Ailleurs : Musée d'Art moderne de Céret, une institution culturelle ancrée dans sa région et dans l'histoire des avant-gardes

 

Le Musée d'Art moderne de Céret témoigne des riches heures de la ville, qualifiée par André Salmon de "Mecque du Cubisme", et haut-lieu de création depuis les années 1910. Constituées grâce à la générosité des artistes, les collections reflètent la force des liens entretenus entre les artistes et l'institution. Le Musée de Céret, inauguré en 1950, mène depuis sa création une politique culturelle ambitieuse qui a conduit à un développement de la fréquentation, des fonds et des espaces mêmes. Aux expositions d'envergure internationale s'ajoutent un souci de présentation renouvelée des collections, ainsi que des événements ponctuels tels que conférences, colloques, concerts. Principal musée d'art des Pyrénées Orientales, l'établissement ancre son action dans un territoire et dans son histoire.








En 1910, le peintre Frank Burty Haviland, le sculpteur Manolo Hugué et le compositeur Déodat de Sévérac s'installent à Céret. Rapidement, ils reçoivent leurs amis artistes du Bateau-Lavoir de Montmartre. Entre 1911 et 1913, les figures du cubisme et leurs proches se pressent à Céret : Pablo PicassoGeorges Braque, Auguste Herbin, Juan GrisMax Jacob en 1913, Jean Marchand. Au lendemain de la Première Guerre Mondiale, dès 1919, les artistes de Montparnasse et de la Ruche se joignent à eux : André Masson, Chaïm Soutine, Aristide Maillol. Au cours de la Seconde Guerre Mondiale, une troisième vague d'artistes fuyant les persécutions nazies et les conditions de vie en zone occupée, se réfugient à Céret notamment Tristan Tzara, Jean Dubuffet puis en 1940, Raoul Dufy. Au lendemain de la guerre, Pierre Brune, Pinchus Krémègne et Frank Burty Haviland s'installent définitivement. 

Frank Burty Haviland et Pierre Brune initient un projet de musée à Céret dès 1948. Afin de réunir des collections, ils font appel à la générosité des artistes qui ont séjourné dans la région. Pablo Picasso, en visite chez Pierre Brune à l'été 1953, offre vingt-huit coupelles tauromachiques et Henri Matisse, quatorze dessins préparatoires de la série fauve réalisée à Collioure en 1905. Le fonds originel est complété par la ville laquelle a reçu en don la collection Michel Aribaud (1877-1932), ancien archiviste de la ville, ami des artistes et collectionneur. L'ensemble légué par sa veuve en 1934 comprend des oeuvres de Juan Gris, Auguste Herbin, Moïse Kisling, André Masson, Manolo Hugué. Le musée de Céret est inauguré le 18 juin 1950 dans les murs d'un ancien couvent des Carmes du XVIIème siècle, devenu siège de la maréchaussée et prison au XIXème siècle. 








Pierre Brune décède en 1956. Frank Burty Haviland prend sa succession en tant que conservateur du musée, poste qu'il occupe jusqu'en 1961. La relève est assurée par Augustin Bérard jusqu'en 1964 puis Marc Jansson jusqu'en 1966. L'Association des Amis du Musée de Céret est créée en 1960. L'année 1965 est marquée par la visite théâtralisée de Salvador Dali à Céret. En 1966, des artistes émergents parmi lesquels des figures du groupe Fluxus et du groupe Supports/Surfaces : Arman, Ben, Buren, Vincent Bioulès, Joël Kermarrec, Pierre Buroglio, Niele Tortoni, Michel Parmentier, interviennent dans les rues de Céret à l'occasio d'une série de happenings. 

