Paris : Square Lamartine à Passy, son hommage au poète, son puits artésien - XVIème


Le square Lamartine, situé entre les avenues Victor Hugo et Henri Martin, modeste espace vert se distingue par une fontaine à l'allure plutôt anodine mais très appréciée des riverains. Alimentée par un puits artésien foré entre 1855 et 1861, en accès direct à la nappe phréatique préhistorique de l'Albien, elle dispense une eau peu minéralisée, non calcaire, non chlorée, ferrugineuse et réputée pour de supposées vertus thérapeutiques. Ce dispositif participe d'ailleurs du plan de secours d'approvisionnement en eau potable de Paris sous la direction de la SAGEP. 







Créé sous le Second Empire, sous le nom de square Victor Hugo du fait de sa proximité avec l'avenue éponyme, le futur square Lamartine ouvre en 1863, absorbant la portion Sud de la rue Spontini. La dénomination actuelle rend hommage à Alphonse de Lamartine (1790-1869), poète, romancier, homme politique, un temps résident dans le voisinage du site. À la fin de sa vie, ruiné, la municipalité favorable à ses idées, sensible à son art, lui prête une main secourable. La Ville de Paris met à sa disposition, en 1860, un chalet, aujourd'hui disparu, qui se trouvait à hauteur des actuels numéros 103 - 107 avenue Henri Martin. 

À l'entrée du square, se trouve une statue de Lamartine, œuvre de Paul Niclausse (1879-1958). Inaugurée en 1951, elle remplace un Monument à Lamartine antérieur, bronze réalisé par Anatole Marquet de Vasselot (1840-1904). Celui-ci représentait le poète assis dans un fauteuil, un chien lévrier à ses pieds. Officiellement dévoilée le 7 juillet 1886, au sein du square Victor Hugo, futur square Lamartine, cette œuvre, réquisitionnée, est fondue lors de l'Occupation allemande. La prise de ces dispositions fait suite à la promulgation de la loi du 11 octobre 1941, par le gouvernement de Vichy, concernant l'enlèvement des statues métalliques en vue de la récupération de métaux non ferreux.

Plus loin, un buste du compositeur Benjamin Godard (1849-1895) de 1906, signé Jean-Baptiste Champeil (1866-1913), tourne le dos à l'espace vert, absorbé dans la contemplation de la rue. Une stèle de verre a été placée au coeur du square Lamartine en mémoire des enfants juifs en bas-âge du XVIème arrondissement, assassinés durant la Seconde Guerre Mondiale.  







Sous le Second Empire, le baron Haussmann (1809-1891), préfet de la Seine, préside à la modernisation de la Capitale souhaitée par Napoléon III. Eugène Belgrand (1810-1878), ingénieur général des Ponts et Chaussées, directeur du service des eaux de Paris depuis 1854, supervise, dans ce cadre, les adductions de la Dhuis et de la Vanne, la création du réservoir de Montsouris, des réservoirs de Passy et lance la construction des égouts de Paris. Le succès du puits artésien de Grenelle, foré entre 1833 et 1841, fait des émules. Un projet de puits à Passy voit le jour le 23 décembre 1854. Belgrand confie l'entreprise à l'ingénieur Charles Gosshelf Kind. Le chantier débute le 15 septembre 1855 et après de nombreux incidents, s'achève en 1861 en atteignant la profondeur de 587 mètres. Si le dossier originel proposait la création d'une tourelle de fonte surmontée d'un phare, la situation géographique en hauteur de la butte de Passy, suffisante, permet de ne réaliser qu'un simple bassin bordé d'enrochements artificiels. 

Le point d'eau doit entretenir les flots des rivières et lacs du Bois de Boulogne. À la suite de la mise en service du puits de Passy, le 24 septembre 1861, le débit du puits de Grenelle baisse soudainement. Ce phénomène manifeste de la présence d'une seule et unique nappe aquifère albienne étendue sous toute l'Ile-de-France. Jusqu'alors les scientifiques en présupposaient plusieurs distinctes. 

L'actuel édicule, réalisé sur les plans de l'architecte Dupuis, a été réalisé à la fin des années 1950 puis restauré en même temps que le puits en 1994. Le délabrement du puits, faute d'entretien, altère sa production. Le débit de 17 000 m3 lors des premières années chute à 2 000 m3 en 1980. Jacques Chirac (1932-2019), alors maire de Paris, en valide la rénovation achevée en 1994 qui porte sa profondeur à 647 mètres. 

Square Lamartine et son puits artésien
Accès 70 avenue Henri Martin / 189 avenue Victor Hugo - Paris 16
Métro Rue de la Pompe ligne 9



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 

Bibliographie
Dictionnaire historique des rues de Paris - Jacques Hillairet - Éditions de Minuit
Le guide du promeneur 16è arrondissement - Marie-Laure Crosnier Leconte - Éditions Parigramme