Théâtre : Hard, d'après la série de Cathy Vernet - Avec Claire Borotra, François Vincentelli, Nicole Croisille - Théâtre de la Renaissance



Femme au foyer, Sophie s’épanouit dans son rôle de mère jusqu’au jour où Alexandre, son mari qu’elle pense à la tête d’une entreprise de transport, décède lors d’un accident. Le jour de l’enterrement cette bourgeoise catho plutôt coincée découvre avec effarement la singulière dégaine des collègues de son époux. Louise, sa belle-mère, est chargée de lui apprendre la vérité. Alexandre dirigeait en réalité une société de production de films pornographiques, Soph’X. Le notaire lui confirme cette nouvelle surréaliste et lui annonce qu’elle hérite de ladite société. C’est l’heure des grandes interrogations. Acceptera-t-elle ou pas cette charge ? Pourra-t-elle assumer le statut de productrice de X alors qu’elle a des adolescents à élever ? Ne voyant pas d’autres sources de revenus, la veuve éplorée fait preuve d’audace. Parachutée dans un univers qui lui est totalement inconnu, elle doit redresser une société mal en point face à la déferlante du porno amateur disponible à profusion sur Internet tandis que la star masculine, Roy LaPoutre, s’éprend d’elle.






Librement inspiré de la série éponyme écrite par Cathy Vernet et diffusée sur Canal + de 2008 à 2015, cette comédie populaire joyeusement fantaisiste s’avère des plus savoureuses. Bruno Gaccio et Alexis Tregarot qui se prêtent à l’exercice délicat de l’adaptation scénique, filent la veine comique de la caricature, de l’exagération décomplexée donnant à la pièce un cachet gentiment barré. Osées mais pas franchement scabreuses, les répliques ciselées fusent sans filtres alors que s’échappent quelques grivoiseries dans un rire exutoire. 

Outre le plaisir de retrouver sur les planches une partie de la distribution originelle, la mise en scène énergique de Nicolas Briançon met en valeur l’essence comique d’un texte irrévérencieux troussé avec panache. Les situations rocambolesques s’enchaînent à un rythme soutenu tandis que le décor s’adapte avec fluidité aux impératifs narratifs. 

La belle énergie et l’esprit de troupe fait des merveilles sur scène. Dans le rôle de Sophie, peut-être le moins gratifiant de toute la distribution, car le moins fantaisiste, Claire Borotra, sensible et lumineuse, interprète sobrement la rigueur morale de Sophie qui se décoince. Se glissant dans la peau de Louise, Nicole Croisille est épatante en vieille dame indigne totalement délurée. 

Harder amoureux, grand sentimental qui rêve d’une vie normale, Roy LaPoutre apparaît sous les traits de Fabrice Vincentelli qui lui donne une sincérité de vrai gentil presque candide. Charlie Dupont, en Corrado à l’accent sud-américain improbable et Stephan Wojtowicz, qui joue Pierre, un réalisateur hâbleur mais au cœur tendre, sont tout aussi réjouissants. 




Reprenant à bon compte, les codes, le vocabulaire, de cette industrie, la farce bon enfant dégoupille la grenade et fait valser les tabous dans une transgression joyeuse abordant de front des sujets tels que la sexualité des personnes âgées, les fantasmes féminins, les problèmes d’érection. Hard n’a pas de vocation directement sociale et cherche à dédramatiser l’univers de la pornographie. Ici pas de détresse chez les acteurs, travailleurs du sexe. Si le trait est volontiers grossi, la bande de pieds nickelés du X forme une grande famille attachante. Une comédie sentimentale au pays du porno rose bonbon.

Hard, d’après la série de Cathy Vernet
Adaptation Bruno Gaccio et Alexis Tregarot
Mise en scène Nicolas Briançon
Avec Claire Borotra, François Vincentelli, Nicole Croisille, Charlie Dupont, Stephan Wojtowicz, Isabelle Vitari, François Marielle, Dany Verrissimo et Sarah Gellé,
François Marielle, Sarah Gellé, Dany Verissimo-Petit

Jusqu’au au 6 janvier
Du mardi au samedi à 21h
Matinées le samedi et le dimanche à 16h30

Théâtre de la Renaissance
20 boulevard Saint-Martin - Paris 10
Réservation : 01 42 08 18 50



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.