Cinéma VOD : Made in China, de Julien Abraham - Disponible sur OCS, My TF1, Canal


François, photographe français d’origine chinoise, vit en couple avec Sophie, avocate et bretonne pur beurre. Lorsqu’elle lui annonce une grossesse surprise, il est ravi mais la jeune femme le presse de renouer les liens avec sa famille. Brouillé depuis dix ans avec son père car il a préféré suivre sa propre voie, François a tellement fait abstraction de ses origines qu’il préfère répondre qu’il est adopté lorsque des inconnus en viennent à l’interroger. Pour renouer avec ses proches perdus de vue, il retourne dans le quartier de son enfance, le XIIIème arrondissement de Paris. Soutenu par Bruno, son meilleur ami, sympathique gaffeur, il affronte le sentiment d’être étranger à sa propre communauté. Si la tante Fa qui a pour lui des attentions toutes maternelles, l’énergique grand-mère Bin, le cousin Félix restaurateur entrepreneur à succès et sa sœur Lisa, béguin d’enfant, l’accueillent à bras ouverts, il n’en est pas de même pour Meng, son père.







Dans la lignée des comédie communautaires, telles que « La vérité si je mens » et « Bienvenue chez les Chtis », Made in China » explore la crise identitaire d’un personnage en plein questionnement sur ses origines Frédéric Chau, co-scénariste avec son complice Kamel Guemra, et rôle principal, puise dans sa propre histoire - né au Vietnam de parents chinois émigrés en France - pour construire un récit. Et pour une fois, l’initiateur du projet possède à la fois la pleine légitimité et l’autodérision nécessaire pour remettre en question les idées reçues. Le personnage du meilleur pote, objet transitionnel appuyé, incarne les pires maladresses, accumule les bévues. Le film déconstruit les clichés et dénonce les préjugés vis à vis de la communauté asiatique de France victime de discrimination, objet de moquerie et de caricature offensante très largement répandue mais également très peu reconnue comme telle.

Le message important, soutenu par une profonde bienveillance, loupe néanmoins le coche. Les bonnes intentions évidentes n’échappent pas au formatage. L’oeuvre au propos consensuel, policé à l’extrême au point d’en avoir ôté toute aspérité, patine sur un politiquement correct assez fade.  Tiède dans ses audaces, timide dans sa réflexion, le long-métrage réserver néanmoins quelques jolies scènes d’émotion, notamment au sujet des relations père-fils, les non-dits. « Made in China » ausculte les divergences entre la première génération arrivée en France et la deuxième qui y est née. François, fils d’immigrés qui a renoncé à la culture de ses parents, se remet en question à l’annonce d’une grossesse, tiraillé par un désir de filiation. 



Les dialogues naviguent sur un plan particulièrement lisse mais laissent tout de même transparaître un sens certain de la comédie, du comique de situation. Le réalisateur Julien Abraham signe un film joyeux exempt d'ambitions esthétiques. L’utilisation de drones pour saisir tout le grandiose brutaliste de la dalle des Olympiades dont je vous parlais ici manque d’originalité. 

Les développements attendus de scènes disparates donnent naissance à des situations prévisibles. Repas de famille, mariage traditionnel, karaoké, les retrouvailles au demeurant charmantes grâce à certains seconds rôles comme la grand-mère font place à des interactions artificielles montées en graine. Le récit peine à s’incarner. Les personnages secondaires sont peu approfondis malgré leur intérêt. Certains se révèlent même particulièrement attachants comme le père et ses difficultés à exprimer des émotions. 

Film divertissant, « Made in China » joue sur les ressorts classiques de la comédie française, au fil d’une intrigue sans prétention ultra-balisée qui ne renie pas sa part de candeur. Les thèmes forts de l’identité, des racines, du mode de vie, du concept même de communauté, auraient mérité plus d'ampleur et de sagacité. 

Made in China, de Julien Abraham
Avec Frédéric Chau, Medi Sadoun, Julie de Bona, Steve Tran
Sortie le 26 juin 2019
Disponible en VOD et streaming sur OCS, My TF1, Canal VOD, Orange



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.