Ailleurs : Villa Broet ou Griselidis, maison du Second Empire sur le front de mer à Deauville

Villa Broet et Villa Love vers 1911 

La Villa Broët, puis Griselidis, à Deauville, édifiée en 1871, témoigne de l'éclectisme architectural prisé sous le Second Empire. Ernest Saintin (1848-1892), architecte municipal, signe ici une villa atypique du front de mer entre le boulevard Cornuché et la rue Jean Mermoz. Élève de Blondel et Beaujard, il fait ses débuts en 1870 en réalisant des maisons bourgeoises pour la nouvelle station balnéaire normande. Il poursuit toute sa carrière entre Deauville et Versailles. Son style puise dans le vocabulaire néo-gothique et anglo-normand.

Proche du banquier Armand Donon (1812-1902), associé dans la création du nouveau Deauville, au duc Charles de Morny (1811-1865) et du docteur Joseph-Francis Olliffe (1808-1865), Jules Henri Louis Tenré (1819-1895), banquier, père du peintre Henry Tenré (1854-1926), fait l'acquisition de la parcelle en 1871. Il charge Ernest Saintin de la construction.

Pignons à redents inspiré de l'architecture flamande de la Renaissance, bow-windows, bandes de briques colorées, la villa Griselidis associe les inflexions régionalistes et les références historicistes. Un large portique forme une terrasse à l'étage. La villa, remarquée, figure dans l'un des numéros de 1873 du Moniteur des architectes. Revendue à un certain Monsieur Broet, bourgeois amateur de courses hippiques, la villa prend par la suite le nom de Griselidis, en référence à la nouvelle en vers de Charles Perrault, "La Marquise de Salusses ou la Patience de Griselidis" publiée en 1691.




À la fin du XIXe siècle, les stations balnéaires dédiées aux loisirs se développent sur les côtes françaises. Mode venue d'Angleterre, les bains de mer sont dans l'air du temps. Sous le Second Empire, l'idée de déplacer les stations thermales sur le littoral séduit. Ce mouvement lance la construction de nouveaux lieux de villégiature, sites d'invention architecturale où s'exprime une grande créativité grâce aux innovations techniques et esthétiques.

La station balnéaire de Deauville voit le jour à partir de 1859, dans le prolongement de l'ancien village de Dosville perché sur le Mont Canisy. Sous l'impulsion du duc Charles de Morny, demi-frère de Napoléon III, associé avec son médecin personnel le docteur Joseph-Francis Olliffe, son banquier Armand Donon et l'architecte Desle-François Breney, une nouvelle ville nait sur les terrains libérés par l'assèchement des marais. La construction du front de mer débute à partir de 1860. Commanditées par les aristocrates et les grands bourgeois des cercles parisiens et internationaux, de nombreuses villas prestigieuses surgissent des sables. 

À la chute de Napoléon III, Deauville connait un désamour de la part des villégiaturistes. Il faut attendre les années 1910 et les interventions du maire Désiré Le Hoc (1851-1919) et de l'entrepreneur Eugène Cornuché (1867-1926), fondateur du Casino de Deauville et des hôtels Normandy et Royal, pour que la cité normande retrouve lustre et rayonnement. Les villas du Second Empire sont partiellement remplacées à cette époque par des constructions plus modernes au style anglo-normand. 




Aujourd'hui, Deauville est placé, depuis mars 2005, en Zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, dispositif moins contraignant qu'une inscription aux Monuments historiques. Le secteur où sont localisés 555 bâtiments patrimoniaux se trouve ainsi protégé de la pression foncière. Depuis 2015, l'Aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine de Deauville a succédé à la ZPPAUP.

Villa Broet ou Griselidis
7 boulevard Eugène Cornuché - 14800 Deauville



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.