Plonger - Christophe Ono-dit-Biot : César, ancien grand reporter, journaliste épris d’art, raconte à son fils qui était sa mère, une photographe solaire, éprise d’absolu dont le corps sans vie a été retrouvé sur une plage de l’Océan Indien. Il couche sur le papier leur histoire d’amour, leur rencontre, la passion, la venue au monde d’un enfant et la rupture, il écrit avant que les souvenirs se fanent, avant que les images ne se délavent, que les sentiments ne sombrent dans l’oubli. César a beaucoup voyagé. Il a vu du monde ses beautés et ses horreurs côtoyant de trop près la mort. Il n’a plus envie de partir alors que Paz suffoque et rêve de parcourir le globe. Elle ne désire pas juste quitter l’Europe, elle cherche l’animalité, le retour aux instincts.
Le narrateur mène une enquête sur la mort de cette femme, son grand amour. Au sommet de sa carrière, Paz se retire, part loin de la France et de la vieille Europe, abandonnant son mari et son fils pour plonger dans les profondeurs de l’océan, au cœur du monde animal au plus près des requins, figure mystique, totémique, présence mystérieuse qui hante les abysses, expression brute de la nature, un animal qui remonte à la nuit des temps et qui n’a pas évolué depuis des milliers d’années.
Christophe Ono-dit- Biot suit la quête de ses deux personnages, Paz et César qui chacun à leur manière cherchent à revenir à l’essentiel. Pour la photographe, cela passe par un besoin de purification à laquelle le monde du silence lui donne accès. En plongeant à la fois dans les profondeurs du milieu marin et en soi, elle atteint une certaine forme d’ascension spirituelle. Tandis que pour César l’essentiel se révèle avec la naissance d’Hector, l’amour, la paternité, la filiation et la transmission grâce au récit.
Généreux et érudit, Plonger se pose également comme une réflexion sur le monde contemporain, la place de l’art comme objet d’élévation intellectuelle et métaphysique susceptible de préserver la fragilité de la vie. Dans ce roman, on retrouve en pointillé, comme un jeu de piste, les obsessions de l’auteur notamment l’élément aquatique dont il célèbre les beautés, la séduction, les voyages au bout de la Terre, le Mont Athos, la Birmanie et les clins d’œil appuyés à son propre parcours professionnel. Alors qu’il a opté pour un retour à un style plus classique sans pour autant perdre sa modernité, Christophe Ono-dit-Biot pratique toujours un certain humour, assagi peut-être, certainement un peu plus désabusé. D’une plume sensible et sensuelle, entre pulsion de vie et instinct de mort, il remonte le fil d’une histoire d’amour dans une époque qui ne se prête pas aux grands sentiments. Un beau roman profond et émouvant.
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