La place Henri Krasucki, à Ménilmontant, conserve un charme champêtre délicieusement provincial malgré la radicale transformation du quartier de Casque d'or et des Apaches dans les années 1970. Au carrefour des rues des Cascades, de la Mare, Levert, des Couronnes, un arbre robuste marque le centre du rond-point. Des cafés dans leur jus, une boulangerie au décor classé de 1910, un bistrot littéraire, un mur de street art, une école primaire, des associations et l'une des rares volées d'escaliers rescapées de Belleville, tout ici est question d'atmosphère. Curiosité invisible, sous la chaussée, se trouve le regard des Cascades, situé entre le 84 et le 91 rue des Cascades et la place Henri Krasucki, élément de l'ancien réseau des Eaux de Belleville, alimenté par les eaux de ruissellement et l'aqueduc du même nom.
En 2004, à l'occasion du soixantième anniversaire de la Libération de Paris, la Ville prend des mesures symboliques afin d'honorer la mémoire de la Résistance. L'arrêté municipal du 29 avril 2004 donne au carrefour le nom d'Henri Krasucki (1924-2003), résistant FTP, déporté, dirigeant du Parti communiste français et secrétaire général de la CGT de 1982 à 1992. Juif polonais, naturalisé français, celui-ci a grandi à Belleville. Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, il habite au 107 rue des Couronnes, jusqu'en 1959, date à laquelle il déménage rue Armand Carel dans le XIXème arrondissement voisin. La plaque officielle de la place Henri Krasucki est inaugurée le 23 juin 2005, en présence de son épouse Jacqueline et de représentants de la Mairie, du PCF et de la CGT, lors d'une cérémonie interrompue par la pluie.
Ménilmontant, hameau de la commune de Belleville, conserve ses accents bucoliques, la trace d'un parcellaire déterminé par la culture de la vigne, et la présence de nombreux ateliers artisanaux voire de manufactures. L'urbanisation du quartier s'intensifie au cours de la seconde moitié du XIXème siècle, phénomène accentué à l'occasion du rattachement des communes périphériques au territoire de la Ville de Paris en 1860. Les grands travaux d'Haussmann chassent du centre de Paris les classes ouvrières qui se replient en périphérie.
Belleville et Ménilmontant, quartiers populaires, deviennent des creusets de contestation, foyer d'insurrection. Dès le XVIIIème siècle et tout au long du XIXème, ce foyer d'insurrection alimente des mouvements d'envergure, Révolution de 1848, Commune de Paris 1871.
Dans ce périmètre particulier de la ville, l'industrialisation donne naissance à de petits ateliers, nichés au fond des cours ouvrières. L'activité se concentre autour de l'habillement, la passementerie ainsi que les sous-produits des abattoirs de la Villette, travail du cuir, chaussures, peignes.
La population se densifie, nouveau prolétariat alimenté par les vagues de migration successives : Juifs ashkénazes d'Europe centrale, Pologne, Russie au début du XIXème siècle, Arméniens fuyant le génocide, Grecs, puis dans les années 1930 Juifs d'Allemagne, Espagnols rescapés du régime de Franco, Maghrébins, Chinois et Vietnamiens puis migrants d'Afrique subsaharienne. Ils ouvrent des commerces, des échoppes, tailleurs, cordonniers, des magasins d'alimentation, des cafés et restaurants et donnent aux villages de Belleville et Ménilmontant leurs visages actuels.
Place Henri Krasucki
Métro Jourdain ligne 11
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
Bibliographie
Le guide du promeneur 20è arrondissement - Anne-Marie Dubois - Parigramme
Connaissance du Vieux Paris - Jacques Hillairet - Rivages
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