Paris : Ancien Hôpital Laennec devenu "Paris 7 Rive Gauche", un complexe résidentiel et un ensemble de bureaux haut de gamme - VIIème

 


L'ancien hôpital Laennec, site patrimonial héritier de l'hospice des Incurables fondé au XVIIème siècle, a fait l'objet d'un vaste programme immobilier "Paris 7 Rive Gauche" mené entre 2011 et 2014 par la Cogedim. L'ilot de 3,8 hectares situé entre la rue de Sèvres et la rue Vaneau forme un petit village très champêtre, luxueuse enclave. Au sein des deux hectares d'espaces verts, se distingue une recréation inspirée du XVIIème, le Jardin du potager, vaste de 3500m2. Inauguré en 2014, il est accessible au public selon le souhait des associations de riverains, depuis le Jardin Catherine Labouré au 29 rue de Babylone ou depuis l'impasse Oudinot au 55 rue Vaneau. La création en bordure de parcelle de quinze immeubles modernes a été confiée à l'agence d'architecture Valode et Pistre. Au complexe résidentiel haut de gamme de cent-quatre-vingt-dix-sept appartements s'ajoutent quatre-vingt logements sociaux, une résidence étudiante, une maison de retraite et 4500m2 destinés aux commerces. Les bâtiments historiques de l'ancien Hôpital Laennec, propriété d'Allianz Real Estate, ont été reconvertis en bureaux de standing, notamment le siège parisien de Kering, groupe de François Pinault, et de la maison Balenciaga. 








Au XVIIème siècle, la création de l'Hospice des Incurables destiné aux malades en soins palliatifs est financée grâce à de puissants donateurs. En 1625, l'abbé François Joulet de Châtillon aumônier ordinaire du roi Henri IV, et proche du duc de Sully, lègue sa fortune aux administrateurs de l'Hôtel-Dieu afin d'initier ce projet. En 1634 le cardinal F. de la Rochefoucauld, grand aumônier du roi, entreprend la réforme des hôpitaux et fait un don très important afin de poursuivre l'action de son prédécesseur. Le chantier de construction de l'Hospice des Incurables débute dans la foulée mais l'autorisation officielle par lettre patente du roi Louis XIII n'est accordée qu'en 1637. L'accord de l'Évêque de Metz, Abbé de Saint-Germain, propriétaire des terrains, n'est signé qu'en 1638. 

L'architecte Christophe Gamard, maître maçon en 1613, juré de la ville en 1626, architecte voyer de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés en 1627, puis architecte du roi en 1639, conçoit un ensemble constitué autour de la chapelle. Le site s'inscrit dans la rigoureuse symétrie du plan en croix de Jérusalem. La chapelle au centre du dispositif, les ailes se déploient ans le prolongement des bras du transept. Au fond de la cour d'honneur, la façade de style classique est coiffée d'un fronton triangulaire, pignons et lanternons. Les deux bâtiments hospitaliers, pierre et brique, deux étages sur rez-de-chaussée, Cinq salles destinés aux hommes, cinq salles pour les femmes, s'achèvent sur des pavillons en saillie. La géométrie du site créé huit cours dont les cours de la Rochefoucauld et Gamard, et huit jardins dont certains puits ont été conservés jusqu'à nos jours. Derrière le chevet de l'église se trouvait le cimetière. Le chantier se poursuit tout au long du XVIIème jusqu'au XVIIIème siècle, au gré d'extensions variées.

Les dons des généreux bienfaiteurs, Marguerite de Rouillé, la famille Turgot, permettent l'expansion de l'établissement. En 1658, l'Hospice des Incurables dispose de cents-huit lits. Il comptera trois-cents-soixante-dix lits en 1788. Au service des malades, des nécessiteux, des infirmes, des personnes âgées et des orphelins, la congrégation des Filles de la Charité, fondée en 1633, par saint Vincent de Paul (1581-1660) et sainte Louise de Marillac (1591-1660), oeuvrent au sein de l'hôpital durant deux siècles. La Révolution les chasse un temps de leur service. Les soeurs de la Charité réintègrent leurs fonctions en 1810. En 1813, les religieuses établissent leur maison généralice dans l'ancien hôtel de Châtillon voisin. 









