Ailleurs : Théâtre Molière - Sète, Scène Nationale Archipel de Thau, lieu patrimonial du début du XXème siècle, outil de rayonnement culturel



Théâtre Molière, Scène nationale de Sète et du Bassin de Thau, édifié au début du XXème siècle, inscrit à l'inventaire des Monuments historiques depuis le 26 septembre 2003, accueille chaque année soixante mille spectateurs au cours de plus de cent-soixante représentations. Plus récent des théâtres à l’italienne de l’Hérault, conçu sur le modèle de l'Opéra-comédie de Montpellier, le théâtre municipal de Sète présente une version réduite de la salle montpelliéraine. Les proportions se révèlent considérablement plus modestes : vingt-neuf mètres de façade principale, soixante mètres de profondeur et vingt-cinq mètres de hauteur. 

La façade de style néoclassique répond aux canons antiques, détournés au profit du foisonnement décoratif d'inspiration néo-Renaissance. Colonnes à fût lisse ou cannelés, chapiteaux corinthiens et ioniques, pilastres à chapiteau toscan scandent les volumes. Les grands cartouches des linteaux s'associent à des cartouches à enroulements, ponctués de figures allégoriques de la tragédie et de la comédie. Au premier étage, les baies plein cintre aux écoinçons sculptés, présentent des arcatures encadrées d'anges musiciens, oeuvres d'Auguste Baussan (1829-1907) et André Saurel. Le sculpteur Jean-Antoine Injalbert (1845-1933), également auteur des statues de la promenade du Peyrou à Montpellier, du Pont Mirabeau et du Petit Palais à Paris, signe le programme décoratif de l'attique, et réinvente le masque antique.








Dès 1888, la Ville de Sète, enrichie par l'essor du commerce portuaire, envisage la construction d'un théâtre municipal, symbole de réussite économique et sociale, dans le quartier de la Bordigue, la pêcherie. L'architecte montpelliérain Léopold Carlier (1839-1922) propose un premier projet à ce moment qui ne voit pas le jour. La construction n'est validée par le conseil municipal sous l'influence d'Honoré Euzet (1846-1931) maire de Sète à trois reprises, trois mandats de 1895 à 1901, de 1908 à 1912, de 1919 à 1931, qu'en 1896. Les plans du futur Théâtre Molière, aujourd'hui attribués à l'architecte Antoine Gour (né en 1859), auraient été selon des sources contradictoires, dessinés par Léon Rosiès, architecte municipal de Sète à de 1881 à 1892. Antoine Gour, son assistant et successeur, n'aurait fait que suivre les plans à la suite du départ de Rosiès, en conflit avec Antoine Aussenac maire de Sète de 1888 à 1892. 

Le choix de l'emplacement se porte sur le quartier de la Bordigue, le long de l'avenue de la Gare, actuelle avenue Victor-Hugo, percée en 1885. Le chantier du théâtre municipal débute le 7 février 1898 et rencontre rapidement des difficultés techniques. Construit sur des terrains marécageux gagnés sur la mer, les fondations établies sur pilotis afin de contrer l'instabilité des sols sablonneux et les infiltrations. Lors du creusement initial, à un mètre de profondeur, les ouvriers découvrent un véritable cimetière de vieux bateaux qu'il faut déblayer. 

Le futur théâtre Molière, à la pointe de la technique, se dote d'une ossature métallique à fermes « Polonceau », à double poinçon renversé pour les charpentes couvertes de zinc. Les façades en pierre de taille attestent de la volonté de prestige : calcaires de Ruoms pour le soubassement, de Nîmes pour la façade principale, plus coquillé des Baux-de-Provence pour les élévations et pierres de Beaucaire pour les encadrements. Le budget total s'élève à 1,5 millions de francs or. Le bâtiment est inauguré le 9 avril 1904. La toute première représentation, "La Favorite", opéra de Gaetano Donizetti, se donne 12 avril 1904. 








Vestibules, foyers, salle et galeries développent un abondant décor de stucs, tentures, mobiliers et peintures. Le Drame et la Comédie lyrique deux statues du sculpteur sétois Marius Roussel (1874-1942), élève de Falguière, surplombent l'escalier d'honneur à double volée. Aux murs se déploient les peintures " Le carnaval " et "Le déchargement des oranges" d’Émile Troncy (1860-1943), " Les Joutes " de Léon Galand (1872-1960), "La danse du Feu" d’Ernest Azema (1871-1917). Une statue contemporaine, hommage à Jean Vilar (1912-1971), complète l'ensemble.

Huit panneaux peints, toiles marouflées, scènes de la vie portuaire, fêtes galantes et paysages, œuvres du Sétois Lucien-Victor Guirand de Scévola (1871-1950), ornent le Foyer. Dans l'avant-foyer, des médaillons de grés émaillé représentent Giuseppe Verdi, Hector Berlioz, Richard Wagner et Victor Hugo. Édouard Lefèvre (1842-1923), élève d’Alexandre Cabanel, signe les décors de staff de l’ensemble des plafonds.

La salle à l'italienne est surmontée d'un ciel nocturne ponctué d'allégories des Arts du spectacle, Musique, Théâtre, Danse, Apollon sur le char du Soleil, plafond peint sur toiles marouflées. Le lustre monumental d'Henri Beau (1855-1937), dimensions remarquables, diamètre 3,5 mètres, hauteur 4,5 mètres, éclairé par quatre-vingt-onze ampoules, se compose de trois-mille-huit-cent-trente-quatre pampilles de verre. La salle se déploie autour de l'amphithéâtre sur trois galeries avec balcons, loges et baignoires. Eugène Carpezat (1833-1912), décorateur du Palais Garnier, réalise neuf panneaux pour les décors de scène.

Le théâtre municipal devient Théâtre Molière en 1983 et Scène nationale de Sète et du Bassin de Thau en 1987. Ce label créé par le ministère de la Culture en 1984 s'accompagne d'une mission de création, de diffusion du spectacle vivant et de développement culturel au niveau régional. Depuis 2003, le Théâtre Molière, patrimoine intercommunal, est placé sous la responsabilité de Sète Agglopôle Méditerranée.

Une rénovation d'ampleur, menée entre l'automne 2011 et le printemps 2013, durant dix-huit mois, apporte une restauration nécessaire au théâtre intouché depuis sa construction. Il s'agit d'entretenir les façades, les oeuvres variées mais aussi de moderniser les équipements et d'effectuer une mise aux normes. Le chantier complexe qui tend à concilier conservation patrimoniale et usage contemporain est confié à Xavier Fabre du cabinet Fabre-Speller, intervenu auparavant sur le Théâtre du Rond-Point à Paris, ainsi que des théâtres à Saint Petersburg, Arles et Montluçon. Thau Agglo finance le projet à hauteur de 70% et l'État, la Région, le Département complètent le budget estimé à dix-sept millions d'euros.

Aujourd'hui, le Théâtre Molière Sète Scène Nationale Archipel de Thau joue un rôle essentiel dans le rayonnement culturel de la ville et de la région.

Théâtre Molière - Sète, Scène Nationale Archipel de Thau
Avenue Victor Hugo - 34200 Sète
Tel : 04 67 74 02 02
Horaires : du mardi au jeudi, de 12h à 18h - le vendredi de 10h à 18h et le samedi de 13h à 18h



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.