Paris : Arbre abattu rue de Furstemberg. Pourquoi le paulownia de la place a-t-il été coupé ? L'abattage était-il évitable ? - VIème

 

Le plus gros et plus ancien paulownia de la rue de Furstemberg, vénérable octogénaire de 355cm de circonférence, a été abattu le 1er août 2023 afin de "préserver la sécurité des usagers". Cet arbre remarquable, l'un des symboles du charme germanopratin, présentait selon le communiqué de la Mairie de Paris un défaut d'ancrage du fait des détériorations de son système racinaire. Le risque de chute désormais critique, l'abattage aurait été rendu nécessaire selon le diagnostic des experts sylvicoles accrédités par la municipalité. Quatre arbres de la même essence, place Laurent Terzieff et Pascale de Boysson, qui présentaient des inclinaisons inquiétantes et le même problème au niveau des racines, ont subi le même sort. La Ville de Paris s'est engagée à planter de nouveaux spécimens en remplacement au cours de l'hiver prochain, période idéale, entre novembre 2023 et mars 2024. Sur le carré central de la rue de Furstemberg, élargissement qui forme une placette se trouve désormais une souche à laquelle riverains et touristes émus rendent hommage. L'abattage aurait-il pu être évité ? Les associations de défense de l'environnement dénoncent le manque d'entretien du patrimoine naturel de la ville et en particulier des arbres remarquables. Néanmoins cette essence particulière, le paulownia tomentosa, possède un système racinaire restreint, et développe naturellement un défaut d'ancrage en particulier dans un cadre urbain.


Août 2023

2020

2023

2023

2023

2023


L'émotion suscitée devant les images spectaculaires de l'abattage du paulownia de la rue de Furstemberg et la souche résultante vient souligner l'attention croissante des citoyens concernant la préservation du patrimoine naturel. La difficulté à saisir l'intérêt des interventions menées en urgence a ravivé une nouvelle fois le hashtag #saccageparis sur les réseaux sociaux. Hashtag critique vis à vis de l'action de la Mairie de Paris qui vise à dénoncer la dégradation du patrimoine de la ville de Paris et des conditions de vie. 

La disparition des cinq arbres du VIème arrondissement pose la question de l'entretien des arbres. Christophe Najdovski adjoint en charge de la végétalisation, de l'espace public, des espaces verts, de la biodiversité, de la condition animale, confirme dans un communique que le paulownia de la rue de Furstemberg, suivi depuis des années, avait fait l'objet de mesures de préservation importante. En 2018, les branches avaient été consolidées, haubanées avec des câbles. La partie haute le houppier était taillée avec attention pour réduire la prise au vent. Néanmoins, le test de traction, c'est à dire de résistance au vent, réalisé en juin 2023 avait conclu au risque de chute significatif, risque amplifié par des traces de moisissure au niveau des racines. Les experts sylvicoles jugeaient désormais l'abattage nécessaire. 



Août 2023

2020

Août 2023

Août 2023

2020


Le paulownia tomentosa, arbre à croissance rapide, prisé pour ses qualités décoratives, ornementales, importé en Europe de Chine au XIXème siècle manifeste une bonne résistance à la pollution atmosphérique et aux parasites. Inconvénient majeur de cette essence, il manifeste une assise racinaire réduite. De ce fait, la variété nécessite beaucoup d'entretien et de surveillance afin limiter les risques de chute, mesures d'envergure menées à long terme pour maintenir leur équilibre. Notamment chasser les rats qui apprécient cette essence au bois tendre pour y creuser des nids. Selon Tangui Le Dantec, spécialiste de la santé urbaine et environnementale, de l'urbanisme paysager et de la végétalisation en ville, enseignant à l'ESAJ, co-fondateur de l'association Aux Arbres Citoyens, qui oeuvre pour la sauvegarde des arbres, a souligné la prolifération des rongeurs comme facteur de fragilisation du paulownia, de déstabilisation de l'assise.

Prolonger l'espérance de vie des arbres parisiens serait possible grâce à un entretien accru. Mais la diminution du budget consacré à la préservation des arbres, 6,5 millions en 2023 soit 3,3 millions d'euros en moins que l'année précédente, conduit à faire des choix draconiens. Notamment l'abattage des arbres fragiles faute de moyens techniques mais également humains. En effet, la Mairie de Paris rencontre des difficultés de recrutement des bûcherons. Depuis vingt-cinq ans, leur nombre a été divisé par deux et le vieillissement du personnel induit de travailler autrement. Le secteur privé rémunère mieux ses spécialistes et les postes publics manquent d'attractivité. Les syndicats sont engagés dans des négociations pour la revalorisation des salaires. 


2023

2023

2023

2023

2023


L'abattage des cinq paulownias pose la question de la préservation des arbres dans le cadre du changement climatique. Les arbres anciens plus efficaces que les jeunes spécimens pour lutter contre les événements climatiques extrêmes, tels que les fortes chaleurs, ont des impacts directs sur la qualité de l'air et des sols. Plus de la moitié des arbres plantés par la municipalité n'atteint pas la maturité, déperdition massive liée notamment à la méthode de plantation mais aussi à l'évolution de l'écosystèmes urbain. L'assèchement des sols, la minéralisation des environnements, l'étanchéisation des infrastructures souterrains, altèrent profondément la circulation des eaux et les nappes phréatiques. Le plan local d'urbanisme bioclimatique adopté en juin 2023, privilégie la réhabilitation aux reconstructions et initie des pistes nouvelles pour repenser les aménagements urbains. 



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.