Expo Ailleurs : Jean Hugo. Entre ciel et terre - Musée Paul Valéry - Sète - Jusqu'au 13 octobre 2024

 

Jean Hugo, artiste singulier méconnu dans l'Hexagone mais exposé aux États-Unis à la Barnes Foundation aux côtés de Cézanne et Renoir, fait l'objet, durant tout l'été 2024, d'une saison hommage en Occitanie. Trois expositions célèbrent l'oeuvre de cette personnalité attachante, trois volets déclinés au Musée Fabre de Montpellier, au Musée Médard de Lunel et au Musée Paul Valéry de Sète. La coopération inédite a été initiée dans le cadre de la candidature de Montpellier au label Capitale européenne de la culture 2028. Cet ensemble d'événements prend la relève des dernières rétrospectives importantes consacrées à Jean Hugo, Toronto en 1973, Sète en 1974, Paris 1976, Montpellier en 1978 et 1995.

Sous le double commissariat de Stéphane Tarroux, directeur du Musée Paul Valéry et d’Ingrid Junillon, conservatrice du patrimoine au Musée Paul Valéry, l'exposition "Jean Hugo. Entre ciel et terre" rend compte de son attachement profond, viscéral aux paysages, à la nature et ses splendeurs. Artiste hors catégorie, ses paysages témoignent d'un style à "la naïveté construite" où se lisent les influences du primitivisme italien, du surréalisme, du réalisme magique, ou encore de Pablo Picasso, du Douanier Rousseau, de Francis Picabia. Jean Hugo développe une approche spirituelle de la nature, généreuse, foisonnante dont il cherche à percer les mystères. Ses oeuvres traduisent plastiquement une vision onirique. Succession des saisons, travail des paysans, la vie des bêtes, les paysages de Jean Hugo exaltent un ordre divin du monde, idyllique, un temps suspendu. Il représente un paradis perdu menacé par la modernité, le progrès technique. Lors de longues marches, cet inlassable promeneur capture sur le motif les impressions, observations sensorielles. Provence, Cévennes, Languedoc, Aveyron, Camargue, Côte d'Azur, Bretagne et Normandie, Espagne notamment la Catalogne, Angleterre où vit une partie de sa famille, Jean Hugo traduit l'harmonie des paysages, une plénitude spirituelle. 









Jean Hugo appartient à une longue lignée d'artistes et d'intellectuels. Arrière-petit-fils de Victor Hugo et de Pierre-Frédéric Dorian, maître de forges et ministre des Travaux publics du gouvernement de la Défense nationale, il est également le petit-fils du journaliste Charles Hugo et d'Aline Ménard-Dorian. Salonnière, dreyfusarde, proche de Jaurès, Kerensky, Proust ou encore Anatole France, elle s'illustre en devenant vice-présidente de la Ligue des droits de l'Homme et secrétaire générale de la Fédération internationale des droits de l’Homme. Fils du peintre Georges Hugo dit Georges Victor-Hugo et de Pauline Ménard-Dorian, Jean Hugo est également le demi-frère de François Hugo, orfèvre, spécialiste des bijoux d’artistes, réputé pour ses collaborations avec Pablo Picasso, Max Ernst, Coco Chanel, Jean Cocteau. Ses enfants de Jean Hugo perpétuent, aujourd'hui, la tradition. 

Autodidacte, Jean Hugo est marqué par ses échanges avec les avant-gardes. Sa pratique se nourrit de ses rencontres, ses amitiés avec Pablo Picasso, Francis Picabia, Jean Cocteau, Marie Laurencin, Fernand Léger. Il invente une forme de primitivisme mâtiné de cubisme où s'expriment une approche picturale joyeuse, juxtaposition de plans colorés, traitement des volumes, perspectives bousculées. Prolifique, il produit un important corpus, plus de 1000 peintures, 3000 dessins, collabore aux décors, costumes et mise en scène d'une cinquantaine de pièces de théâtre et ballets. Il publie également deux volumes de Mémoires "Avant d'oublier" (Fayard, 1976) et "Le Regard de la Mémoire (1914-1945)" (Actes Sud 1983).








Après les belles heures de l'Entre-deux-guerres, auprès des cercles parisiens artistiques et intellectuels, années durant lesquels il mène surtout une carrière de décorateur et d'illustrateur, Jean Hugo se retire à partir de 1929 dans son mas de Fourques à côté de Lunel, hérité de sa grand-mère. Dès lors, il se consacre quasi exclusivement à la peinture de paysages. 

S'il reçoit souvent ses amis, il mène néanmoins une existence quasi-monacale. Autour de sa propriété, Jean Hugo élève des moutons et des chevaux, pratique la polyculture, développe un petit vignoble qui produit du muscat, vin naturel avant l'heure. En 1931, il se convertit au catholicisme et se rend désormais tous les jours à la messe. L'année suivante, il divorce de Valentine Gross épousée en 1919, elle-même artiste proche des Surréalistes depuis 1926. Au milieu des années 1930, Jean Hugo fait l'objet d'expositions personnelles à la galerie Pierre Colle. Au cours de la décennie suivante, sa pratique évolue. Il abandonne la gouache pour l'huile, le papier pour la toile. En 1948, Jean Hugo se remarie avec Lauretta Hope-Nicholson (1919-2005), artiste-peintre anglaise. 








Au mas de Fourques, sa production artistique à rebours de ses contemporains, se recentre sur les paysages, création divine parcourue de signes. Jean parcourt la garrigue autour de sa propriété, réalise dessins et croquis sur le vif qui inspirent à l'atelier de petites gouaches qui manifestent son goût pour les petits formats ou de rares huiles plus grandes. Il simplifie les formes, épure des lignes, perspectives bousculées. Il imagine des traitements de la couleur en grands aplats pour rendre compte de la lumière du Sud. Ses scènes intimistes livrent un sentiment de de sérénité.  

Son humilité lui fait choisir la discrétion ce qui pourrait expliquer sa notoriété limitée en France. Les trois expositions occitanes viennent corriger avec poésie cet état de fait. 

Jean Hugo Entre ciel et terre
Jusqu'au 13 octobre 2024

148 rue François Desnoyer - 34200 Sète
Tél : 04 99 04 70 00
Horaires : Du 1er avril au 31 octobre, ouvert tous les jours de 9h30 à 19h - Du 4 novembre au 31 mars, ouvert tous les jours, sauf le lundi de 10h à 18h
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Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.