Expo Ailleurs : Artémis et la Grande Ourse - Christophe Doucet - Frac Nouvelle Aquitaine MÉCA - Bordeaux - Prolongation jusqu'au 30 octobre 2022

 


A l’invitation du Frac Nouvelle-Aquitaine, l’artiste Christophe Doucet investit les espaces de la MÉCA à Bordeaux. Du hall d’entrée jusqu’au sixième étage, ses œuvres zoomorphes ponctuent un parcours sculptural volontiers monumental. L’exposition « Artémis et la Grande Ourse », ode aux forces protectrices de la nature éclaire la puissance spirituelle de la forêt, berceau des nouvelles mythologies proposées par le sculpteur. Diplômé des Beaux-Arts de Bordeaux dans les années 1980, Christophe Doucet devient forestier dans les Landes par attachement à sa terre natale. Durant plus de vingt ans, il exerce cette profession sans jamais cesser de pratiquer la sculpture sur bois. Il développe un lien organique essentiel à la forêt. Lieu nourricier, domaine sacré de l’innocence originelle pas dépourvu d’une certaine cruauté, il y invente le récit d’un retour à la nature, imagine un bestiaire fantastique. Sous son ciseau, le bois donne naissance à des genres hybridés, figures fabuleuses, bascule entre l’animal et le végétal. Lièvres, chevreuils, ours, souris, renards peuplent son oeuvre, traduction sensible de son attachement au monde sauvage, aux créatures non-domestiquées. Sur fond de préoccupations écologiques ancrées dans l’époque, Christophe initie une réflexion nécessaire sur la place de l’homme dans son environnement, l’importance et la fragilité de la forêt. 



Aramazd

Grande Ourse

Lapine


L’exposition « Artémis et la Grande Ourse - Christophe Doucet » associe œuvres récentes et créations plus anciennes telles que « Calice », sculptée dans un platane, il y a vingt ans, dont le vocabulaire plastique convoque Brancusi. Au gré des réalisations et des années, se dessine un projet plastique porté par l’onirisme et souvent teinté d’humour. Le parcours atypique de Christophe Doucet éclaire sa démarche. Ses études aux Beaux-Arts de Bordeaux lui confèrent une connaissance intime de l’histoire de l’art. Il ponctue son oeuvre de clins d’œil amusés, tel que « Lièvre bleu » référence au Moïse de Michel-Ange. 

Diplôme en poche, Christophe Doucet ne souhaite pas s’installer à Paris où ses professeurs l’incitent à déménager afin de poursuivre sa carrière. Il doit trouver un moyen de subsistance s’il désire rester dans les Landes. Il devient forestier, tradition familiale. Durant plus de vingt ans, il travaille au cœur de la forêt. Christophe Doucet considère désormais ce détour comme un retour aux sources bénéfique. Impératif vital très personnel, il poursuit sa pratique artistique tout au long de cette carrière improvisée. 





Ourse blanche

Masques Chouette et Tigre


Aujourd’hui, Christophe Doucet se consacre à la sculpture. Il a installé son atelier sur la commune de Taller, dans une ancienne distillerie de résine au beau milieu d’un airial planté de chênes. Désormais, il arpente la forêt pour le plaisir. En fonction de la disponibilité, il y prélève la matière première nécessaire à son art, souches naturelles, portions de tronc non équarrie. Des grumes lui sont offertes choix par des propriétaires de parcelles, des anciens collègues. La singularité de sa démarche s’inscrit dans rapport particulier au matériau. 

La beauté plastique du motif végétal, formes déliées, intriquées, lui inspire des représentations chimériques, fusion de l’animal et du végétal. Le territoire de la forêt se révèle champ d’exploration et de ressourcement. Christophe Doucet développe un sentiment de proximité avec les arbres, fruits d’un environnement sacré et matière première de son art. Il se détache de la tentation conceptuelle pour embrasser une exploration plus instinctive du bois. La spontanéité prime sur la technique. Il se rapproche d’une idée de naïveté plastique, d’un certain archaïsme. 



Renard

Petite cabane et masques

Ours et saumon


La monumentalité des sculptures initiées au cœur de la forêt, rapproche sa pratique de celle du Land art. Christophe Doucet cite Michael Heizer, Robert Smithson et leurs grandes réalisations dans le désert. Eléments à échelle humaine, ses masques aux influences dogons, induites, amérindiennes, traduisent un goût des voyages, son insatiable curiosités pour les cultures. Christophe Doucet s’inspire des arts populaires, arts sacrés, des mythologies afin d’invention d’une cosmogonie personnelle. Il laisse libre cours à son imaginaire à sa fantaisie. Il exprime une vision panthéiste animiste, un rapport sacré à la nature. Son processus l’engage à créer ses propres outils, dans une démarche proche de l’artisanat, il utilise des outils de sabotier pour sculpter ses masques en aulne.

Christophe Doucet privilégie certaines essences de bois, séquoia, chêne, aulne glutineux, cèdre. Jamais le pin malgré son omniprésence dans les Landes, qu’il considère comme inadéquat à la sculpture. La souche prélevée, son essence, sa dimension, vont déterminer la forme finale. Il ausculte la matière, sonde, expérimente et cherche à exprimer la figure contenue dans la substance originelle. Se laissant guider, il cherche à capturer le dynamisme induit par les longes lignes de la fibre, les nœuds du bois. Christophe Doucet ne tente d’effacer ni la trace de l’outil ni la matière. La vitalité baroque des œuvres, propice à l’expressivité, célèbre le geste du sculpteur. La forme arrachée à la matière est présence mise à nu, révélée par la main de l’homme. Le matériau conserve l’empreinte de sa croissance au fil des saisons, foisonnement d’un passé mémoriel. L’oeuvre « La Grande Ourse » a été sculptée dans la souche du chêne où, enfant, il avait construit une cabane, histoire démultipliée de l'être humain et de l'arbre.


Chevreuil

Lièvre bleu

Artémis

Calice


Les séries sculptées par Christophe Doucet plaident pour la préservation de la nature et des ressources naturelles. Ludiques de prime abord, ses œuvres bienveillantes nous parlent de l’action nécessaire afin de sauver les écosystèmes en péril, des catastrophes naturelles engendrées par le réchauffement climatique, les incendies et les inondations.

Artémis et la Grande Ourse - Christophe Doucet 
Prolongation jusqu’au 30 octobre 2022

Frac Nouvelle Aquitaine MÉCA
5 Parvis Corto Maltese - 33800 Bordeaux 
Tél : 05 56 24 71 36
Horaires : Du mercredi 19 au samedi 22 mai de 13h à 18h30 - Du jeudi au samedi de 13h à 18h30



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.