Expo Ailleurs : Les Péninsules démarrées - Frac Nouvelle-Aquitaine MÉCA - Dans le cadre de la Saison France Portugal 2022 - Bordeaux -Jusqu’au 26 février 2023

 

Dans le cadre de la Saison France Portugal 2022 initiée par l'Institut français, le Frac Nouvelle-Aquitaine MÉCA rend hommage à la scène artistique lusitanienne contemporaine à l’occasion d’une exposition, suivie d’une résidence d’artiste et de l’édition d’un catalogue. « Les Péninsules démarrées » emprunte son titre au beau vers de Rimbaud, extrait du poème « Le bateau ivre » (1871). Il fait ici référence à la situation géographique déterminante du Portugal, péninsule continentale, le plus ancien état-nation d’Europe dont les frontières terrestres demeurent immuables depuis 1297. Pays explorateur, puissance coloniale, le joug d’un régime autoritaire, la dictature de Salazar de 1933 à 1974, a isolé durablement cette nation fragilisée par les guerres de décolonisation. Anne Bonnin en charge de la curatelle, également commissaire de l’exposition « Modernités portugaises » à la Maison Caillebotte de Yerres, a établi une cartographie sélective de la scène lusitanienne de 1960 à nos jours. L’évènement ne vise pas l’exhaustivité. Il s’agit de découvrir l’effervescence d’une scène méconnue en France à travers vingt-neuf artistes, cent-trente-cinq œuvres. Le parcours thématique se divise en sections consacrées à l’histoire coloniale, la langue et la littérature, l’image-énigme, le corps et ses métamorphoses, la vie quotidienne, l’autoreprésentation.



Francisco Tropa - Scripta - 2016

Malangatana Cela 4 - Expectativa - 1967

Alvaro Lapa

Alvaro Lapa 



Bruno Pacheco - Marvel - 2020

Maria José Oliveira - Conception spatiale - 1998


De la confrontation à la juxtaposition, "Les Péninsules démarrées" lance des ponts entre les pratiques, les propos, les générations. L'exposition porte un regard inspiré sur l’art portugais actuel, éclaire les filiations intellectuelles et philosophiques, ausculte la mémoire commune dans un aller-retour entre les voyages physiques et les périples intérieurs. Le propos navigue de digressions en partis pris et interroge les affinités naturelles. La monstration raconte l’histoire d’une rencontre avec des artistes, des univers plastiques. L’éclectisme des pratiques, peintures, sculptures, dessins, vidéos, installations se plie à la variété des territoires créatifs. 

L’exposition « Les Péninsules démarrées » célèbre la création portugaise depuis les années 1960, jusqu’à nos jours, six décennies comme autant d’épisodes de l’histoire contemporaine. Le régime autoritaire de l’Estado Novo de 1933 à 1974, prend fin avec Révolution des Œillets en 1974. La diaspora en exil donne naissance à une scène artistique composite, réunissant des artistes d’horizons très différents. Au Frac Nouvelle-Aquitaine MÉCA, les œuvres revendiquant un engagement contre la dictature, contre la censure, les réquisitoires contre les violences liées aux guerres de décolonisation côtoient des propositions au sujet de l’émancipation féministe, l’éveil des conscience écologiques, les doubles expérimentations linguistiques et graphiques. Florilège très personnel.

Malangatana Ngwenya (1936-2011) né en 1936 à Matalana au Mozambique, peintre, sculpteur, poète, céramiste, graveur, dénonce les atrocités de la guerre d’indépendance (de 1964 à 1974), puis la guerre civile, à travers des compositions foisonnantes peuplées de foules compactes. Ses grandes peintures murales exécutées dans des lieux publics entrent en écho avec ses toiles de dimensions plus modestes, porteuses d’un même message social et politique. La densité des lignes, la stridence des couleurs parle de la souffrance, des luttes.  Révolté, Malangatana a connu un apaisement tardif en devenant Artiste pour la paix de l’Unesco et fondateur du Musée national d’art du Mozambique.  

Philosophe de formation, Alvaro Lapa (1939-2006) s’affirme plastiquement dans la liberté de l’autodidacte. Il imagine un système de signes, un vocabulaire esthétique qui traduit sa fascination des formes. Au cours des années 1960, Lapa rencontre des artistes proches du surréalisme et de l'art américain émergent. Leur influence marque ses paysages, filiation nouvelle pour cet indépendant qui se reconnait dans l’expressionnisme abstrait.

Né en 1968 à Lisbonne, Francisco Tropa représente le Portugal à la Biennale de Venise en 2011. Acteur majeur de l’art contemporain, il sera invité à partir du 15 octobre 2022 au Musée d’art moderne de Paris pour une exposition d’envergure. Au Frac, son installation « Scripta » s’inspire d’un jeu de table antique, populaire à Rome, le duocecim scripta.





