Emilie fête son vingt-cinquième anniversaire de mariage avec Marc. Absorbée dans les préparatifs d’une soirée romantique, dîner aux chandelles, lingerie fine et draps en soie, elle fait à peine attention à la page de journal qui enveloppe la bouteille de vin. Son regard tombe sur une petite annonce : « Emilie, Aix 1976. Rejoins-moi au plus vite à Gênes. Dario ». Aussitôt, elle reconnaît dans ce message sibyllin, celui qui fut son amour d’adolescence, le tout premier. Sa présence est requise d’urgence. Sur une impulsion irréfléchie, sans prendre le temps de se changer, ou bien de faire un sac, elle abandonne tout sur place et saute dans la voiture en direction de l’Italie. Sage institutrice de quarante-huit, épouse sans histoire, mère de trois grandes filles qui ont quitté la maison, Emilie mène une vie simple, un peu ennuyeuse. Sur la route elle se remémore les années de lycée à Aix-en-Provence, son enfance austère entre des parents qui ne s’aiment pas, une mère grenouille de bénitier rigoriste, un père démissionnaire, et Christine « la petite grande sœur » trisomique. Elle se souvient du beau Dario, la coqueluche des gamines de l’école. L’adolescent était généreux de sa personne. Et puis il l’avait remarquée. Tandis que l’incompréhension du gentil mari se teinte de colère, que la fille aînée d’Emilie se montre très réprobatrice, elle ne s’explique toujours pas.
L’écriture ciselée colore la psyché de la narratrice avec sensibilité. Véronique Olmi manifeste une profonde empathie, une forme de complicité avec Emilie qu'elle met en scène comme une femme de caractère. Lucide, le personnage pratique avec humour une salutaire autodérision. Le chemin mélancolique qu'elle emprunte révèle la profonde tendresse de l’autrice pour cette héroïne raisonnable qui fait un choix insensé. Elle redonne une chance à la part fantasque de la jeunesse. La nostalgie de cette liberté perdue, de cette profonde innocence renvoie à l’insouciance, l’inconscience heureuse des seize ans. L’escapade lui permet d’échapper aux conventions. Pourtant au bout de ce voyage, elle sait que les retrouvailles sont impossibles.
Véronique Olmi oppose l’idéalisme adolescent aux déconvenues de l’âge adulte sources de désillusions déchirantes. Dario était d’un milieu bourgeois très aisé, Emilie d’une famille plus modeste. A un tout autre moment de leur existence, ils ne se seraient pas rencontrés. Désemparée par le surgissement du souvenir, Emilie hésite entre le désarroi et la douceur ineffaçable du premier amour. Lorsqu’elle atteint sa destination, le dénouement est inattendu. Le roman touche au drame intime des traumas irréparables.
Le premier amour - Véronique Olmi - Editions Grasset - Poche Le Livre de Poche
Enregistrer un commentaire