Expo : Au rapport - François Boisrond - Galerie Louis Carré & Cie - Jusqu'au 21 octobre 2017



De mystérieuses jeunes femmes en cuirasses martiales, coiffées de casques à pointe, de képis, brandissent des instruments de jardinage incongrus. Dans l'arsenal de ses amazones, les taille-haies et les tondeuses à gazon ont remplacé les sabres et les mousquets. Sur les costumes de hussard, l'or des galons répond au bleu marine des étoffes, au vermillon de l'uniforme.  Elles posent armes horticoles à la main. L'une promène une vache, l'autre un âne. Elles semblent ici réunies pour un conciliabule guerrier, là pour un interrogatoire sévère. Ces portraits de femmes en uniformes anciens et modernes interrogent dans leur traitement les compositions de la peinture classique. L'artiste se renouvelle, investit de nouveaux territoires de création porté par l'idée forte d'une évolution plastique que sous-tend une progression technique. Les vingt-cinq tableaux réunis à la galerie Louis Carré & Cie dans une exposition dont le titre, Au rapport, claque comme une injonction militaire, prolongent la réflexion du peintre sur le costume.










S'inspirant des tableaux du passé, influencé par les maîtres hollandais du XVIIème siècle, François Boisrond revisite les canons de la peinture à partir d'un modèle numérique. L'outil a une importance majeure dans ce travail expérimental. Dans l'idée de prolonger la tradition de la scène de genre, le peintre organise des séances de prises de vue sous forme de tableaux vivants. 

Il fait poser sa fille, ses nièces, ses élèves des Beaux-Arts dans des mises en scène dignes des plateaux de cinéma où le monde réel croise la fiction de l'artiste. Eclairage soigneusement étudié, décors reconstitués, costumes étudiés, François Boisrond dirige ses modèles comme un réalisateur ses comédiens, saisissant des clichés qui relèvent du domaine de la performance. Il filme et photographie les plans dans un processus préliminaire à la toile auquel l'outil numérique va instiller une puissante modernité.










Pour cette surprenante Nativité en noir blanc où portique de sécurité et détecteur de métaux restreignent l'accès à l'Enfant Jésus, François Boisrond a entièrement recréé la scène dans l'atelier du nouveau Bateau Lavoir qu'il occupe depuis 2011. Sur la Butte Montmartre, il a fait venir l'âne et le bœuf, construire les échafaudages représentant l'étable biblique, rassembler tous ses figurants en une foule militaire. 

Arrêts sur image d'une représentation théâtrale, les photographies qui servent de motifs au peintre sont saisies sur le vif. Traités sur ordinateur avec Photoshop, les clichés pixélisés à la manière pointilliste glissent sous le pinceau de l'artiste, passent de l'ordinateur à la toile dans l'élan d'une vibration vivide. 










Peignant d'après les écrans ultra-modernes de l'ère digitale, François Boisrond recompose les prises de vue dans des effets de clair-obscur, de lignes floutées où s'exprime un glissement vers l'art des maîtres anciens. La lumière d'un Caravage, d'un Vermeer éclaire l'incarnat des visages, figures réalistes aux carnations moirées, dans un grand frémissement de la peau. La fluidité de l'étoffe peinte évoque la sensualité de la matière dans un grand embrasement de couleurs. Décalant la réalité à l'aune de son regard, François Boisrond instille dans ses compositions une dimension énigmatique à laquelle répond le côté naturaliste des toiles.

Au rapport - François Boisrond - Jusqu'au 21 octobre 2017
Galerie Louis Carré & Cie
10 avenue de Messine - Paris 8
Tél : 01 45 62 57 07
Horaires : Lundi 14h/18h30, du mardi au jeudi 10h00/12h30 et 14h00/18H30, samedi 14h/18h30



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.