Lundi Librairie : J'adore la mode mais c'est tout ce que je déteste - Loïc Prigent



J'adore la mode mais c'est tout ce que je déteste - Loïc Prigent : Journaliste spécialiste de la mode , Loïc Prigent croque régulièrement ce milieu à part dans des documentaires originaux - Signé Chanel, Karl Lagerfeld se dessine, Le jour d'avant - ou dans des émissions au succès incontesté sur Arte et Canal + - Habillé( e )s pour… avec Mademoiselle Agnès. Depuis 2013, il publie sur son compte Twitter les bons mots piquants et les gaffes hilarantes glanés dans les couloirs des maisons de couture, les rédactions des magazines de mode, les coulisses des défilés de la fashion week. L'oreille à l'affût, Loïc Prigent entend des réflexions merveilleuses de loufoqueries. Perfidie des remarques, malice des coups de griffe, rosserie des saillies drolatiques, J'adore la mode mais c'est tout ce que je déteste offre un florilège de ses petites phrases en 140 caractères, un recueil de tweets qui accèdent ainsi aux dimensions redoutables de l'aphorisme définitif. "Bienvenue dans l'asile psychiatrique à ciel ouvert le mieux habillé du monde."

Univers perché, survolté, déclassé et totalement déconnecté de la réalité du péquin lambda, ce microcosme qui possède son propre langage, ses codes singuliers fascine autant qu'il agace. Les pépiements que partage le journaliste sur son compte soulignent l'ambivalence entretenue par ceux qui la font vis à vis de la mode, un rapport amour-haine qui confine à l'hystérie, un manège épuisant qui peut rendre fou. Dans ce milieu clos se joue une nouvelle comédie humaine. On dit du mal, on se moque de son prochain et les réseaux sociaux sont les nouveaux outils d'expression de soi, de mise en scène de sa propre vie.

A travers des bribes de conversations attrapées à la volée, citations hors contexte des aficionados, Loïc Prigent épingle avec malice la folie légère du monde de la mode où l'ironie et l'esprit vont de pair avec la vanité et la vacuité, la créativité et la poésie avec la cruauté et l'intransigeance. Entre fulgurances et superficialité, frénésie et absurdité, la désinvolture y est érigée en style de vie. Le désir de perfection s'y révèle plus que nulle part ailleurs aberrant, les diktats de la jeunesse cruels, les rumeurs fatales, la violence économique délétère. 

Twitter désormais autorise 280 caractères. Mais le milieu de la mode demeure fidèle à lui-même. Pour vous donner envie, quelques perles issues du recueil.

C'est tellement moche on dirait une fringue de l'an prochain.

Tu as fait quoi ce week-end ?
- Je ne me souviens pas

Ne pleure pas. Pense à ton maquillage.

Y'a perdage de pédales.

J'ai tellement faim, je pourrais manger.

Je sais qu'il y a des gens qui meurent dans le monde, mais réglons un problème à la fois et commençons par tes cheveux.

Tu veux du champagne ?
– Non merci, ça me rappelle trop le boulot.

On s'habitue au luxe. C'est affreux.

Qu'est-ce qu'il lui est arrivé, il y a eu des soldes chez Lindt ?

Elle est belle, mais il faudrait lui enlever le front.

Tu fais ce que tu veux. C'est juste que Jackie Kennedy aurait pas fait ça.

Ils ont fait un cocktail à l'Aquarium de Paris où ils servaient des sushis. C'était un peu redondant.

Il voulait se faire virer alors il est venu en costume saumon au studio pendant un mois.

Je suis une Libanaise coincée dans un corps de Breton.

Elle a quel âge ?
– Impossible à dire. Elle fait des liftings pervers où le chirurgien laisse des vraies fausses rides.

Ne le prends pas personnellement, elle déteste le monde entier. Rien à voir avec toi. Même si moins de parfum aiderait.

Vous pourrez lui poser des questions demain mais venez en noir pour ne pas déranger le processus créatif.

Les gens sont moches. S’ils étaient beaux, ils n’auraient pas besoin de nos fringues.

J'en peux plus des assistants débraillés. Quand je débutais, je venais au bureau en Mugler. Avec le trou de l'antivol, mais en Mugler.

Elle est morte. Il faut juste qu'on la prévienne.

J'adore la mode mais c'est tout ce que je déteste - Loïc Prigent - Editions Grasset - Edition de poche Points 



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.