Paris : 4-6 Aumont Thiéville, ensemble d'ateliers d'artistes édifiés à la fin du XIXème siècle par les ateliers Eiffel - XVIIème

 


Les ateliers d’artistes du 4-6 rue Aumont-Thiéville, restaurés récemment, attirent volontiers l’œil par leur façade ripolinée d’un curieux rose vif. Edifié en 1884 par les ateliers Eiffel, l’ensemble se caractérise par une simplicité formelle, structure métallique apparente, remplissage de briques. La façade distribuée en six travées d’ateliers traduit un souci d’économie de moyens et d’épure esthétique. L’ancienne cité d’artistes reconvertie en bureaux et résidences privées classiques a conservé ses vastes verrières orientées au Nord et sa luminosité idéale, ses hauteurs sous plafond importantes ainsi que des aménagements concrets tels que les crochets et les potences susceptibles de soulever des charges en façade.









L’urbanisation tardive du quartier de la Plaine Monceau s’intensifie dans les années 1870 au lendemain du rattachement de la commune Batignolles-Monceaux à Paris. Les belles proportions des terrains à bâtir séduisent une nouvelle bourgeoisie d’argent, industriels, banquiers qui souhaitent établir leur statut social flambant neuf par la pierre et des hôtels particuliers à la pointe de la mode. Les artistes en vogue, les mondains enrichis, architectes, peintres académiques, musiciens et compositeurs, femmes entretenues, chanteuses et comédiennes, se joignent à la cohorte. Néanmoins, jusqu’au début des années 1880, la rigueur haussmannienne qui encadre strictement les constructions à Paris limite l’inventivité. En 1882 et 1884, deux premiers décrets, bientôt suivis d’un troisième décisif en 1902, assouplissent le règlement d’urbanisme. Les architectes s’émancipent des contraintes normatives. La couleur se manifeste à nouveau sur les façades parisiennes. L’association pierre et brique moins coûteuse que la pierre de taille est alors jugée plus cossue que les compositions de pierre et de métal.

Les artistes débutants prometteurs, créateurs aux premiers succès significatifs doivent se contenter de cette dernière option en attendant la gloire. La cité d’artistes du 4-6 rue Aumont-Thiéville, située dans le quartier approprié, illustre l’entre-deux de leur statut. Conçue par les ateliers de Gustave Eiffel (1832-1923), ingénieur centralien, industriel, elle témoigne du sens des affaires et de l’innovation, de cet entrepreneur inspiré qui a multiplié les prouesses techniques. L’ensemble cohérent traduit une volonté d’édifier un immeuble adapté au prestige du quartier, respectant le cahier des charges de l’atelier d’artiste, les conditions matérielles particulières, tout en réduisant les délais de construction et le coût général. L’emploi systématiques de modules standardisés réalisés dans les ateliers de Levallois-Perret selon des principes industriels réduisent les frais. La charpente métallique dont la capacité porteuse est fortement accrue par rapport aux charpentes de bois, libère la structure porteuse des maçonneries aussi massives qu’onéreuses. Cette conception permet une adaptation aux fonctions évolutives de l’atelier d’artiste, point chaud de la création, espace domestique familial, lieu de réception des proches mais aussi des élèves et des éventuels clients. 










En 1862, Gustave Eiffel démissionne de la Pauwels et Compagnie où il a fait des débuts prometteurs et devient ingénieur-conseil indépendant. Il crée la G. Eiffel et Cie en 1863 pour acquérir en 1866 acquisition les Ateliers Pauwels de construction métallique à Levallois-Perret. L’entreprise se distingue par l’édification de divers ponts ainsi que la structure interne de la Statue de la Liberté inaugurée à New York en 1886 et la célèbre Tour Eiffel, édifiée entre 1887 et 1889 à l’occasion de l’Exposition Universelle de 1889. Entrepreneur visionnaire, Gustave Eiffel sait également s’entourer de collaborateurs de talent, Théophile Seyrig en 1869, Emile Nouquier en 1875, Maurice Koechlin en 1879. 

Son ascension est néanmoins entachée par le scandale du canal de Panama, les ateliers Eiffel étant constructeurs des écluses du canal. Si Gustave Eiffel, simple fournisseur, sortira blanchi de l’affaire, celle-ci marque la fin de ses activités industrielles. 

Ateliers d’artistes 
4-6 rue Aumont-Thiéville - Paris 17



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.