Cinéma : American Hero, de Nick Love - Avec Stephen Dorff et Eddie Griffin - Par Didier Flori



Lucille (Eddie Griffin) parcourt dans son fauteuil roulant les rues de la Nouvelle-Orléans, à la recherche de son ami, un dénommé Melvin (Stephen Dorff). Une équipe de tournage le suit avec l’intention de faire un film sur ce dernier, devenu une curiosité locale. Voilà comment nous est préparée l’apparition du “american hero” du titre, et même si l’on apprend que Lucille recherche Melvin parce qu’il a rendez-vous au tribunal pour la garde de son enfant, on s’attend quand même à une rencontre exceptionnelle. Finalement on est loin d’être impressionnés par le trentenaire vieillissant découvert ivre mort dans un terrain vague.






La désacralisation des héros américains n’a plus grand chose de surprenant dans le paysage cinématographique contemporain, et les super-héros en ont fait les frais de Kickass au récent Deadpool. Mais Nick Love parvient à piquer notre curiosité pour cette nouvelle itération, dans une démarche réaliste de faux documentaire qui évoque l’expérience de “found footage” super-héroïque du convaincant Chronicle de Josh Trank. Ici, le cinéaste opte pour une visée plus sociale et politique, imaginant l’apparition de pouvoirs surnaturels chez un laissé-pour compte de la société américaine. L’introduction efficace du film nous rend Melvin très vite sympathique, par sa dimension de loser tentant vainement de reprendre sa vie en main.






American Hero est à son meilleur dans les scènes où se rencontrent contexte social réaliste et merveilleux fantastique. Une femme âgée fait ainsi le récit de son expérience de l’ouragan Katrina avant de décrire la bonne action de Melvin qui a réparé sa maison grâce à ses pouvoirs ; l’antihéros fait voltiger gracieusement Lucille dans un numéro de rue, sous les yeux des passants ébahis. Malheureusement le film s’enlise lorsqu’il décrit la spirale autodestructrice de son personnage principal, notamment dans des fêtes arrosées à répétition filmées sans grande inspiration. Melvin semble passer une grande partie du métrage à stagner, se voyant refuser ou renonçant à sa rédemption sur un schéma narratif sans surprise, et le film finit par faire du sur-place.




Nick Love nous offre quelques beaux moments de mise en scène, mais ce manque de progression narrative, combiné à une structure trop lâche qui se disperse dans des éléments souvent peu exploités, empêchent le réel enthousiasme face à American Hero. Saluons tout de même la belle énergie que les acteurs apportent à ce film bancal. Stephen Dorff incarne parfaitement les contradictions d’un personnage à la fois irritant et attachant, cynique et sensible, tandis que la verve comique d’Eddie Griffin est imparable.

American Hero de Nick Love 
Avec Stephen Dorff, Eddie Griffin, Luis Da Silva Jr. et Christopher Berry
Sortie le 8 juin 2016

Cinéphile averti, Didier Flori est l’auteur de l’excellent blog consacré au cinéma Caméra Critique que je ne saurais trop vous conseiller. Egalement réalisateur et scénariste, c’est avec ferveur qu’il œuvre dans le cadre de l’association Arte Diem Millenium qui soutient les projets artistiques de diverses manières, réalisation, promotion, distribution… Style ciselé, plume inspirée et regard attentif, goûts éclectiques et pointus, ses chroniques cinéma révèlent avec énergie toute la passion pour le 7ème art qui l'anime.