Ni d'Eve, ni d'Adam - Amélie Nothomb : Belge née à Kobe, Amélie a quitté le Japon à l’âge de cinq ans. Quinze années plus tard, elle retourne dans sa patrie de cœur, rêvant de devenir une vraie japonaise. Afin de perfectionner sa pratique de la langue japonaise, elle imagine donner des cours de français. Son premier et seul élève est un jeune francophile. Rinri, fils de bonne famille, étudie le français à l’université mais aurait bien besoin de progresser. Alors qu’au fil des rencontres avec Amélie, il s’improvise guide touristique, leurs rendez-vous prennent le chemin d’un certain parcours du tendre tokyoïte, lieux de passages obligatoires des amours naissantes. Séduit par la différence d’Amélie, Rinri, qui est lui-même assez extravagant, s’éprend follement de la jeune femme. Mais elle ne parvient pas à tomber amoureuse d’un être si gentil, si totalement dépourvu de mauvaises intentions, incapable de faire le mal. Elle l’aime bien.
Ni d’Eve ni d’Adam revient sur la période japonaise qu’Amélie Nothomb évoquait dans Stupeur et tremblements, récit de sa déchéance au cœur d’une grande entreprise japonaise, de traductrice à dame pipi. Avec fantaisie et finesse, l’auteure nous parle du choc des cultures. A travers la découverte d’un Japon intime, elle évoque une société nippone ultra-codifiée, hermétique pour les occidentaux, des rapports humains normés à l’extrême. Malentendus linguistiques, quiproquos réjouissants ponctuent un récit qui ne boude pas un certain burlesque dans la mise en lumière des décalages. Malgré son désir d’appartenance, son identification à la culture nippone, cette nostalgie au parfum d’enfance qui la tenaille, la narratrice peine à se glisser dans le kimono rigoureux de la parfaite japonaise.
Dans ce texte tendre et touchant, Amélie Nothomb s’interroge avec lucidité et humour sur la nature du sentiment amoureux. Rinri tout de douceur et de gentillesse semble peut correspondre à la dimension masochiste du concept occidental d’amour. Roman initiatique dans la veine autobiographique, Ni d’Eve ni d’Adam a néanmoins le goût des contes. Amélie Nothomb maîtrise l’art de réenchanter le quotidien. Elle distille le merveilleux dans les scènes les plus anodines. Sous sa plume, les personnages fantastiques de la culture japonaise, telle Yamamba la sorcière des montagnes, viennent habiter le monde des hommes. Partageant son sentiment d’éblouissement face à la beauté, celle de la nature, des êtres, des âmes, la romancière invente par la poésie de ses mots des moments de grâce délicieux. Une merveille d’esprit et de délicatesse.
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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