Paris : Tombe de Jim Morrison au Père Lachaise, un lieu de recueillement pour les fans, une sépulture objet d'hommages dionysiaques - XXème

 


La tombe de Jim Morrison (1943-1971) demeure depuis plus de cinquante ans l’une des plus visitées du Père Lachaise. La mort de l’artiste survenue le 3 juillet 1971, nimbée de mystères, participe du mythe. Par cette disparition précoce, il entre dans le Club des 27, celui les rock stars mortes à l’âge de vingt-sept ans, parmi lesquelles on compte Brian Jones, Jimi Hendrix, Janis Joplin, Jim Morrison, Kurt Cobain et Amy Winehouse. Poète et sex symbol, Jim Morrison fait l’objet d’hommages étranges supposés célébrer sa réputation sulfureuse entre provocation et transgression. Pour saluer l’artiste en révolte contre une société répressive, les fans déposent cigarettes, bouteilles de bière et de whisky autour de sa sépulture, quitte à empiéter sur les tombes voisines. La tradition la plus saugrenue consiste à coller un chewing-gum sur le pauvre arbre qui fait face à la dernière demeure du chanteur. Une curieuse rumeur a durant quelques années laisser entendre que la tombe était vide et que Jim Morrison retourné à l’anonymat vivait loin des cohortes d’admirateurs et d'une célébrité douloureuse.





Lieu de pèlerinage moderne pour les fans, la tombe de Jim Morrison au Père Lachaise suscite hommages rituels et comportement excentriques comme autant de révérences envers le défunt. La présence sur le sol français de cette sépulture trouve une explication dans les derniers mois de la vie du chanteur américain. Jim Morrison poursuivi aux Etats-Unis pour "comportement indécent" et "ivresse sur la voie publique" rejoint sa compagne Pamela Courson en France. Il arrive à Paris le 17 mars 1971.  Dans un premier temps, il prend ses quartiers à l'hôtel George V. Son séjour se prolongeant, il loue un appartement au 17 rue Beautreillis, dans Le Marais.

Dans la nuit du 3 juillet 1971, il décède, officiellement d’un arrêt cardiaque à son domicile dans sa baignoire. Désormais journaliste et écrivain, Sam Bernett, à l’époque propriétaire de la boîte de nuit le "Rock’n’roll Circus", en activité de 1969 à 1972 rue de Seine, raconte dans ses mémoires que le musicien est mort d’une overdose dans les toilettes de son club. En mauvais termes avec sa famille et les membres de son groupe, The Doors, Jim Morrison est inhumé au Père Lachaise en présence de seulement cinq personnes, parmi lesquelles sa compagne Pamela Courson et la cinéaste Agnès Varda, le 7 juillet.  

La tombe discrète peu accessible, dernière demeure du Roi Lézard, attire depuis cette date les admirateurs éplorées. Le culte de la personnalité a peu à peu pris le dessus sur les hommages à l’artiste. Le buste originel qui ornait la sépulture a disparu depuis longtemps. Désormais, la tombe est marquée d’un simple bloc de granit. Sur la stèle commandée en 1981 par le père de Jim Morrison, officier de la Navy, en froid avec son fils, se lit une inscription en grec "KATA TON DAIMONA EAYTOY", Fidèle à son propre démon.

Les fans dispensent d’abondantes offrandes fleurs, portraits, disques. Ils ont initié une sorte de culte dionysiaque, célébration des débordements de l’artiste. Les manifestations de la dévotion prennent des formes plutôt iconoclastes. Mégots et paquets de cigarettes s’entassent autour de la tombe ainsi que les canettes de bière et les bouteilles de bourbon. Il est de coutume de boire un verre de whisky et d’en verser un autre au sol destiné au défunt. Afin de protéger l’arbre voisin, victime d’un rituel des plus imaginatifs et dont le tronc se couvrait de répugnants chewing-gums mâchouillés est désormais protégé par des canisses. Les barrières, placées par l’administration autour de la sépulture pour modérer les débordements, empêchent les gens de s’asseoir directement sur la tombe. Désormais les cadenas dans l’air du temps s’y multiplient. 

La tombe de Jim Morrison participe de la réputation internationale du Père Lachaise et perpétue en partie une certaine tradition du tourisme funéraire.

Tombe de Jim Morrison (1943-1971) 
Division 6, rangée 2, allée 5

Cimetière Père Lachaise
Entrée principale : 8 boulevard de Ménilmontant - Paris 20
Horaires d’ouverture :
- De novembre à mi-mars : du lundi au vendredi de 8h à 17h30 - le samedi de 8h30 à 17h30 - le dimanche et les jours fériés de 9h à 17h30 
- De mi-mars à octobre : du lundi au vendredi de 8h à 18h - le samedi de 8h30 à 18h - le dimanche et les jours fériés de 9h à 18h 



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.