En 1802, le service des hommes est transféré au couvent des Récollets, hôpital Villemin. En 1869, l'hôpital est fermé à la suite du transfert de l'hospice des femmes à Ivry. Durant la Guerre de 1870, il rouvre brièvement comme de l'Hôpital-annexe de la Charité avant de clore ses portes en 1871. En 1873 l'ancêtre de l'Assistance publique des Hôpitaux de Paris reprend la direction de l'Hospice des Incurables. Il devient Hôpital Temporaire en 1874 avec une administration indépendante. En 1878, l'établissement, se révélant plus pérenne que prévu, devient Hôpital Laennec en l'honneur du docteur René Laënnec (1781-1826), qui développe le diagnostic médical par auscultation grâce à l'invention du stéthoscope. 

Au cours du XXème siècle, les différents bâtiments font l'objet de transformations successives répondant à l'évolution des besoins techniques : installation du chauffage et éclairage au gaz (1880), d'un pavillon de bains (1900), construction du Dispensaire Léon-Bourgeois (1913), du pavillon de chirurgie (1925), puis des pavillons Lombard et O.R.L. Les annexes du complexe sont édifiées sur les jardins potagers et dans les cours. L'hôpital Laennec qui regroupe les spécialités liées aux pathologies pulmonaires cesse son activité en 1999. Les services sont transférés à l'hôpital européen Georges Pompidou.








En 2002, l'APHP vend le site vétuste à Altarea Cogedim, promoteur parisien, associé à cette occasion à AGF devenu Allianz. Dix années de gestation sont nécessaires pour mener à bien le projet de réaménagement et redonner vie à cette vaste friche du VIIème arrondissement. Programme immobilier mixte, le chantier débute en 2011 et s'achève en 2014. Il a pour objectif de valoriser l'environnement historique, conserver et restaurer les éléments du XVIIème siècle, restituer ceux démolis notamment les anciennes cuisines, raser les constructions parasites du XXème siècle. L'agence Valode et Pistre est chargé par la Cogedim de la construction de quinze immeubles modernes, le long de la rue Vaneau. Le complexe résidentiel haut de gamme se compose de cent-vingt-dix-sept appartements, auxquels sont ajoutés quatre-vingt logements sociaux détenus par Paris Habitat OPH, une maison de retraite équipée pour accueillir quarante-deux personnes, une résidence étudiante de cinquante places, baux commerciaux 

Les bâtiments historiques, propriété d'Allianz Real estate, sont reconvertis en 17 200m2 bureaux de standing, notamment le siège parisien de Kering, groupe de François Pinault, et de la maison Balenciaga. Les espaces patrimoniaux sont aménagés sous la direction de l'architecte des monuments historiques Benjamin Mouton. Mais la reconversion est mouvementée. Des associations de protection du patrimoine tentent de rendre caduque la vente de la chapelle édifiée sous Louis XIII, classée à l'inventaire des Monuments historiques en 1977. Jamais désacralisée, elle n'aurait, de ce fait, pas pu quitter le domaine public. En 2011, alors que débute les travaux, la sacristie est rasée à la suite d'une erreur humaine. Elle sera reconstruite à l'identique entraînant un nouvel incident, le bétonnage des sépultures du cardinal de la Rochefoucauld, de Michel Etienne et Robert Turgot.

Ancien hôpital Laennec
42 rue de Sèvres - Paris 7
Métro Vaneau ligne 10



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 

Bibliographie
Le guide du patrimoine Paris - Sous la direction de Jean-Marie Pérouse de Montclos - Hachette
Le guide du promeneur du 7è arrondissement - Françoise Colin-Bertin - Parigramme
Saint-Germain des Prés et son faubourg, évolution d’un paysage urbain - Dominique Leborgne - Parigramme
Connaissance du Vieux Paris - Jacques Hillairet - Rivages