La Butte Bergeyre, secret bien gardé de Parisiens avertis, est une curiosité perchée au sommet d’un triangle formé par la rue Manin à l’est, l’avenue Simon Bolivar au sud et l’avenue Mathurin-Moreau au nord. A l’ouest des Buttes Chaumont, préservé des regards par des constructions datant de 1930, ce minuscule quartier accroché à flanc de colline sur une butte escarpée et verdoyante joue à cache-cache avec les promeneurs. L’accès sportif se fait par deux escaliers abrupts l’un au sud-est débouchant côté Bolivar, 75 marches immortalisées en 1950 par Willy Ronis, l’autre à l’ouest l’escalier de la rue Michel-Tagrine pas moins de 85 marches. L’incroyable vue panoramique de la Tour Eiffel à Montmartre depuis le plateau qui culmine à 100 mètres d’altitude, est à ce prix. Courage amis flâneurs !
Une fois le sommet de ce nid d’aigle atteint, se dévoile un pittoresque petit village de 1200 habitants et 457 boîtes aux lettres. Maisons de ville, immeubles mitoyens, coquets pavillons sont disposés le long de ruelles pavées sinueuses et de lacets pentus. L’architecture hétéroclite mêle avec harmonie brique, pierre de meulière, béton années 50 et colombage fantaisiste. La glycine et la vigne vierge parent les façades de leur abondant feuillage. A l’automne, les flamboyances végétales colorent d’or et de pourpre ce paysage urbain insolite.
Les jardins de la Butte Bergeyre, enclave communautaire précieusement entretenue par les riverains, voient fleurir de tardives roses et quelques fleurs des champs. Les abeilles de la butte calfeutrées dans leurs ruches se préparent à passer l’hiver. Les vignes du clos des Chaufourniers ont été vendangées depuis longtemps mais quelques grappes sauvages folâtres encore sous le ciel grisonnant de novembre. Ce micro domaine viticole produit environ 100 litres de vin par an.
Les jardins de la Butte Bergeyre, enclave communautaire précieusement entretenue par les riverains, voient fleurir de tardives roses et quelques fleurs des champs. Les abeilles de la butte calfeutrées dans leurs ruches se préparent à passer l’hiver. Les vignes du clos des Chaufourniers ont été vendangées depuis longtemps mais quelques grappes sauvages folâtres encore sous le ciel grisonnant de novembre. Ce micro domaine viticole produit environ 100 litres de vin par an.
Longtemps désignée comme la vieille butte, l’appellation butte Bergeyre n’apparaît sur aucun cadastre ni aucun document officiel, c’est l’usage qui lui aura réservé ce nom. Au XVIIème siècle, moulins à vents et pâturages occupent les pentes vallonnées de la Butte Chaumont, au singulier pour le moment. Le développement des carrières de gypse, la pierre à plâtre, creuse des galeries souterraines dans tout le plateau et entraîne, dès la fin du XVIIIème, du fait des effondrements de terrain, la démolition des moulins.
La Butte Chaumont est aménagée en espace vert de 1863 à 1867 par l’ingénieur Adolphe Alphand et l’architecte paysagiste Pierre Barillet-Deschamps qui découpent la colline en deux buttes. L’éperon ouest du massif rocheux est séparé par le percement de la rue Manin détachant de l’ensemble ce qui deviendra la Butte Bergeyre. Pendant près de quarante ans la petite sœur des Buttes Chaumont est laissée à l’abandon entre le terrain vague et la pâture, quelques amuseurs venant y faire commerce de nouveaux spectacles avec les balbutiements du kinétographe.
En 1905, le philanthrope baron Adolphe de Rothschild y fait construire un hôpital moderne, un centre ophtalmologique que l’on connait. Sur le flanc de la butte côté Bolivar, ouvre vers 1908 un parc d’attraction dénommé les Folles Buttes. Manèges, chalets de curiosité et même music hall, restaurant dès 1910, divertissent le bon peuple de Paris.
Du fait des anciennes carrières imparfaitement comblées qui minent les sous-sols le haut de la butte reste longtemps en friche. Sous l’impulsion du Sporting Club Vaugirard, le Stade Robert Bergeyre, du nom d’un jeune joueur de rugby mort au combat en 14, est inauguré en août 1918. Haut lieu sportif, il accueille des matches de football et des épreuves d’athlétisme pour les JO de 1924. Mais dès 1925, le stade trop onéreux à entretenir doit être démoli.
La famille de Gaston Sigrand revend le terrain à Charles Pélissier riche entrepreneur qui découpe le sommet de la butte en 220 lots de 100 à 1500 m2 et trace les cinq rues qui existent encore. Elles ont aujourd’hui pour nom : Georges-Lardennois, Philippe-Hetch, Barrelet-de-Ricout, Edgar-Poe, Rémy-de-Gourmont. Les travaux de consolidation et de sécurisation des sols durent jusqu’en 1930 même si le lotissement est inauguré en 1927.
Dans le même temps, la SGPI - Société Générale Parisienne Immobilière - construit les hauts immeubles qui entourent la butte du 1 au 17 rue Manin et du 50 au 62 avenue Simon Bolivar selon des plans de l’architecte Georges Planche. Les travaux se terminent en 1930 donnant à la Butte Bergeyre ses allures d’ilot mystérieux soustrait aux regards.
De nombreux artistes, peintres, aquarellistes, écrivains y ont élu domicile depuis les années 1930. Marcel Mouloudji a évoqué la butte avec poésie dans certains de ces écrits et chansons. Parmi les célèbres riverains contemporains - un peu de name-dropping, allons donc ! - on a pu croiser le danseur étoile et directeur du ballet de Paris Patrick Dupond, le designer Marc Newson, Jean-Paul Goude graphiste photographe réalisateur extraordinaire, le comédien Clovis Cornillac, le réalisateur Jacques Audiard. La Butte Bergeyre, c’est très chic mais comme elle n’a pas tourné le dos à ses origines populaires, les promeneurs y sont accueillis chaleureusement. Un petit coin de paradis, une échappée belle à travers le temps.
Butte Bergeyre
Accès sud-est au niveau du 54 avenue Simon Bolivar - Paris 19
Accès ouest rue Mathurin-Moreau puis rue Georges-Lardennois ou par l’escalier de la rue Michel-Tagrine - Paris 19
Métro Buttes Chaumont ligne 7bis
Sources :
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