Rebeka et Pauline se rencontrent, tombent amoureuses et vivent une belle histoire. Rebeka, musicienne, chanteuse et DJ, tourne dans le monde entier, multiplie les concerts, les projets, les sets dans les clubs les plus pointus. Lors d'un voyage au Mexique, Pauline découvre une grosseur anormale sous son sein gauche. Une épidémie dans le village où les deux femmes séjournent, détourne leur attention. Elles n'y pensent plus. Lors de leur retour en France, bien plus tard, Pauline subit une série d'examens et le diagnostic est terrifiant. Une forme agressive de cancer du sein.
Compositrice, DJ, fondatrice des groupes Sexy Sushi, Mansfied.TYA, Kompromat, Julia Lanoë alias Rebeka Warrior livre un récit sincère, déchirant au sujet de la disparition de sa compagne, emportée par un cancer. Les citations, les références élégantes ponctuent cette chronique intime, lancent des ponts, Edouard Levé, Hervé Guibert, Marc-Aurèle, Jean-Paul Sartre. Le titre est emprunté à une citation d'Anton Tchekhov (1860-1904), dans la pièce de théâtre "La Mouette" (1896), " Toutes les vies, toutes les vies, toutes les vies se sont éteintes". Le récit cathartique embrasse l'expérience intime rendue universelle. L'écriture ciselée, à l'os, déploie des phrases courtes qui vont à l'essentiel.
Rebeka Warrior a attendu le moment juste pour écrire, relater son histoire. La lecture livre de Brigitte Giraud, "Vivre vite", prix Goncourt 2022, lui a permis de trouver la force de se lancer. "Toutes les vies" a été composé lors d'un séjour à la Villa Médicis. La forme littéraire déterminée s'inscrit dans le choix d'un minimalisme inspiré par l'écriture de la chanson, une musicalité, un rythme. Trouvant la bonne distance, l'autrice préserve la pudeur, ne sombre jamais dans le pathos et avec lucidité ne s'épargne pas elle-même. Elle évoque avec sensibilité les doutes, les lâchetés, les trahisons. " Le cancer l’a rendue méconnaissable. Je n’ai plus aucun désir pour elle. Si P lisait ces lignes elle me quitterait probablement. C’est très dur ce que j’écris ici, mais je ne sais pas à qui confier ces horreurs et il faut pourtant que je les formule. Je n’écris pour personne. "
Rebeka Warrior raconte la maladie, la lutte, les espoirs de la rémission. Elle pose des mots sur la tristesse et les souffrances, le vertige de la rechute, les errances médicales, ce que la maladie fait au couple et aux sentiments. Au bout du combat, il y a la résignation, accompagner Pauline dans la mort, dire adieu à l'être aimé tant qu'elle est en vie. Le travail incantatoire de la mémoire permet de surmonter les épreuves et d'exprimer comment d'amante, elle est devenue aidante puis veuve.
Et puis elle dit comment survivre à cette mort et poursuivre le dialogue avec les défunts par l'écriture. Aux étapes du deuil, la colère, le déni, la fugue, s'associe le quotidien d'une artiste, la musique, la nuit nocturne, les fêtes. La seconde partie, après le deuil, évoque la quête spirituelle, les premiers stades de la résilience, les drogues psychédéliques, l'ayahuasca et les rituels chamaniques, la pratique du zazen, la méditation et la conversion au bouddhisme
Toutes les vies - Rebeka Warrior - Éditions Stock
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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