Claude Massé, conservateur du Musée d'Art Moderne de Céret de 1966 à 1969, ouvre les collections à l'art contemporain et manifeste son soutien aux jeunes artistes avec l'exposition "Impact I", Claude Viallat, l'un des membres fondateurs du groupe Supports / Surfaces en 1969, le critique d'art Jacques Lepage. Le Musée de Céret accompagne les grands mouvements des années 1960-70, dans un souci renouvelé d'encourager et de valoriser les avant-gardes. Georges Badin est nommé conservateur du musée en 1969. Il demeure en place jusqu'en 1986. Sous sa direction, des expositions d'envergure sont montées notamment celle consacrée à Joan Miro en 1977 et organisée à la demande de l'artiste. En 1972, l'exposition "Impact II" réunit Louis Chacallis, Max Charvolen, Christian Jaccard, Noël Dolla, Joël Desbouiges, Fisher, Annette Messager, Patrick Jude.








Une inspection de la Direction des musées de France en 1983, conclut à la nécessité d'une remise aux normes afin de faire face à des problèmes de conservation et de présentation des oeuvres. En 1986, Joséphine Matamoros, la nouvelle directrice, s'attaque à la modernisation et à l'agrandissement du musée. Le concours d'architecture lancé en 1987 distingue le projet formulé par Jaume Freisa et Philippe Pous. Le nouveau bâtiment est inauguré le 17 décembre 1993 en présence du président François Mitterrand. À l'occasion du vaste chantier, les collections sont restaurées et valorisées.

Depuis 1987, la politique d'acquisition du Musée de Céret privilégie les courants et artistes locaux, Sud de la France, Catalogne, notamment les membres du groupe Supports/Surfaces et les grands artistes catalans tels que Antoni Tàpies, Joan Brossa, Perejaume, Tom Carr. Des dépôts d'État - FNAC, MNAM, Musée Picasso - et trois importants dépôts de collectionneurs privés, le critique d’art Pierre Restany, figure du Nouveau réalisme, Yves Michaud, professeur de philosophie et ancien directeur de l’École nationale des Beaux-arts, Jean-Pierre Alis, fondateur de la Galerie Athanor à Marseille viennent compléter un fonds prestigieux. En 1988, l'occasion d'une commande publique, Antoni Tàpies réalise un diptyque mural exposé à l'entrée du musée. Tout au long des années 1990, les artistes eux-mêmes marquent leur attachement au Musée de Céret et à la ville par des dons importants : Claude Viallat, Jean-Louis Vila, Dominique Gauthier, Jacques Capdeville, François Martin, Georges Ayats, Michel Bertrand, Joan Brossa, Joël Desbouiges, Jacques Pineau, Patrick Jude…








Au cours des années 2000, l'envergure prise par le musée implique un changement de statut, acté le 1er janvier 2005, date à laquelle il devient Établissement public de coopération culturelle du Musée de Céret. Il est désormais placé sous la tutelle du conseil général des Pyrénées Orientales, le conseil régional Languedoc Roussillon associés à la commune de Céret. Le projet d'une nouvelle aile voit le jour.

En 2008, une installation de Tom Carr prend place sur les murs extérieurs du musée. L'année suivant, Vincent Bioulès, l'un des membres fondateurs de Supports/Surfaces réalise un décor mural à l'occasion de l'exposition "Céret, un siècle de paysages sublimés 1909-2009". Nathalie Gallissot nommée directrice en 2012, supervise l'agrandissement financé par les collectivités territoriales Région Occitanie, Département des Pyrénées Orientales et ville de Céret. Le chantier de la nouvelle aile édifiée sur les plans du cabinet d'architecture Pierre-Louis Falocci scénographie agence OA Corp Olivier Arnaudo, avec l’appui technique de la société Art Protec – Pierre Susini, débute en octobre 2019. L'exposition "Jaume Plensa. Chaque visage est un lieu" vient célébrer la réouverture du Musée d'Art Moderne de Céret, le 5 mars 2022.

8 boulevard Maréchal Joffre - 66400 Céret
Tél : 04 68 87 27 76
Horaires : Juillet-août tous les jours de 10h à 19h - Du 1er septembre au 30 juin ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.