié ou mentionné parfois comme de Meslay. Sous l’impulsion du propriétaire qui lui a donné son nom, Etienne de Rivé, conseiller de Louis XV, l’édifice a été entièrement reconstruit de 1733 à 1739 sur des bâtiments préexistants. L’ensemble est attribué à l’architecte Nicolas d’Orbay. Entre 1833 et 1846, l’hôtel est surélevé et de nouvelles constructions voient le jour dans la cour, à l’emplacement du jardin principal. L’hôtel de Rivié se découvre une vocation commerciale accueillant successivement magasins, entrepôts, activité manufacturière. Menacé par des projets immobiliers au début des années 2000, il est inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques en 2001.
Acheté en 2013 par le groupe Ennismore, il aura fallu quatre ans de travaux pour redonner leur lustre aux trois bâtiments d’époque différente. The Hoxton Paris est le fruit d’une étroite collaboration entre le cabinet Humbert et Poyet qui a entièrement pensé les chambres et l’équipe créative d’Ennismore secondé par le studio Soho House qui ont défini les espaces communs. En harmonie avec l’histoire de l’hôtel et l’esprit du quartier, les multiples lieux de vie se succèdent harmonieusement. Lobby, bar, jardin d’hiver, salle à manger sous verrière, patios ouverts cours intérieures pavées et mezzanine - où se produisent des DJ en soirée et le week-end - forment un ensemble cohérent au charme indéniable. La décoration s’inscrit dans un juste équilibre entre le classicisme des moulures, parquets en point de Hongrie, poutres apparentes et la contemporanéité de l’architecture d’intérieur. Les quinze escaliers en spirale d’origine et la pierre blonde si parisienne parachèvent un look détonant.
Le lobby façon jardin d’hiver, où se trouve également un joli bar, illustre cette esthétique à la perfection. Du bleu canard, du jaune moutarde, grands fauteuils en velours, des palmiers, des détails chinés, un escalier spectaculaire pour accéder à la mezzanine, l’ambiance est très réussie. Dans ce lieu hors du commun, les références industrielles, lampes Gras, verrières d’atelier répondent aux influences années 1950, formica et laiton, mobilier d’inspiration scandinave, clins d’œil à Jean Prouvé.
Les espaces du restaurant procèdent de la même eau. Le Rivié, brasserie de deux cents couverts, s’étend entre la salle à manger sous verrière, des coins salons autour de tables basses rondes, l’orangerie et la terrasse. Au menu, la carte, resserrée mais variée, évolue en fonction des saisons. Il n’est nullement fait mention de prétentions gastronomiques. Hybride dans ses influences, elle valorise les produits locaux et nous fait l’heureuse surprise de prix cléments. Les assiettes bistrotières tradi, tartare de bœuf, salade César, burger, côtoient les toquades du moment, ceviche, saumon Gravlax, buddha bowl, avec des options idéalement réparties entre viande, poisson, veggie. Déjeuner, cocktails, dîner ou brunch, les occasions ne manquent pas.
Pour lancer le déjeuner, une coupe de champagne rosé Billecart-Salmon s’impose ! Robe rose pâle filetée d’or, très fines bulles persistantes, ce vin élégant développe des arômes subtils de fruits rouges, rehaussés de notes d’agrumes qui en bouche se précisent dans des nuances de framboises, de groseilles et kumquat. Précision et fraîcheur, délicieuse effervescence.
En entrée, la Salade de maïs grillé, pop-corn, tomates confites - 13 euros ou 18 euros en version plat - flatte l’œil par ses couleurs pimpantes et le palais par sa fraîcheur printanière. Le Millefeuille de crabe, haddock, pesto de roquette - 13 euros - joue les élégances architecturales. S’il s’affiche des plus dodus, le Hoxton cheeseburger, frites, salades, oignons confits 19 euros - est en définitive plutôt dispensable, trop convenu, manquant de jus. Mais le Buddha bowl, œuf parfait, chou rouge, lentilles, quinoa - 19 euros - rattrape l’affaire par ses combinaisons sucrées-salées audacieuses, ses textures contrastées.
Le Millefeuille citron, crème de citron, citronnelle, chantilly combaya - 9 euros - suave vaisseau acidulé sait habilement naviguer jusqu’à nos papilles, légers embruns d’agrumes et tuiles croustillantes. La Poire chocolat, biscuit amande, gelée de poire, sauce chocolat - 9 euros - célèbre l’automne en grande gourmandise.
Un peu victime de son succès, le Rivié, pris d’assaut au déjeuner, est un chouïa bruyant en salle principale. Il réserve néanmoins des trésors de quiétude à l’Orangerie et en terrasse. Le service attentif et efficace n’en oublie pas l’atout charme, le sourire. Si la cuisine est tout à fait décente, il ne faut cependant pas s’attendre à des compositions de haute voltige. Ici, c’est le lieu qui est la star et pas l’assiette. Conscient de ce petit hiatus, le visiteur pourra apprécier toute la magie de l’endroit.
Restaurant Le Rivié
Hôtel Hoxton
30-32 rue du Sentier - Paris 2
Tél : 01 85 65 75 01
Horaires : De dimanche à mercredi de 7h à 1h (dîner servi jusqu’à 22h30) - De jeudi à samedi de 7h à 2h (dîner servi jusqu’à 23h)
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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