Tout un été sans Facebook - Romain Puértolas : A New York, Colorado, il ne se passe rien. Dans ce coin reculé des Etats-Unis, 150 habitants, 198 ronds-points, les téléphones portables ne captent pas et la couverture internet n'a toujours pas été envisagée. Pas un criminel. La quiétude est à peine troublée par le même automobiliste qui grille l'unique feu rouge à chaque fois qu'il conduit sa femme sur le point d'accoucher à la maternité. Au commissariat local, sponsorisé par les donuts Trou Divin, la brigade dont les deux activités principales sont l'organisation de la journée annuelle de chasse aux écureuils radioactifs et la recherche de Jean-Paul II, le chat fugueur d'une vieille dame, passe le temps comme elle peut. Alors que le commissaire s'adonne à la pêche, le reste des effectifs s'est organisé en clubs, club de tricot, club de fléchettes et concours de rot. Agatha Crispies, jeune inspectrice mutée de la Grosse Pomme vers ce bled paumé pour des raisons disciplinaires, tient quant à elle, avec peu de succès, le club de lecture. Passionnée de littérature et de donuts au chocolat, elle rêve de tomber sur le cas improbable qui lui permettrait de briller par ses talents d'enquêtrice et de retrouver la civilisation. Un meurtre épouvantable vient enfin troubler la quiétude de la petite ville. Le corps de Peter Foster est retrouvé dans sa baignoire criblé de 150 coups d'aiguille à tricoter, la porte de la salle de bain fermée de l'intérieur. Agatha Crispies tient enfin l'opportunité de mettre à profit sa méthode d'investigation par libre-association mise au point par son père, héros du NYPD. A moins que le shérif Donald MacDonald ne tente de lui voler son affaire sous le nez.
Polar fantaisiste librement inspiré des œuvres de la reine du genre, Agatha Christies, Tout un été sans Facebook détourne les codes du roman policier pour notre plus grand bonheur. Alors que l'héroïne de ce pastiche burlesque, "Whitney Houston après un régime cassoulet et un relooking extrême par Bananarama" doit faire face à des meurtres aussi décalés qu'inventifs, Romain Puértolas rend hommage aux livres et à la littérature dans une déclaration d'amour qui s'étend de Tolstoï à Joël Dicker dont on retrouve le double de fiction en train d'écrire dans une cabane au fond de la forêt, jusqu'à Margaret Mitchell, l'auteur d'Autant en emporte le vent. Seul l'Ulysse de James Joyce échappe à cette ode dans un gimmick de détestation tout à fait savoureux.
De trouvailles hilarantes en bons mots cocasses, Romain Puértolas nous raconte des histoires dingues avec la verve fantaisiste qui le caractérise. L'univers loufoque du romancier à qui l'on doit notamment "L'extraordinaire histoire du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea" trouve dans une Amérique profonde pas piquée des hannetons, un terreau fertile en cocasserie. Sens de la formule, patronymes improbables, disparitions de bûcherons et assassinats sanglants, Tout un été sans Facebook est une fable drolatique pétillante, parfaitement immorale, au charme irrésistible.
Tout un été sans Facebook - Romain Puértolas - Editions Le Dilettante
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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