À gauche René Bértholo - Littérature conjugale - 1966

René Bértholo - Palmier - 1966

Manuel Alves - Isaias - 1970

Belén Uriel - Quechuas - 2020

À droite Paula Rego - Sem titulo - 1986

À droite Jorge Queiroz Hourglass 2021


Figure incontournable de la scène contemporaine, Paula Rego (1935-2022) artiste plasticienne, a trouvé refuge en Angleterre. Par le biais de la peintre et de la gravure, elle imprime un mouvement constant entre abstraction et figuration. L’intrusion du fantastique puisé à la source des contes traditionnels portugais apporte une dimension fantaisiste à son propos développé autour des thématiques féministes, notamment l’émancipation sexuelle, et des éléments autobiographiques.

Epoux de Lourdes Castro (1930-2022) peintre et plasticienne, René Bérthelo (1935-2005) assemble, associe, expérimente. Ses paysages animés procèdent de l’abstraction lyrique. Ensemble, ils émigrent à Paris en 1958, et fondent le groupe d’artistes portugais en exil KWY actif entre 1959 et 1963. Lourdes Castro explore l’abstraction et expérimente de nouveaux matériaux pour construire des objets étranges et oniriques. Elle questionne les notions de présence et d’absence, associe dans un même geste la gravité et l’humour. Les silhouettes humaines découpées dans des matériaux transparents convoquent les néons de la nuit, les enseignes d’un genre particulier.

José Queiroz (né en 1966 à Lisbonne), peintre et dessinateur, compose des abstractions figuratives marquées par la richesse d’une palette chromatique flamboyante. Fruit de la sédimentation des phénomènes picturaux, le foisonnement ornemental ouvre des pistes symbolistes dans la veine surréaliste. Au gré des influences, le néo-expressionnisme allemand, le paysage contemporain, son univers onirique atteint une dimension mystique. 

Leonor Antunes, née en 1972 à Lisbonne, vit et travaille à Berlin. Son travail sur l’échelle, les proportions, la gravité éclaire un intérêt particulier pour les structures architecturales. Ses installations sculpturales s’approprient et détournent les motifs patrimoniaux du modernisme, du rationalisme de Le Corbusier. Elle opère une bascule en introduisant dans sa démarche poétique et sensible l’héritage culturel vernaculaire, arts et traditions populaires.


Jorge Queiroz



Joao Pedro & Nuno Alexandre Ferreira - Sweet Sixteen in Sixties - 2020

Joao Pedro & Nuno Alexandre Ferreira - Sweet Sixteen in Sixties - 2020


Helena Almeida - Photographies - Desenho Habitado 1977 

Francisco Tropa - Pietà - 2019

Maria José Oliveira - Sistema Muscular e Coluna Vertebral 2004


Précurseure des nouvelles figurations des années 1970, Maria José Aguiar, née à Barcelos en 1948, revendique une irrévérence libertaire qui embrasse les combats féministes, le sexe, l’émancipation. Sa célèbre série « Marcas » questionne le genre et les relations de pouvoir à travers le corps biologiques. Objet de grandes expositions thématiques, son oeuvre laisse transparaître des influences Pop art, un goût de l’expérimentation, un engagement radical que les pièces désignées sous le terme « camouflages » illustrent avec force

Collectionneuse d’objets, de techniques, de motifs, Ana Jotta (née en 1946 à Lisbonne) explore les champs artistiques, peinture, sculpture, photographie, installations. La série emblématique les « Jotas » embrasse le savoir-faire artisanal, la broderie, la poterie, supports d’une narration alternative. Elle glane citations, références, éléments du quotidien qu’elle croise en un mouvement d’effacement de la frontière entre l’art et la vie.
 
Von Calhau !, le duo artistique composé de Marta Ângela et Joao Alves, signe des projets sonores et visuels. Leurs performances s’inscrivent dans le cadre des grands concepts réflexifs actuels. Leurs mises en scène empruntent à l’absurde un humour salvateur. Au carrefour des disciplines, des pratiques artistiques, ils associent peinture, sculpture, musique, poésie, vidéo. Les spectacles glissent vers les concerts, les expositions. Les programmes radio deviennent ateliers, lectures. 

Les artistes : Maria José Aguiar, Helena Almeida, Manuel Alvess, Leonor Antunes, António Barros, René Bértholo, Isabel Carvalho, Lourdes Castro, Armanda Duarte, Alexandre Estrela, Gaetan, Ana Hatherly, Ana Jotta, Alvaro Lapa, Malangatana, E.M. de Melo et Castro, Maria José Oliveira, Bruno Pacheco, Jorge Queiroz, Paula Rego, Catarina Simão, Ana Santos, Ângelo de Sousa, Salette Tavares, Francisco Tropa, Belén Uriel, João Pedro Vale & Nuno Alexandre Ferreira et Von Calhau

Les Péninsules démarrées 
Jusqu’au 26 février 2023

Frac Nouvelle-Aquitaine MÉCA
5 Parvis Corto Maltese - 33800 Bordeaux
Tél : 05 47 30 34 67
Horaires : Du mercredi au dimanche de 13h à 18h (dernière entrée à 17h30) - Nocturne 3ème jeudi du mois jusqu’à 21h



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.