Paris : Cour des Shadoks, ancienne cour artisanale du Faubourg Saint Antoine, témoin de l'évolution du quartier - XIème

 


La Cour des Shadoks, accessible depuis le 71 rue du Faubourg Saint Honoré, se dissimule au regard derrière un immeuble sur rue du XIXème siècle. Elle appartient à l'ensemble constitué progressivement depuis le XVIIème siècle, désigné à partir de la fin du XVIIIème siècle sous l'appellation Cour de l'Etoile d'or. Le nom renvoie à la présence d'une enseigne d'importance qui s'y trouve alors. La parcelle entre le 75 et le 71 rue du Faubourg Saint Honoré se déploie sur deux cours l'une à vocation résidentielle et la seconde plus industrieuse. À l'occasion de la réhabilitation menée en 1998 par l'architecte Didier Drummond, cette dernière prend le nom de cour des Shadoks, en hommage à l'un de ses résidents, Jacques Rouxel (1931-2004) créateur dans les années 1970 de la série animée éponyme. Une verrière décorée des personnages iconiques marque l'entrée. Cette cour artisanale typique du Faubourg Saint Antoine est accessible librement en semaine aux horaires de bureau. Aujourd'hui occupés par des sociétés du tertiaire, société de production, conseil en informatique, éditeur de logiciel, elle conserve cette atmosphère hors du temps, entre les arbres, les vieux pavés et les anciens ateliers reconvertis.








Épicentre de la Révolution française, avec la prise de la Bastille en 1789, ou bien les barricades de la Révolution de 1830, le quartier du Faubourg Saint Antoine a longtemps entretenu des foyers de contestation populaire, liés aux corporations des artisans du meuble. L'intervention du baron Haussmann sur le tissu urbain, après 1860, cherche à désamorcer cette cohésion, mater une population engagée politiquement. Symptomatique des mesures prises en ce sens, l'artère principale est divisée sur deux arrondissements distincts. 

Quartier du meuble depuis le XVIIème siècle, le Faubourg Saint Antoine réunit métiers d'art et savoir-faire variés. Artisans du bois et du métal, ébénistes, menuisiers, tapissiers, laqueurs vernisseurs oeuvrent ensemble dans les nombreuses cours et impasses qui composent un tableau pittoresque. Mais au tournant des années 1970, la désindustrialisation de Paris, après avoir délocaliser les grandes usines, touche désormais les ateliers plus modestes. Les artisans déménagent en périphérie, les Lilas, Montreuil, Bagnolet. 

Au cours des années 1980, les promoteurs immobiliers investissent les vastes espaces industriels désaffectés, lieux chargés d'histoire. Les entrepôts, les manufactures se transforment en loft de prestige, en agences du tertiaire, studio d'architecte tels que l'agence Jean-Michel Wilmotte, siège de marques prestigieuses à l'instar de Jean-Paul Gaultier, bar-restaurant comme le Barrio Latino. La création de lieux culturels, l'Opéra Bastille ou l'installation de la Fnac, scande les étapes importantes de l'évolution du quartier. Les cours et passages sont réhabilités au gré de la gentrification. Les occupants, plus aisés, font cohabiter l'ancien monde et le nouveau. 








La Cour de l'Etoile d'or témoigne de ce destin commun au quartier. Elle se constitue à partir du XVIIème siècle autour d'une maison bourgeoise dotée d'une cour et d'un jardin, édifiée en 1640. Vers 1750, une grande partie des jardins est sacrifiée afin de créer un second segment, une deuxième cour où écuries et remises voient le jour. Tandis que la cour originelle conserve une fonction résidentielle, la nouvelle affirme sa vocation industrieuse avec la construction d'un hangar à bois. Progressivement, s'y développent ateliers d'artisans et modestes logements attenants. 

Vers 1800, l'ancien pavillon de la première cour, la maison Pongor, est rebâtie sur les fondations de la bâtisse originelle. L'escalier remarquable à rampe sculptée et balustres carrés est conservé. Cet élément sera classé à l'inventaire des Monuments historiques en 1928. 

En 1882, sous la houlette de l'architecte Chabot, les écuries de la seconde cour sont rasées, remplacées par un immeuble de quatre étages, destiné à accueillir des ateliers. Le bâtiment sur rue au-dessus du passage cocher est reconstruit dans le même temps. 








En 1997, la protection au titre des Monuments historiques est étendue aux façades, toitures, escaliers et divers bâtiments composant l'ensemble de la Cour de l'Etoile d'or. L'année suivante, il fait l'objet d'une vaste campagne de réhabilitation. 

Cour des Shadoks
Accès 71 rue du Faubourg Saint Antoine - Paris 11
Métro Ledru-Rollin ligne 8 / Bastille lignes 1, 5, 8 



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 


Bibliographie 
Le guide du patrimoine Paris - sous la direction de Jean-Marie Pérouse de Montclos - Éditions Hachette
Connaissance du Vieux Paris - Jacques Hillairet - Éditions Rivage
Paris secret et insolite - Rodolphe Trouilleux - Éditions Parigramme
Le guide du promeneur 11è arrondissement - Denis Michel et Dominique Renou - Éditions Parigramme