Cinéma : Dans les bois, documentaire de Mindaugas Survila



Au fin fond des dernières forêts primaires de la Baltique, une nature sauvage préservée vit au rythme des saisons. Deux blaireaux jouent ensemble. Une délicate araignée traverse précautionneusement les dernières neiges. Une famille de chouettes rares s’abrite au creux d’un arbre. Un inquiétant serpent rampe en silence vers une minuscule souris. Au nid, des cigogneaux se repaissent d’un repas de grenouilles. Les loups rejoignent leur grotte. Des coqs de bruyère rivaux s’affrontent à la saison des amours. Et à la nuit tombante, la danse des lucioles éclaire les bois d’une lueur féerique.






Documentaire animalier tourné en Lituanie, Dans les bois est le second long métrage de Mindaugas Survila, qui fut l’assistant de Šarūnas Bartas et Sergei Loznitsa. Le réalisateur passionné depuis l’adolescence par la forêt, a étudié la biologie puis le management écologique avant de se tourner vers le cinéma. A travers ce film, il associe ses deux passions et rend un hommage aux dernières forêts primaires européennes menacée par l’exploitation forestière illégale. 

Celles-ci, jamais exploitées par l’homme ni même modifiées pour l’agrément, recèlent une biodiversité d’une richesse unique. Cette balade poétique présente de nombreux animaux rares, en voie d’extinction. Le long-métrage qui ne s’attarde pas sur une espèce en particulier évite l’écueil de l’anthropomorphisme.






Au plus près des animaux, Mindaugas Survila capte l’essence de cette préservée mais fragile dans une expérience sensorielle immersive. La beauté de ce monde hors du temps menacé d’engloutissement par nos sociétés modernes fascine d’autant que ce film contemplatif et onirique répond à un parti pris ambitieux. Sans commentaire en voix off, ni musique, le documentaire n’a pour bande son que les bruits de la nature. 

Les cris des oiseaux se mêlent aux bruissements des insectes alors qu’un lointain trottinement sur un tapis de feuille se fait entendre. Atypique par son minimalisme, le film tourné en Cinémascope affirme un point de vue esthétique et artistique. Le réalisateur a effacé tout élément extérieur afin d’immerger le spectateur dans la vie des bois. La grâce de la nature intouchée possède une dimension onirique. Splendeur des images.





La technologie se fait le plus discrète possible. Les prises de vue ont été réalisées avec du matériel créé spécialement pour le documentaire. Le montage alterne les images en caméra subjective au plus près d’une intimité animale, donnant cette sensation d’être couché dans l’herbe à observer les animaux comme enfant nous observions la vie des fourmis, avec les images prises de loin qui les replacent dans leur environnement. La patience des équipes de tournage, le jeu de cache-cache auquel elles se sont prêtées ont permis d’approcher les animaux sans les déranger, sans leur faire peur. Chacun a dû s’adapter au rythme de la nature afin de saisir le ballet des espèces diurnes qui font place aux créatures nocturnes. 

Le fruit de cette aventure de huit ans dont quatre ans de tournage, a déjà été recomposé par le prix du meilleur son et de la meilleure photographie de l’Académie lituanienne du film et le prix du jury du Festival du film de nature de Matsalu.

Dans les bois, documentaire de Mindaugas Survila
Sortie le 6 mars 2019



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.