Marianne Lane, star du rock aphone, se remet d'une opération des cordes vocales. Convalescente, elle passe de paisibles vacances sur l'île de Pantelleria, au large de la Sicile, en compagnie de son jeune amant, le taciturne mais très prévenant, Paul de Smedt. Cette apparente sérénité est troublée par l'arrivée impromptue de Harry Hawkes, ex de Marianne, un producteur de musique excentrique, jouisseur invétéré, et de sa fille Pénélope à laquelle Paul n'est pas indifférent.
A bigger splash, qui doit son titre à celui d'une toile de David Hockney, est inspiré du scénario de La piscine de Jacques Deray de 1969. Cette relecture contemporaine vénéneuse reprend la trame originale, tensions sexuelles matinées de jalousie inquiète, interrogations sur l'essence du désir. La légèreté de ce badinage amoureux trouve, en prise avec l'actualité dramatique, un contrepoint violemment correcteur dans une narration sur fond de crise des migrants. Il y a une certaine ironie cruelle à mettre en parallèle l'afflux des réfugiés, et l'indifférence des rich and beautiful tout entier préoccupés par leurs marivaudages, une désinvolture gênante qui participe du malaise général.
Le réalisateur, Luca Guadagnino, n'hésite pas à surjouer sur la gamme mélodramatique. Les rapports qui se voudraient électriques, entre ressentiments et attraction, dégagent une impression de fadeur accrue par la sensation de désintérêt pour les personnages de ce quatuor amoureux pris dans des jeux de séduction. Le bouillonnement de fioritures esthétiques, de langueurs hyper-esthétisées donnent un ensemble volontairement kitsch. La très belle photographie souligne la splendeur d'une nature sauvage vaguement inquiétante.
Le temps suspendu des paysages volcaniques lunaires écrasés de soleil est un décor, travaillé comme tel ajoutant au manque de sincérité de l'histoire qui sonne faux malgré un casting flamboyant. Tilda Swinton, privée de sa voix, doit compter sur le charisme de sa présence, en murmures et vulnérabilité. Jeu instinctif et physique, Matthias Schoenaerts incarne un ancien alcoolique en lutte contre ses démons plus monolithique que franchement mystérieux. Ralph Fiennes semble éclipser à l'écran tous ses partenaires, charme hystérique, interprétation fougueuse tandis que Dakota Johnson se révèle franchement transparente.
Film inégal, esthétique et survolté, A bigger splash abonde dans le non-sens et la gratuité. Assez peu convaincant malgré la présence de comédiens brillants. Voir ou revoir l'original de Jacques Deray avec le trio solaire Delon, Schneider, Ronet.
A bigger splash de Luca Guadagnino
Sortie le 5 avril 2016
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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