Mondes clos et parfaits à l'ordonnancement idéal, lieux de méditation et de créativité où sont flattés tous les sens, les jardins orientaux aux croisements des savoir-faire et des sciences relèvent d'un art de vivre à la puissance d'évocation intacte. Jardins suspendus de Babylone, Alhambra de Grenade, Taj Mahal en Inde, Majorelle à Marrakech, parc al-Azhar au Caire, jardin d'essai d'Alger, de la Haute Antiquité aux innovations contemporaines, les jardins d'Orient portent en eux la magie d'une tradition savante séculaire, celle du merveilleux. Jusqu'au 25 septembre, l'Institut du Monde Arabe consacre une exposition retraçant l'histoire de ces oasis réinventées par l'homme à travers les angles culturel, technique, botanique. Un évènement exceptionnel qui interroge les dimensions environnementale et sociétale du jardin ainsi que l'imbrication fondamentale entre ceux-ci et la ville.
Apparus entre Tigre et Euphrate, sous le nom de Pairi-daeza - espace fermé en langue persane - les premiers jardins d'Orient ont laissé des traces archéologiques dans la cité de Pasargades fondée vers 560 avant JC par Cyrus le Grand en Perse. Ce nom donnera naissance à l'idée de jardin des délices et à notre mot Paradis.
Ces jardins répondent à la structure orthogonale prémisse du chahâr-bâgh "quatre jardins" du monde arabo-musulman. Aux sciences de l'architecture, de l'hydrologie et de la botanique, se mêle l'idéal de beauté exprimé par l'ordre et la géométrie avec des perspectives structurées par quatre canaux. Ils représentent les quatre fleuves du paradis et dessinent les huit parties du Coran offrant à ces lieux de plaisirs des sens une dimension spirituelle et religieuse.
Jardins d'Orient, jardins du désert, ces créations humaines généreuses, gagnées sur une nature hostile, sont avant tout une histoire d'eau, d'utilisation réfléchie des espaces et des ressources requérant une maîtrise des éléments naturels.
Les aménagements hydrauliques importants permettent de recycler les eaux dans une mise à profit des reliefs naturels ou récréés tandis que les plantes choisies sont fondamentalement adaptées au climat. Ainsi pensé ce lieu de vie, déploient harmonieusement cultures maraîchères et plantes d'ornement. Une science susceptible d'inspirer nos contemporains à l'heure des crises écologiques.
Image du paradis promis aux fidèles, symbole de richesse et de pouvoir, espace de liberté, les jardins inspirent de tout temps les artistes. Peintures, enluminures, photographies, éléments de décoration, céramiques, plus de trois cent œuvres sont exposées à l'Institut du Monde Arabe.
Miniatures, tapis, sculptures, zelliges et parures fleuries des princes moghols célèbrent le plaisir des sens au cœur des jardins d'Orient. Chant de l'eau répondant à celui des oiseaux, parfum des fleurs et des plantes aromatiques, beauté des compositions, gourmandises des fruits, l'écriture botanique, comble du raffinement, évoque à la fois la rigueur d'une science et l'exaltation de la sensualité.
Après les découvertes théoriques, l'exposition nous promet d'expérimenter cette magie grâce à un jardin établi sur l'esplanade du musée. Conçu par le paysagiste Michel Péna, il se veut évocation contemporaine des jardins orientaux.
Les parterres fleuris et les plantes odorantes conversent avec la générosité des arbres fruitiers tandis qu'à l'ombre des palmiers se fait entendre le bruissement des jeux d'eau sur la céramique. Point d'orgue du tableau, les différentes parties de ce jardin s'assemblent vue d'une passerelle en surplomb pour former une anamorphose végétale imaginée par François Abénalet.
Du 19 avril au 25 septembre 2016
1 rue des Fossés-Saint-Bernard - Paris 5
Horaires : Du mardi au vendredi de 10h à 18h, le samedi et le dimanche de 10h à 19h - fermé le lundi
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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