Ailleurs : Fontaine du Pouffre, le Poulpe de Pierre Nocca, une icône sétoise - place Léon Blum - Sète


Le Poulpe, oeuvre de Pierre Nocca (1916-2016), anime de son foisonnement tentaculaire la fontaine de la place Léon Blum à Sète. Surnommé le Pouffre, appellation locale du céphalopode, symbole régional depuis la haute antiquité, le bronze se déploie impressionnant, créature marine digne de Jules Verne. Le poulpe sculpté dans une veine naturaliste s’accompagne de deux dauphins plus stylisés, autres animaux totems de la ville. Le jaillissement de l’eau accompagne la courbe gracieuse des cétacés. Malgré son aspect effrayant, la pieuvre renvoie à un plat populaire devenu emblème de la gastronomie sétoise, la tielle. Cette spécialité, tourte garnie de poulpe épicé, traditionnel déjeuner des pêcheurs italiens du Quartier-Haut, est désormais particulièrement apprécié par les gourmets. Commande de la Ville à l’artiste, la fontaine Poulpe a été inaugurée en 1987.








Dès les années 1960, la place de la Mairie de Sète est dévolue au stationnement des véhicules. En 1983, le nouveau maire Yves Marchand envisage un réaménagement afin de rendre cet espace aux piétons et à la quiétude sans véhicule inopportun. Quiétude heureuse à l’ombre des platanes. En 1985, Pierre Nocca, enfant du pays dont les nombreuses œuvres agrémentent l’espace public sétois, est chargé par les édiles d’imaginer un projet digne de la place Léon Blum. Le maire et son conseil valident la proposition de l’artiste, une fontaine surmontée d’un poulpe monumentale. Pierre Nocca conçoit un ouvrage dont les volumes prennent en compte la déclivité de la place et les perspectives en pente des rues escaladant le Mont Saint Clair. La réalisation du poulpe de bronze est confiée à l’atelier de fonderie d’art Crisol et la marbrerie Yeda compose le socle polychrome. La fontainerie est orchestrée par la société Prosjet. La fontaine du Poulpe sera entièrement rénovée en 2002/2003. 

Ville du poète Paul Valéry, du chanteur Georges Brassens, de l’homme de théâtre Jean Vilar du peintre Pierre Soulages, d’Hervé di Rosa ou encore de Robert Combas, Sète choie ses artistes. Pierre Nocca y nait en 1916 dans une famille modeste d’immigrés italiens. Il passe son enfance sur les bateaux-bœufs de son père et de ses oncles. A treize ans, il s’engage comme mousse.  Durant ses rares loisirs, il peint des marines pour l’atelier d’un peintre sétois. Ce dernier convaincu de son talent l’aide à intégrer les Beaux-Arts de Montpellier. L’art prend le pas sur la mer. Distingué par plusieurs prix, Pierre Nocca est admis à l’Ecole des arts décoratifs de Paris en 1936 avant d’être reçu aux Beaux-Arts de Paris en 1937. Il suit les cours au sein des ateliers d’Henri Bouchard, Charles Lemaresquier et Paul Niclausse.

En 1939, alors que la Seconde Guerre Mondiale éclate, il est enrôlé dans l’armée française. A la suite de la défaite, Pierre Nocca rejoint la Résistance en 1941. Il participe en 1944 à la Libération de Paris. Au lendemain du conflit, il obtient un atelier à la Ruche Montparnasse. Vivant à Saint-Germain-des-Prés, il fait la connaissance de César, fréquente Albert Féraud.







A partir de 1947, Pierre Nocca reçoit de plus en plus de commandes publiques plutôt dans le Sud, notamment à Montpellier. Il réalise monuments aux morts et hommages aux grands résistants. Lorsque son atelier de la Ruche, trop insalubre, est détruit en 1957, Pierre Nocca choisit de retourner dans sa région d’origine. Il s’installe définitivement à Sète en 1960 où se trouvent certaines de ses œuvres les plus emblématiques comme « Le Poulpe » de la place Léon Blum, datant de 1987 et « L’Ajustaïre », le jouteur du Cadre Royal inauguré en 2002.

Au coeur des espaces publics, Pierre Nocca imagine des œuvres monumentales expressives et symboliques. Il compose des formes épurées, équilibre entre les vides et les pleins. Son travail en légèreté des volumes explore la temporalité dans une forme de narration. Il cherche à animer les lignes, quête d’un mouvement perpétuel. A ce titre, le Poulpe très naturaliste de Sète apparaît en décalage avec le reste de son oeuvre. De 1965 à 1985, Pierre Nocca enseigne aux Beaux-Arts. En 2010, il est l’invité d’honneur des 268èmes fêtes de la Saint Louis. Il s’éteint en 2016 dans sa centième année. 

Fontaine Poulpe de Pierre Nocca
Place Léon Blum - Sète

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Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.