Paris : Villa de l'Adour, l'esprit du vieux Belleville - XIXème




A Belleville, autour du quartier du Plateau, l'un des sommets de l'arrondissement, aux abords des Buttes Chaumont, le paysage urbain, rues en pente et nombreux escaliers, s'est adapté à la topographie singulière des collines. Les sous-sols fragilisés par les anciennes carrières ont longtemps limité la hauteur du bâti. Maisons faubouriennes, immeubles de rapport, nombreux ateliers, cours d'artisan dissimulées au regard derrière les façades, cités ouvrières bordées de jardins où paraissent les chats sont autant de précieux secrets qui ravissent les flâneurs attentifs. Au 13 rue de la Villette, derrière une vaste grille peu avenante mais souvent ouverte, se cache la villa de l'Adour, un passage bellevillois typique, venelle champêtre enchanteresse.











Le processus d'urbanisation de la commune de Belleville a durablement marqué le territoire de la ville d'une empreinte singulière. D'un côté les parcelles du village situées de part et d'autre de la rue de Belleville ainsi qu'au sud les terrains du couvent des moines de Picpus, de l'autre les parcelles de vignobles et de terres maraîchères côté rues de la Mare, des Rigoles. Les traces de l'histoire architecturale mouvementée de l'arrondissement sont suggérées par la forme évolutive des espaces. Les îlots neufs ont conservé le dessin de ces anciennes sections donnant naissance à une grande variété de constructions à travers lesquelles raisonne le passé rural et ouvrier de Belleville.

A cheval sur quatre arrondissements, le XXème et le XIXème, le Xème et le XIème, à Belleville, villas et cités d'un autre temps côtoient des ensembles modernes. Les rénovations successives ont généré de forts contrastes architecturaux. Terres viticoles et maraîchères jusqu'au milieu du XIXème siècle puis épicentre des temps modernes avec la multiplication grands ensembles manufacturiers, dès 1954 le quartier est touché par la désindustrialisation rapide de Paris. Jusqu'en 1974, les usines font place à de nouveaux types d'habitation, les secteurs jugés trop délabrés sont rasés et remplacés par de grandes tours comme place des Fêtes.

Depuis le milieu des années 80, la réhabilitation de Belleville et Ménilmontant est confiée à des architectes de renom qui reconstruisent la ville de nouveaux objectifs en tête : préserver, réinventer la cité pour pallier à déstructuration de la vie de quartier engendrée par le gigantisme des constructions précédentes. La rénovation de la ZAC Mare-Cascade, quartier que vous pourrez découvrir en photo dans les articles consacrés aux eaux de Belleville ici et est remarquable tant elle a su préserver l'esprit villageois et le charme des environs.












Voie privée ouverte en 1817, la villa de l'Adour s'appelle alors la villa Barthélémy avant d'être rebaptisée en 1877 du nom d'un fleuve du sud-ouest de la France. Petit lotissement de dix-neuf lots compris entre 90 et 160 m2, elle est à l'image d'un vieux Belleville préservé des grands travaux de rénovations des années 60-70. Débutant rue Mélingue, elle court sur 104 mètres de long jusqu'à la rue de la Villette née de la fusion en 1864 entre les boulevards et les chemins de ronde suivant le mur des Fermiers généraux.

Ruelle pavée de frais traversée par une rigole, la villa de l'Adour est une belle allée fleurie, aire de jeu des enfants et dessert collective, où croissent d'abondance rosiers, lauriers, bambous. La campagne à Paris ! La grande variété architecturale, entre maisons neuves et pavillons anciens, a conservé toutes les caractéristiques du passé bellevillois donnant un bel exemple d'identité contemporaine de la cour parisienne entre réhabilitation et constructions récentes, espace commun partagé.  Au numéro 3 un ancien lavoir industriel réhabilité en habitation par d'ingénieux architectes a conservé sa haute cheminée sur laquelle est intervenue Jérôme Mesnager. La silhouette de l'homme blanc, figure emblématique de l'artiste, veille sur la villa depuis les hauteurs.

Villa de l'Adour
Accès par le 13 rue de la Villette jusqu'au 14 rue Mélingue (qui a été muré) - Paris 19
Métro Pyrénées ou Jourdain (ligne 11)



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 


Bibliographie
Villages et Faubourgs de L'ancien Paris - Histoire d'un espace urbain. Paris - Bernard Rouleau - Seuil
Paris des faubourgs, formation, transformations, Paris, Pavillon de l'Arsenal - Sous la direction de Jacques Lucan - éd. Picard, 1996 plus particulièrement le chapitre Théorie des lotissements, la formation du XXe arrondissement - Amina Sellali
 Le guide du promeneur 19è arrondissement - Elisabeth Philippe - Parigramme
Paris secret et insolite - Rodolphe Trouilleux - Parigramme

Sites référents