Dans une ferme familiale du Kent, la vache Luma, belle tête blanche tachetée de noir, met bas. Son veau lui est arraché quelques heures après la naissance. Meuglements déchirants. Le petit continue de chercher sa mère laquelle refuse de s’alimenter. Vache laitière, Luma a pour destin la trayeuse mécanique tandis que son veau sera nourri de lait en poudre par l’éleveur. Réalité d’une existence marquée par l’ennui, la solitude, après l’ombre de l’étable sonorisée par la radio et les tubes pop, le hangar de traite aux bruits mécaniques inquiétants, les pâturages verdoyants, moments solaires d’apaisement, paraissent bien illusoires.
Oeuvre réaliste contemplative, mélopée sans paroles, « Cow » raconte le monde depuis le point de vue de l’animal, âpre existence. Andrea Arnold a tenté d’éviter l’anthropomorphisme, cherchant à ne pas humaniser Luma malgré l’attachement et l’empathie sensibles à l’images. Pourtant le beau regard triste dans lequel se lit toute la résignation du monde, l’indifférence ou le trouble quand l’œil fixe la caméra, emportent vers des sentiments où le lyrisme se mêle à la révolte. Les échos troublants sur les thématiques de la maternité, la solitude, l’incarcération résonnent longtemps. La réalisatrice livre une relecture poignante de notre rapport à l’animal. Avec un sens du récit remarquable, elle montre l’absurdité du système mis en place par l’industrie de l’agroalimentaire sans accabler les fermiers, dont le travail, le quotidien très dur est le fruit d’une réalité complexe.
Enregistrer un commentaire